Ibn Rachiq. Mercredi 28 avril 2008. Il y avait une petite foire artisanale dans le hall. Hamadi Mezzi dans son rôle de directeur sérieux et affable accueillait les arrivants avec respect et sollicitude. A l'intérieur de la salle, Noureddine Bettaïeb, organisateur de cette mélancolique manifestation se démenait avec discrétion pour que les choses aillent au mieux. Et sur la scène à gauche, il y avait Fayçal qui jouait du saxo. C'était la troisième fois de ma vie que j'avais l'immense plaisir de l'entendre. Les deux premières, il était là en chair et en os et il jouait pour un petit groupe d'amis dont je faisais partie. Cette fois-ci, il y avait juste son image, presque grandeur nature. Des ombres minuscules apparaissaient de temps à autre dans la pénombre de la scène où l'on avait installé les instruments pour l'orchestre. Jamil Joudi parla de son amitié avec Fayçal avec beaucoup d'émotion et un zeste d'humour qui cachait mal sa douleur. Puis Noureddine présenta l'orchestre qui allait se produire et qui était composé exclusivement des élèves du saxophoniste. Je pensais à son fils, encore enfant, à ses deux filles. Le saxo continuait à pleurer. J'eus un début d'afflux lacrymal de mon côté. Mais j'avais pris soin de mettre des lunettes noires. Et soudain, j'ai réalisé que la mort n'était pas une affaire à régler au plus vite mais à dérégler. C'est là la tache des véritables artistes et Fayçal a pu transgresser l'oubli qui sera causé par son départ en nous laissant une superbe musique. Alors je suis sorti dans la rue et j'ai rejoint la nuit. Encore un ami qui est parti.