Le Temps-Agences - La justice suisse a jugé le fils de l'ancien président nigérian Sani Abacha coupable de "participation à une organisation criminelle" et a ordonné la confiscation de valeurs patrimoniales appartenant à son organisation pour un montant de 350 millions USD, a-t-on appris hier de source judiciaire. "La première ordonnance de condamnation rendue hier (jeudi, Ndlr) par le juge d'instruction a reconnu Abba Abacha, né le 9 novembre 1968, fils de feu le général Sani Abacha, coupable de participation à une organisation criminelle", ont indiqué les autorités judiciaires du canton de Genève dans un communiqué. "Le juge d'instruction l'a condamné à une peine privative de liberté avec sursis et a ordonné la confiscation de valeurs patrimoniales appartenant à son organisation criminelle, saisies par l'entraide pénale internationale au Luxembourg et aux Bahamas, pour un montant de 350 millions de dollars" (236 millions d'euros), poursuit le communiqué. Il n'a pas été possible hier de joindre un responsable pour préciser la durée de la peine de prison avec sursis. Le Nigeria avait envoyé en 1999 aux autorités judiciaires suisses une commission rogatoire internationale visant à récupérer les 2,2 milliards de dollars que Sani Abacha, décédé en juin 1998, est accusé d'avoir détourné alors qu'il était au pouvoir entre novembre 1993 et juin 1998. En Suisse, quelque 700 millions de dollars au total ont été bloqués depuis 1999 avant d'être restitués par tranches au Nigeria, selon un accord conclu entre les deux pays. La restitution de ces capitaux n'avait pas été sans créer de polémique. Aux termes d'un accord conclu en 2005 entre la Suisse, le Nigéria et la Banque mondiale (BM), les fonds restitués devaient servir à des projets de développement dans les domaines de la santé, de l'éducation et des infrastructures. Or, fin 2006, l'organisation humanitaire suisse La Déclaration de Berne avait dénoncé des irrégularités dans l'utilisation de cet argent, assurant que 200 millions de dollars avaient été détournés. Une accusation que la Banque mondiale et le Nigéria avaient démentie peu après. De son côté, Abuja avait menacé d'entreprendre des actions judiciaires contre la Suisse, se plaignant de la lenteur de la procédure de restitution des fonds. Dans cette affaire, la Suisse a également condamné jeudi un "intermédiaire financier" en Suisse, dont l'identité n'a pas été dévoilée mais qui est actuellement domicilié dans la Principauté de Monaco, pour avoir soutenu l'organisation criminelle mise en place par le clan Abacha. Le juge d'instruction genevois saisi de l'affaire l'a condamné à une "peine pécuniaire avec sursis, ainsi qu'au paiement à l'Etat de Genève d'une créance compensatrice de 10 millions de francs suisses (6,6 millions d'euros) correspondant aux gains illicites réalisés par son activité coupable". Les condamnations établies jeudi à l'encontre du fils de l'ancien dictateur Sani Abacha et de son intermédiaire financier en Suisse ne sont toutefois pas "définitives avant l'échéance du délai d'opposition", ont souligné les autorités judiciaires genevoises.