Le 27ème Salon de la Création Artisanale, organisé par l'Office national de l'artisanat (ONA) avec la collaboration du ministère du Commerce et de l'Artisanat et la Fédération nationale de l'artisanat (FNA), se poursuivra jusqu'au 21 du mois courant. Un grand rendez-vous avec les artisans et leurs nouvelles créations qui coïncide chaque année avec la journée nationale de l'artisanat et de l'habit traditionnel. Outre l'exposition vente qui présente près de 650 exposants répartis sur près de 8000 m2, d'autres activités sont prévues en marge de ce 27ème Salon, notamment la tenue de deux séminaires ayant pour thèmes : «le design et l'innovation dans le domaine de l'artisanat » et « vers une charte de l'artisanat ». Vers une charte de l'artisanat Tel est le titre du colloque qui a ouvert ses travaux mercredi 17 mars à la salle des conférences au Palais des expositions du Kram. Y ont assisté un bon nombre de producteurs, consommateurs, professionnels et commerçants dans le domaine de l'artisanat ainsi que plusieurs personnalités intéressées à ce secteur : des artistes, des professeurs de beaux-arts, des chercheurs et des historiens. Des invités de ce 27ème Salon provenant de pays arabes (Egypte, Mauritanie, Libye, Syrie et Maroc) et d'Europe (Italie, France, Espagne) ont également été présents. L'ouverture du colloque a été assurée par M. Mohamed Bou Saïd, Directeur Général de l'ONA qui a prononcé une allocution dans laquelle il a annoncé les différents travaux de ce colloque qui porte essentiellement sur la nécessité d'élaborer une charte de l'artisanat afin de mettre un peu d'ordre dans ce secteur devenu sensible et fragile dans un monde qui évolue sans cesse et qui exige de ce secteur de tenir compte de deux paramètres : être innovant tout en respectant l'authenticité. C'est pour cette raison qu'un pacte de ce secteur s'avère essentiel pour que l'artisanat puisse toujours cohabiter avec la modernité, a-t-il conclu. M. Abdellaziz Doulatli, historien de l'art et de l'architecture musulmane, a pris ensuite la parole pour présenter le projet d'une charte de l'artisanat. Il entama son intervention par une question : « L'artisanat tunisien a-t-il vraiment besoin d'une charte ? », à laquelle il a répondu par l'affirmative en invoquant les raisons qui justifient la présence de cette charte capable d'unir tous les acteurs de ce secteur sur les mêmes principes et les mêmes objectifs afin d'assurer un équilibre entre plusieurs facteurs entrant dans ce domaine, à savoir, l'authenticité du produit et sa modernité, la qualité et les besoins du marché, ainsi que les exigences locales et celles de la mondialisation. « Les professionnels de ce secteur, a-t-il ajouté, ont aujourd'hui besoin plus que dans le passé d'une charte qui soit une référence à tous, susceptible de les orienter dans le même chemin et les guider par les mêmes principes afin de sauvegarder l'artisanat qui a connu depuis le siècle dernier une étape de confusion et de pagaille ! » M. Doulatli a indiqué que des cris d'alarme ont été lancés par des artistes, des historiens et des créateurs dans le domaine de l'artisanat pour sauver le secteur de la déroute, en trouvant les moyens adéquats pour le remettre sur les rails, c'est-à-dire au diapason des besoins actuels ; certes, il s'agit là de résoudre une équation difficile qu'est le compromis entre l'authenticité et la modernité. Maintien de l'aspect traditionnel et patrimonial Evoquant la question de la production artisanale, M. Doulatli a insisté sur la nécessité de maintenir l'aspect traditionnel et patrimonial du produit artisanal du point de vue de la qualité tout en s'ouvrant sur la modernité. Le problème est d'être en mesure de concilier, dans le fond et la forme, entre le passé et le présent et d'accomplir une certaine complémentarité entre l'ancien et le moderne. « Tout produit artisanal est ancien de par sa forme et son origine mais aussi moderne du moment qu'il s'agit d'un produit actuel ; c'est cette dualité qui caractérise le produit artisanal et dont il faut tenir compte, » a-t-il fait remarquer. Dans la production artisanale, il n'y a donc pas de rupture entre le passé et le présent, encore moins le futur. C'est que l'innovation dans l'art a toujours existé à travers l'histoire des arts islamiques qui ont pu sortir des sentiers battus dans les productions artistiques malgré les contraintes et les rites ancestraux très rigoureux, si bien qu'on peut distinguer aujourd'hui entre les différents modèles artisanaux : celui des Omeyyades ou des Ottomans en passant par ceux des Fatimides, des Andalous et des Hafsides. M. Doulatli a enfin exprimé son désir de voir naître, à l'issue de ce colloque, le projet d'une charte de l'artisanat après avoir étudié toutes les questions y afférentes. Pour ce faire, cinq groupes de travail ont été constitués pour étudier la question sous tous les angles. Le premier groupe s'est chargé du dossier « terminologie et concepts », le deuxième s'est occupé de la question « entre la législation et l'usage » ; le troisième s'est penché sur l'étude du sujet : « la formation : moyens et méthodes », le quatrième a traité la question de « la culture générale et le bon goût » ; enfin le cinquième groupe s'est consacré au sujet : « investissement et production ». Chaque groupe devrait soumettre ses recommandations qui devraient être prises en considération lors de la rédaction de la nouvelle charte de l'artisanat.