* La crise à l'UGET : Moncef Chebbi, membre de la Chambre des conseillers et ancien de l'organisation estudiantine La commission administrative de l'Union Générale des Etudiants Tunisiens (UGET) vient de fixer la tenue du 25ème congrès de l'organisation estudiantine les 10, 11 et 12 avril 2009, soit à la faculté des sciences de Bizerte, soit à la faculté de droit de Tunis. Cette imprécision du lieu révèle les difficultés matérielles et organisationnelles que rencontre la direction de l'UGET pour la tenue de ce congrès. Un congrès qui a été à maintes reprises reporté depuis la tenue du 24ème congrès en juillet 2003, plongeant ainsi l'organisation estudiantine dans une crise qui perdure. L'année dernière, le congrès a été reporté à deux reprises en avril et en août suite selon le secrétaire général de l'organisation « à l'intervention du ministère de tutelle qui a promis d'aider à la tenue matérielle du congrès. Des promesses qui n'ont pas été tenues. Nous allons donc tenir notre congrès en comptant sur nos propres moyens et sur l'aide matérielle et morale des anciens de l'organisation estudiantine ». Justement pour, savoir plus, nous avons invité Moncef Chebbi, un des anciens et membre de la commission qui a été constituée ces derniers mois pour aider l'UGET à sortir de la crise et à tenir son 25ème congrès. Il nous parle ici de la situation actuelle de l'organisation, des solutions éventuelles à la crise, du congrès et d'autres questions. Interview.
• Le Temps : Quel est le rôle de cette commission ? -Moncef Chebbi : Je ne sais pas si on peut parler de commission ou de comité. C'est en tout cas, un regroupement de militants et d'amis d'obédiences diverses tous soucieux de contribuer à trouver une solution à la situation où se débat l'organisation estudiantine. Nos rencontres informelles n'ont qu'un seul but. Celui d'essayer de calmer les effervescences et créer un climat favorable à la naissance d'un dialogue entre l'UGET et les autorités de tutelle pour fixer un agenda aboutissant à la tenue d'un congrès pluriel, représentatif et à une direction homogène et ouverte sur la base estudiantine et sur la hiérarchie administrative.
• Mais la commission administrative de l'UGET a déjà fixé la date du congrès ! -Avec certains amis, anciens militants de l'UGET nous avons fait de notre mieux pour éviter toute situation d'affrontement qui ne servirait qu'a approfondir les discordes et exacerber les tensions. Nous voulions désamorcer la crise latente. Mais pour des raisons multiples et des responsabilités très partagées nos efforts ne semblent pas promis à un aboutissement positif. J'ai été surpris d'apprendre que la commission administrative de l'UGET, réunie il y a trois semaines, a décidé de tenir le 25ème congrès de cette organisation au début du mois d'avril 2009. Je me demande si toutes les conditions sont réunies pour la réussite de ce congrès.
• Matériellement, est-ce qu'elles sont réunies d'après-vous ? -Matériellement, l'UGET n'a jamais été aussi pauvre et aussi démunie de moyens. • Quelles sont les causes ? -La subvention qui leur a été servie l'année dernière a servi à payer les dettes, et à ma connaissance, aujourd'hui, les caisses sont vides.
• Revenons à la crise que traverse l'organisation estudiantine. Quels en sont les dessous ? -Il y a sans doute des querelles partisanes qui alimentent cette crise et empêchent l'aboutissement à une solution. Pendant longtemps les organisations politiques légales ou non, tolérées ou non ; devant l'exiguïté des marges qui leur sont laissées par le RCD et par les différents intervenants administratifs ; elles ont trouvé refuge au sein du tissu associatif tels que l'UGTT, la LTDH et l'UGET n'a pas échappé à la règle. Depuis, ces crises à répétition naissent de l'évolution du rapport des forces entre les différentes organisations et les différents groupes agissant au sein de l'université qui ont donné souvent l'impression de chercher beaucoup plus à utiliser l'UGET comme une armure, que de la protéger contre les coups qui pleuvaient sur elle. Si cette logique devait se perpétuer, il y aurait deux grands responsables de cette situation désastreuse : les acteurs eux mêmes et la partie d'en face qui n'a pas compris à temps l'opportunité qui s'est offerte pour une solution médiane et intégrante capable de remettre l'UGET au service des étudiants et au service du pays.
• Mais quelles sont, aujourd'hui, les solutions possibles ? -Je ne vois pas d'autres solutions en dehors du dialogue. Un dialogue responsable, incluant tous les chapitres de la crise estudiantine. Un dialogue sans exclusive. Je veux dire que les composantes actuelles de l' UGET doivent accepter de s'ouvrir à toutes les forces capables de contribuer à la construction du nouvel édifice de l'organisation estudiantine y compris le RCD sans lequel aucune solution n'est viable à terme. A l'opposé, il est clair que le RCD, lui même doit accepter la présence dans ce dialogue et dans les structures qui pourraient en naître toutes les forces qui ont manifesté leur présence active et constructive au sein de l'université. Toute négation de l'autre peut saboter la marche vers une solution surtout si cet autre possède une influence aussi minime soit-elle auprès de la masse estudiantine.
• Concrètement, qu'elles sont les démarches à entreprendre pour aboutir au dénouement de la crise ? -Je pense qu'il faut songer sérieusement à organiser une table ronde qui regroupera les différentes parties et en présence de personnalités pouvant constituer une caution morale à ce dialogue. Mais cela ne doit pas se faire au dépens des structures existantes dont personne jusqu'ici n'a contesté la légalité. Nous ne pouvons rien construire de solide si au départ nous exigeons la destitution de ces jeunes qui, à force de lutte et de souffrance essayent de ramener l'embarction à bon port même si elle est moins garnie qu'on l'aurait espéré. Remettre en cause leur bonne foi, leur patriotisme, c'est fermer les yeux sur une partie de la solution.
• Mais concrètement. -La table ronde doit mettre au point les grandes lignes d'une nouvelle plate forme définissant la place de l'université dans la société tunisienne, la place et le rôle que les étudiants doivent occuper, les attentes de la société par rapport au monde universitaire qui lui coûte si cher et les moyens de concrétiser les apports multiples de l'UGET dans un monde qui a beaucoup évolué. Sur cette base, je conçois que cette table ronde pourrait donner naissance à une commission qui viendrait épauler la direction de l'UGET pour la préparation d'un congrès démocratique et unitaire et en même temps contrôler le bon déroulement de la marche de ce congrès mais sans se permettre pour autant de s'ingérer dans le pouvoir décisionnel du secrétaire général et du bureau exécutif. Mais s'il n'y a pas de bonnes dispositions de part et d'autre en vue d'un aboutissement rapide l'hémorragie n'en coûtera pas seulement à l' UGET et ceux qui veulent construire une nouvelle UGET sur les décombres de l'actuelle UGET ils n'ont jamais connu l'expérience ruineuse des guerres factricides.