Le Temps-Agences - Après trois semaines d'offensive, Gaza revenait hier à la vie, au milieu des ruines. Entre verre brisé et montagnes de gravats, la population palestinienne mesure l'ampleur des dégâts, habitants et voitures se bousculant à nouveau dans les rues de la principale ville du territoire dévasté, dont d'importants secteurs étaient littéralement réduits à néant, pulvérisés, rasés, comme nombre d'orangeraies et de champs d'oliviers. Du Parlement, de l'Université, d'autres cibles de l'aviation israélienne, il ne reste que décombres et câbles électriques arrachés. Les secouristes s'aventuraient dans les zones jusque-là inaccessibles pour extraire des centaines de cadavres des décombres. Les enterrements se succédaient. Selon les premières constatations des responsables municipaux, quelque 20.000 bâtiments, publics ou privés, ont été gravement endommagés, 4.000 totalement détruits. Et quelque 50 des 220 écoles, entrepôts et dispensaires de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) ont été touchés par des tirs. Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, était attendu aujourd'hui dans la Bande de Gaza mais ne devait pas rencontrer de responsables du gouvernement du Hamas, non reconnu par l'ONU. Les premières estimations évaluaient les destructions à un total d'au moins 1,4 milliards de dollars. Hier, l'Arabie saoudite s'est engagée à débloquer 1 milliard de dollars pour la reconstruction, mais l'Union européenne, principal donateur pour les Palestiniens, conditionne son aide à la mise en place d'un gouvernement reconnu à Gaza, le Hamas étant considéré comme une organisation terroriste. De nouvelles discussions sur le volet humanitaire sont prévues par l'UE dans la semaine avec les partenaires israéliens, de l'Autorité palestinienne, mais aussi arabes et turcs. L'Etat hébreu a décrété samedi soir une trêve unilatérale, suivi 12 heures plus tard par le Hamas, qui contrôle la Bande de Gaza depuis juin 2007. Depuis l'annonce du Mouvement de la résistance islamique, les armes se sont tues, et des milliers de soldats israéliens ont commencé à quitter le petit territoire côtier. Mais nombre d'entre eux restent massés à la lisière, prêts à y pénétrer de nouveau si les attaques reprennent. Dimanche soir, le Premier ministre Ehoud Olmert, recevant à dîner six dirigeants européens, a assuré que l'Etat hébreu n'avait pas l'intention de réoccuper Gaza, qu'Israël avait quitté unilatéralement en 2005. Un retrait rapide permettrait de réduire le risque d'accrochages, qui compromettraient le fragile cessez-le-feu. En outre, en se retirant avant l'investiture de Barack Obama, Israël lui évite de se retrouver avec les combats à Gaza sur les bras dès son premier jour de fonction. Le président-élu des Etats-Unis a assuré que la paix au Proche-Orient constituerait une priorité pour la nouvelle administration américaine. Israël se prépare aussi à ses propres élections, le 10 février. D'après les sondages, les responsables au pouvoir, Ehoud Barak le ministre de la Défense et Tzipi Livni la cheffe de la diplomatie, sortent renforcés de l'offensive. L'opération lancée le 27 décembre dans le but affiché de faire cesser les tirs de roquettes sur le sud d'Israël a récolté un large soutien dans l'opinion publique israélienne, malgré les condamnations internationales suscitées par les lourdes pertes civiles côté palestinien. Au moins 1.259 Palestiniens ont été tués, dont plus de la moitié de civils, selon les chiffres des responsables sanitaires à Gaza, des Nations unies et des organisations de défense des droits de l'Homme. Treize Israéliens ont été tués, parmi lesquels quatre victimes des roquettes palestiniennes, et neuf soldats, dont quatre tués par les tirs de leurs propres forces. Le Hamas a déclaré hier avoir perdu 48 combattants et 165 policiers. Le calme reste précaire à Gaza, d'autant plus qu'aucun camp n'a atteint ses objectifs à long terme. L'Etat hébreu a certes remporté une victoire militaire sur le terrain, mais ne peut se prévaloir d'avoir mis définitivement fin aux tirs de roquettes, ni d'avoir réglé le problème de la contrebande d'armes via l'Egypte. Le Hamas affirme avoir gardé intactes sa capacité à fabriquer des armes, et à s'en procurer. Avant Israël, les dirigeants français, britannique, allemand, italien, espagnol et tchèque avaient participé dimanche à un sommet à Charm el-Cheikh, à l'invitation du président égyptien Hosni Moubarak, pour soutenir les efforts en vue d'une cessez-le-feu durable. La rencontre n'a pu déboucher sur un plan précis pour endiguer le trafic d'armes, par la mer et les tunnels construits sous les 12km de la frontière égyptienne. "Nous restons prêts à la réconciliation nationale via la médiation égyptienne", a expliqué quant à lui le conseiller palestinien Nabil Abou Rdeineh. Selon lui, les efforts du président de l'Autorité palestinienne se concentrent sur la consolidation du cessez-le-feu, puis Mahmoud Abbas entend former un "gouvernement de consensus" et préparer de nouvelles élections palestiniennes, a-t-il déclaré. La Turquie a proposé ses bons offices pour réconcilier les Palestiniens.