- La mythologie des séries télévisées n'est qu'une fiction. Quatre infirmiers portent à bout des bras un vieillard malade sur chaise roulante du rez-de-chaussée jusqu'au 4ème étage. Tous les patients doivent descendre à pied pour effectuer les radios. Ce n'était pas possible de faire monter l'appareillage de radio au lit. L'ascenseur est en panne... Le corps médical semble résigné... Il ne cesse de répéter à l'image de cet assistant hospitalo-universitaire: « Il faut composer avec les moyens de bord. On ne peut pas faire autrement. Les lourdeurs administratives nuisent au fonctionnement des EPS. C'est vrai que la gestion autonome permet d'améliorer la productivité et la qualité des prestations. Mais, à l'état actuel des choses, tous les EPS vivent des difficultés financières. Le matériel reste longtemps en panne faute de moyens. Les fournisseurs refusent d'allonger la note. Ils ont peur des attentes indéterminées. Certains ont fait faillite à cause des hôpitaux qui sont de mauvais payeurs. Cet ascenseur peut rester des semaines en panne. Or, cette situation influe sur le rendement de l'hôpital. Donnez-nous les moyens, vous aurez des urgences meilleures que dans la série télévisée ». Une telle situation vécue par le CHU Habib Thameur renvoie sur l'état de la santé publique en Tunisie à la veille de l'avènement de la réforme de l'assurance-maladie. Le manque de ressources humaines ainsi que le manque d'entretien et de renouvellement du matériel apparaissent clairement comme la principale tare de ce système. Cette carence apparaît d'ailleurs dans les urgences qui exigent une célérité dans la prise en charge des patients. Le corps médical et paramédical fait pourtant de son mieux.
Accusations Beaucoup de Tunisiens regardent la série télévisée « Urgences ». Ils ne cessent de regretter de ne pouvoir bénéficier de pareilles prestations dans nos hôpitaux. Pour expliquer les anomalies, certains attribuent les défaillances courantes dans nos « urgences » à un manquement de devoir de la part du personnel médical et paramédical. Lequel personnel, bien qu'il admette qu'il y a des carences, considère que c'est l'establishment qui en assume la responsabilité car il n'est pas en mesure d'y remédier. Quant à l'administration, elle considère que ce sont plutôt les malades eux-mêmes qui sont à l'origine du disfonctionnement des établissements publics de santé. Leurs statistiques affirment que sur dix malades arrivant dans les urgences, trois cas seulement sont vraiment urgents. Les autres auraient pu attendre et ne pas encombrer les services hospitaliers. Donc, chacun a une approche et tout le monde dispose d'arguments pour justifier son affirmation. Seulement, et pour évaluer rationnellement chaque point de vue, il serait logique de procéder à une approche comparative entre nos urgences et celles de la série télévisée.
Ce qu'il faut Les cas arrivent dans des ambulances super équipées. Les premiers bilans se font déjà au cours du trajet. A l'arrivée, son affectation est déjà préétablie. Une équipe le prend en charge. Analyses, radios, échos et autres explorations se font sur le champ. On ne voit personne d'autre que le personnel traîner entre les services. Leur principal slogan, c'est qu'autant la prise en charge est rapide, les chances du malade de dépasser sont plus grandes. Un tel schéma permet de réaliser de grandes performances. Ils reçoivent aussi des contestations et des remarques désobligeantes.
L'état des lieux Le nombre d'ambulances est limité. Le nombre de chauffeurs l'est aussi. Déjà, le transport du malade, ou de l'accidenté, se fait dans des conditions précaires. Parfois, l'hôpital ne dispose même pas de brancard pour le transporter dans la salle d'examen. Un tel acheminement peut aggraver le cas. Il entraîne un encombrement systématique dans les salles d'attente. La prise en charge médicale n'est pas immédiate et systématique. Il est possible qu'on te dise qu'elle est subordonnée à la présentation du récépissé d'admission. Lequel papier peut traîner à cause d'une petite queue à la caisse. Les pannes du matériel sont nombreuses et peuvent entraîner d'autres contretemps.... Apparemment, le personnel et les malades ne représentent pas l'axe du mal. Ils peuvent certes présenter, eux aussi, des anomalies. Mais, l'essentiel ne dépend pas d'eux. L'administration publique de la santé a du pain sur la planche.