C'est tout de même paradoxal : l'Etat devient un contre-pouvoir. C'est lui qui remettra les choses à leur place, et qui saura trouver les remèdes à la dérégulation de l'économie. Le retour de l'Etat consacre, ainsi, le retour des politiques, et réduit sensiblement le pouvoir - effrayant ces dernières années - des économistes. Les « Journées de l'Entreprise » s'étant déroulées, ce dernier week-end, à Sousse, ont recentré le débat sur la problématique adéquation Etat/Entreprise. Mais, au fond, même si on ne l'avoue pas ouvertement, chez nous, comme ailleurs, les décideurs et les entreprises ont l'air de lancer un appel au secours. S'il est vrai que « la guerre est une chose trop sérieuse pour être confiée aux militaires », l'économie est trop complexe pour se résigner au « diktat » de ses propres architectes. Longtemps, les instigateurs du courant ultra-libéraliste, ont prôné la sédition contre le pouvoir dirigiste de l'Etat. Ils y sont parvenus avec la libéralisation des marchés financiers, la mondialisation et l'économie de marché. Près de deux décennies après, voilà que des bulles éclatent. Et du coup, c'est l'Etat, jusque là cloué au pilori, qui renfloue les caisses des banques, qui injecte des liquidités (il a eu raison de bien les cacher) et élève une solide armature contre les chocs exogènes et la folie furieuse des spéculateurs. Il y a quelques années, des adultes de notre époque lançaient ce slogan : « Reviens Keynes, ils sont devenus fous ! ».Car, déjà, on sentait venir les dégâts et, de fait, on invoquait le retour de l'Etat. De quoi sera-t-elle faite la seconde vie de Keynes, et de ses recettes dirigistes ? Le pire des dangers serait que cette seconde vie favorise le retour des idéologies ou qu'elle diabolise et remette en question le libéralisme économique. En l'occurrence, l'économie mondiale sortirait d'une bulle pour s'enfermer dans un dogme.