Légende ou croyance, le spiritisme, supposé permettre d'entrer en contact avec les morts et de communiquer avec eux, a toujours répandu l'idée que c'est un procédé seulement possible le soir, donc dans le noir. Celui de Yann Toma, artiste et universitaire français, a curieusement recours à une lumière aveuglante. Son œuvre, des photographies d'individus seuls ou de duos, focalise sur la concentration qui précède le moment d'entrer en communication abstraite avec l'autre. Par le jeu de la lumière, dont on ne peut deviner l'origine mais qui semble être la clé du contact, c'est tantôt une boule, tantôt des ondes ondulatoires que le (ou la) spiritiste fait mouvoir comme dans une tentative d'aller vers l'outre-tombe. Il y a, pour ainsi dire, deux sortes de médiums. Pris individuellement, le médium est considéré dans son point de départ vers l'autre (l'inconnu ?) dans un rituel où ce sont les mains qui semblent faire le voyage à bord de la lumière. Dans un voyage à deux, les médiums, face à face et perdus l'un dans les yeux de l'autre, sont immobiles et paraissent communiquer avec l'inconnu grâce à cette double concentration mutuelle où chacun s'envole vers l'ailleurs en s'appuyant sur – ou plutôt dans – les yeux de son vis-à-vis. Mais ce n'est là qu'une lecture, entre mille possibles, du monde de Yann Toma, un monde fermé sur l'homme, qui exclut son environnement immédiat pour en faire, à lui seul, une source d'énergie autonome. En fait, l'œuvre de Yann Toma repose sur la lumière et l'énergie. On le présente comme l'artiste qui a réactivé le lieu et les archives d'une ancienne compagnie d'électricité dite ‘‘Ouest Lumière'' et dont il a fait son territoire de recherche depuis le début des années 1990. Sur l'une de ses photographies, bien singulière, on est face à un cimetière dont les occupants (les morts) ont abandonné pour un temps leurs tombes pour se livrer comme à une randonnée sur leur territoire avec pour moyen de communication des ondes de lumière qu'ils s'envoient à tour de rôle. L'homme a-t-il créé la lumière ou en est-il le fruit ? Est-il lui-même une énergie électrique ? On est, comme Yann Toma, tentés d'y croire. Sachant que tous les moyens de communication actuels sont possibles grâce à l'électricité, et à supposer que le spiritisme – en tant que moyen de communication – soit une réalité et non une affabulation, il faudrait se faire à l'idée que c'est l'homme qui est une source de lumière. Pour peu qu'il sache l'utiliser… (*) jusqu'au 5 juin 2010