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La parure de Jebel Serj
Redécouvertes
Publié dans Le Temps le 24 - 12 - 2006

Le Jebel Serj : un mont au nom original ! Quel géant mythologique aurait eu l'idée de se mettre en selle au sommet d'un Jebel, à 1357 mètres d'altitude ? Le Jebel Serj est le troisième sommet de la Dorsale tunisienne, après le point culminant de Tunisie : le Jebel Chambi 1544 mètres, et le massif constitué des Jebel Bireno et Azered qui atteint 1385 mètres, au sud-ouest de Thala.
Il est situé presque au milieu de la Dorsale, à mi-chemin entre Grombalia et le Jebel Tamsmida qui touche à la frontière algéro-tunisienne.
C'est une lame montagneuse, mesurant 5 kilomètres environ de large sur moins de 20 kilomètres de long, qu'aucune vallée n'entaille. Il faut la contourner, au sud-ouest, par un défilé : Foum El Afrit, la bouche du démon et par un ravin au nord-est : Khanguet El Messireb.

Le sol du Jebel Serj est presque entièrement composé de calcaire crétacé datant de l'ère secondaire dont les strates relevées, parfois pliées, mais mises à nu par l'érosion, constituent les marches titanesques d'un escalier géant.
Sa couverture forestière a été, en partie, « restaurée » grâce à de gros efforts de reboisement fournis depuis les débuts du siècle dernier. Petit à petit, les pins d'Alep, dont les fruits s'appellent les « zgougous » - qui nous dira l'équivalent en français ? - progressent en altitude sur les pentes du piémont. Les zgougous sont utilisés pour fabriquer « l'assida », en Tunisie, tout le monde le sait, mais des archéologues ont trouvé dans des tombeaux berbères, antérieurs aux colonisations carthaginoise et romaine, des récipients ayant contenu une « bouillie » de zgougous grillés ! Comme dans presque tous les massifs montagneux de Tunisie, le chêne kermès s'accroche aux sols, même les plus hostiles apparemment, en compagnie, quelquefois, de l'olivier sauvage : « zabouza », souvent du caroubier et de plus en plus fréquemment du Thuya de Berbérie.
A une époque où il fallait reboiser beaucoup et très vite, de nombreuses plantations d'acacias et d'eucalyptus avaient été réalisées. Des déconvenues, imprévisibles parce que des boisements importants et homogènes de ces espèces n'avaient jamais été effectués en Tunisie, sont survenues, en particulier, bien plus au nord, dans la région des Mogods. Actuellement, les forestiers sont bien plus prudents et respectueux des biotopes locaux originels. Le Thuya de Berbérie, mal aimé en ces temps de recherche de la rentabilité maximum en un minimum de temps parce que sa croissance est lente, donne un bois très dur. Il semble qu'il ait fait l'objet d'un commerce important et très lucratif à l'époque de la colonisation romaine - Cicéron aurait payé une table des millions de sesterces ! - où on lui connaissait deux variétés : « un bois tigré » au veinage rayé et une qualité « panthère » au veinage en « boucles ». Ce commerce et la croissance très lente de l'arbre expliquent peut-être, sa raréfaction.
La découverte de quelques pieds - moins de cent, paraît-il ! - d'érables de Montpellier a été une grande surprise, il y a quelques années. Depuis, des plantations, aussi bien par bouturage que par semis de graines ont été réalisées avec succès. Ce très bel arbre qui peut atteindre 6 mètres de haut est rarissime sous nos latitudes. Quelques individus croissent aussi dans le Jebel Zaghouan. Sa variété sempervirens : toujours verte pourrait bien être découverte un jour dans les Jebels tunisiens.

Les pentes du Jebel Serj
Nous avons eu la surprise et surtout le plaisir de trouver, sur les pentes du Jebel Serj, un autre « arbre », assez rare en Tunisie : le Cade - celui des « Mémoires » de Marcel Pagnol : « La gloire de mon père » ! - ce genévrier oxycèdre a, en Tunisie, un port érigé, au lieu de ramper sur les dunes et entre les rochers des bords de la Méditerranée, ailleurs. Comme le zgougou, le fruit du cade fournit une huile recherchée : l'huile de cade. Les industriels espagnols achètent en Tunisie ces deux fruits, discrètement pour ne pas faire augmenter les prix !
Les efforts de reboisement ont engendré une restauration des sols et les arbustes des garrigues : lentisques principalement, diverses variétés de « genets » aux fleurs d'or mais aux épines agressives souvent, cistes, asperges sauvages et touffes de romarin protègent des plantes qui fournissent au bétail et à la faune sauvage de riches pâturages.
Nous pensons pouvoir découvrir, au printemps 2007, sur les pentes du Jebel Serj et de ses voisins : les Jebels Bargou, Balouta, Kesra, de nombreuses espèces d'orchidées sauvages.
La faune sauvage est très variée et abondante dans la région : à un moment, la plupart des chasseurs de Tunis se donnaient rendez-vous dans les collines voisines de la maison forestière de Sodga et sur le plateau de La Kesra tout proche. Une gestion rationnelle du gibier et une répression plus sérieuse du braconnage - voire une interdiction des battues administratives complètement injustifiées - permettraient aux sangliers, en particulier, de se multiplier et aux étrangers d'être « invités ».
Une réserve naturelle d'une centaine d'hectares a été créée sur ce mont et un projet d'agrandissement devrait la porter à 2600 hectares. Il est aussi question d'y réintroduire des espèces animales telles que le mouflon à manchette à qui le biotope conviendra parfaitement, à notre avis. Nous ne pouvons qu'applaudir à la réalisation de ce projet qui vise à la protection de l'environnement et à la restauration de la biodiversité. Nous ne pouvons que souhaiter qu'une pareille réserve naturelle soit installée sur le Jebel Bargou tout proche.
Il se formerait ainsi une chaîne de zones préservées qui s'étendrait du Parc National du Jebel Zaghouan au futur Parc du Jebel Serj. Il nous semble tout à fait intéressant de protéger les milieux montagneux. La montagne a toujours constitué une entité géographique, économique et sociale particulière. Le relief, le climat, l'histoire et le patrimoine culturel impliquent une politique spécifique de développement, d'aménagement et de protection.
Conformément aux injonctions de l' « Agenda 21 International », la Tunisie a élaboré son « Agenda 21 National » dès 1995 et le programme d'action nationale de l'Environnement et du développement durable pour le XXIème siècle, prévoit, entre autres, une politique intégrée et globale pour préserver et promouvoir les richesses naturelles et la diversité biologique ainsi que l'intégration des populations montagnardes, en particulier, dans toutes les activités. Le cadre naturel, la faune et la flore diverses et riches, que nous avons appelés la parure du Jebel Serj, permettent d'envisager le développement d'un « tourisme vert » à base de randonnées et d'un « écotourisme » plus scientifique. Un petit hôtel tout neuf est en cours d'installation, dans un cadre superbe, à Bou Saadia, au cœur du Jebel Bargou voisin. D'autres établissements hôteliers existent à Siliana. Maktar, Oueslatia et Bargou devraient faire un effort pour recevoir des visiteurs, d'autant qu'il y a d'autres centres d'intérêt à proximité et sur le Jebel Serj.

L'HISTOIRE DE LA REGION
Au nord, les vestiges de Zama regia, la dernière capitale des rois numides sont exhumés par des fouilles récentes. Juba 1er a eu le malheur de s'allier aux partisans du général romain Pompée. Jules César, son ennemi, a débarqué à Thapsus et battu l'armée des Pompéens en 46 avant J.C. Juba vaincu s'est enfuit et a voulu rentrer dans sa capitale. Ses concitoyens ont refusé de l'accueillir. Le roi Juba s'est suicidé en se jetant sur l'épée d'un de ses esclaves qu'il avait prié de se battre contre lui.
Au sud, Ouesslatia et le Jebel Oueslat rappellent les multiples rebellions des Oueslati, leur bannissement et l'interdiction de retourner dans l'Oueslat après leur dernière défaite en 1762.
Au nord-est, Ksar Lemsa, l'antique Limisa, recèle une superbe citadelle byzantine. Elle évoque les difficultés qu'ont éprouvées les Byzantins à pacifier la Berbérie depuis la reconquête sur les Vandales en 533 jusqu'à l'arrivée des armées arabes en 647.
Plus près, une belle piste carrossable qu'on emprunte à droite de la route nationale C 73 reliant Siliana à Oueslatia, un peu au nord de la route qui traverse le plateau de la Kesra, conduit à d'énormes tombeaux mégalithiques berbères appelés Kbour El Ghoul : les tombeaux de l'ogre ! Toute la contrée à l'ouest du Jebel Bargou et au nord du Serj est parsemée de sites mégalithiques. Un discret site berbéro-romain : Henchir Bez / Civita Vazi Sarra se blottit au pied sud-ouest du Jebel Bargou. Tous ces petits sites, modestes mais intéressants, devraient être mieux protégés des fouilleurs clandestins, grands amateurs de trésors - totalement inexistants - qu'ils recherchent avec des détecteurs de métaux modernes.

La route parcourue par Hannibal
Les amateurs d'histoire pourront emprunter la route parcourue par Hannibal allant à Zama, en passant par Agger une ville d'époque romaine un peu au nord-ouest d'Oueslatia. Madame Ladjimi-Sebaï, professeur d'université, archéologue et poétesse talentueuse a prouvé que cette bourgade était bien Agger romaine que El Bekri cite dans sa « Descriptions de l'Afrique septentrionale ». Il écrit que : « De Cairouan, on se rend à Djeloula puis à Addjer ... arrivé à Addjer, passe vite : il y a des lions qui déchirent, des pierres qui coupent et des vents qui emportent ... » ! On y voit encore les vestiges d'une citadelle byzantine bâtie sur un magnifique monument romain qui pourrait être un temple. Il contient l'inscription AGGERI AVG : la dédicace à Agger qualifiée d'Aug (usta) et une autre dédiée à DIAN (AE) AVG qui indique le nom de la divinité tutélaire de la ville : Diane Aug (usta). Une bonne partie du forum a aussi été dégagée. Un arc de triomphe et un mausolée dominent un vaste champ de ruines. Agger était la gardienne du passage de Foum El Afrit qu'emprunta certainement Hannibal allant à Zama en 202 avant J.C., en passant par Manange et Uzapa / El Ksour.
Les six arches bien conservées d'un magnifique pont romain subsistent au pied du versant nord de la colline, sur l'Oued Jilf.
Une légende, recueillie par Madame Naïdé Ferchiou, professeur d'université et archéologue, raconte qu'un membre du conseil municipal d'Agger a été emporté par cet oued, un soir d'orage. Son fils, surnommé Aquila, se jura de bâtir un pont sur le gué périlleux et fit d'excellentes études. Adulte, Aquila (l'aigle) devint architecte et réussit à construire un superbe pont.
Mais un ami d'enfance Baric (le Taureau), est devenu chef d'une bande de bandits qui terrorisait les voyageurs parcourant cette route. Le pont était donc inutile parce que plus personne ne voulait l'emprunter.
Aquila, désespéré de constater que l'œuvre de sa vie ne servait plus à rien, rendit visite aux brigands, leur proposa un travail honnête dans ses entreprises et, en même temps, observa soigneusement les environs du camp des bandits. Ils refusèrent. Aquila réunit des soldats et captura les brigands. Mais, plus tard, devenu infirme, plutôt que d'être grabataire, il préféra mourir après avoir fait graver : « ET VIX, SATIS ET AEDIFICIVI FELICITER » : J'ai bien vécu et édifié avec bonheur !
Kef El Garia : cette crête rocheuse recèle plusieurs sites préhistoriques, sans doute, parce qu'elle a permis aux hommes préhistoriques de s'installer en des lieux faciles à défendre, à proximité de nombreux points d'eau, de forêts et de plaines giboyeuses. Leur situation en altitude permet d'observer, d'une part, les piémonts du plateau de la Kesra, à l'ouest et, d'autre part, au sud-est, la vallée de l'oued El Kerd qui devient l'oued Merguellil dans la plaine de Kairouan.
Le site de Doukanet El Khoutifa qui a été étudié soigneusement par M. Jamel Zoughlami, professeur d'Université, historien et archéologue, est le plus important cette zone. Il occupe une plate-forme de près de 2000 m_ située sur le point culminant (796 mètres) de l'arête de Kef El Garia.
Il s'agit d'une « Rammadiya » - de l'arabe, « R'mad » : la cendre - constituée d'une accumulation de déchets culinaires, de très nombreuses coquilles d'escargots, d'une grande quantité d'ossements d'animaux et de pierres brûlées mêlées à des outils de pierre et d'os ainsi qu'à des débris de poterie, le tout contenu dans une couche de 1,60 mètre d'épaisseur, de terre cendreuse assez claire.
Dans une zone abritée, sous un gros rocher, une sépulture collective a été découverte. Elle contenait les ossements d'une dizaine d'individus de sexes et d'âges différents. Certains corps étaient encore couchés sur le flanc en position fléchie. Ils appartiennent au type humain caractéristique du néolithique maghrébin : le Protoméditerranéen. Cette couche est datée d'environ 6600 ans avant J.C.
Elle repose, sans discontinuité, sur un autre dépôt archéologique, épais de 40 centimètres environ. Il est constitué de terre granuleuse mêlée à des restes culinaires, des pierres brûlées et des outils de pierre. Il a été daté d'environ 6750 ans avant J.C. Des hommes auraient donc vécu là durant 150 ans !
L'industrie lithique de cette dernière couche s'apparente à celle de la civilisation ibéro-maurusienne qui est pourtant bien antérieure au néolithique puisqu'elle semble s'étendre de -15.000 à -7.500 ans environ.
Il semble que ce gisement, ainsi que ceux qui se trouvent au pied de la falaise, au bord de la route, appartiennent à l'extrême fin du paléolithique, au tout début du néolithique « méditerranéen ».
Le village perché, berbère, de La Kesra est bâti, en partie, sur le bord sud et, principalement, sur le versant, presque vertical, du vaste plateau boisé et très giboyeux de La Kesra, sur l'emplacement de l'antique Chusira.
Il domine les piémonts vallonnés et boisés du plateau et il a dû surveiller, de tous temps, la voie qui reliait Maktar à Kairouan comme l'attestent les vestiges d'une citadelle byzantine réaménagée et habitée actuellement. Des dolmens érigés sur le plateau, juste derrière le village, prouvent que les hommes occupaient ce site durant la protohistoire.
Des sources jaillissent des soubassements du plateau, à proximité des maisons en pierres, noyées dans le paysage et adossées à la falaise.
Les montants de certaines portes d'entrée sont des monolithes énormes, à peine équarris, dressés en oblique. Ils supportent un très gros linteau. Reflètent-ils une survivance de mégalithisme local ? Ils font penser à l'entrée de bâtiments d'époque mycénienne de la Grèce antique.
Le village se modernise. Les femmes tissent encore des kachabias, des burnous et des couvertures traditionnelles d'excellente qualité. Elles fabriquent aussi de belles poteries et d'autres produits artisanaux que les amateurs d'authenticité et les touristes cultivés apprécient.
Le village d'El Ksour est situé à une vingtaine de kilomètres au nord-est de Maktar à proximité de l'Oued Ousafa dont le nom conserve le souvenir d'une cité antique berbère puis romaine : Uzapa, appelée actuellement Ksour Abdel Melek ou Ksour Sidi Abdallah.
Cette cité devait être une ville-étape, bâtie sur la grande voie antique qui reliait Thevetse / Tebessa à Carthage en passant par Ammaedara / Haïdra, Mactaris / Maktar et Thuburbo majus.
Des vestiges importantes mais peu étudiés subsistent dont deux arcs de triomphe. L'un est à une baie, l'autre est dédié aux génies protégeant la cité.
Sur une vaste plateau, découpé par d'innombrables ravins et couvert de forêts de pins d'Alep, à proximité immédiate d'El Ksour ou dans un rayon d'une quinzaine de kilomètres, se dressent de très nombreux monuments mégalithiques du même type que ceux de Maktar, de Kbour El Ghoul et d'Ellès, pour ne citer que les sites les plus connus.
Ce sont des sépultures collectives qui ont été utilisées, semble-t-il, depuis le IIIème siècle avant J.C. jusqu'au Ier siècle après J.C. Elles semblent avoir été construites entre le IVème et le IIème siècle avant J.C.
Tous ces vestiges - sans compter ceux dont nous n'avons pas parlé - de civilisations différentes : préhistorique, berbère, romaine, byzantine, arabe, des traditions folkloriques régionales très vivaces et le souvenir des luttes pour l'Indépendance dont l'énorme combat du Jebel Bargou déclenché le 13 novembre 1954 peuvent parfaitement soutenir un tourisme culturel intéressant. Et il y a encore d'autres « merveilles » à découvrir dans le Jebel Serj.

LE CŒUR DU JEBEL SERJ
Si vous souhaitez vous y rendre, prenez comme guide M. Mohamed Tiouiri, responsable du club spéléo et gérant de « La Maison de la mémoire » de Zaghouan, installée dans une ancienne huilerie, à l'entrée de la médina en face de la Porte romaine.
Comme tous les massifs calcaires, le Jebel Serj est creusé de grottes et de galeries que l'eau infiltrée a foré dans la montagne. Il existe de très nombreux « trous » qui n'ont pas encore été explorés. Les cavités les plus connues sont la grotte d'Aïn Dhab : la source d'or et la grotte de la mine.
La première grotte est certainement connue depuis l'aube de l'humanité : un rocher de l'entrée a été lissé en un « polissoir » qui servait à aiguiser les outils tranchants. A quelle époque ? Un petit ruisseau d'eau fraîche parcourt la galerie sur près de trois kilomètres. L'or dans un massif calcaire qui absorbe très vite l'eau de pluie n'est-ce pas une source pérenne ?
La grotte de la mine s'appelle ainsi parce qu'elle a certainement été découverte par les ouvriers qui ont creusé la galerie et qui ont débouché dans la grotte. Elle comprend une grande salle de 80 mètres de large sur 170 mètres de long pour un volume estimé à 600.000 m3. Stalactites, stalagmites, colonnes, draperies et de très beaux « excentriques » décorent cette salle. Un puit de 150 mètres de profondeur permet d'atteindre une « petite salle » qui contient de superbes concrétions en forme de « choux-fleurs ».
Une énorme cavité, sans doute la plus grande connue en Afrique, a été appelée la « Salle Habib Bourguiba » en souvenir du premier Président de la République Tunisienne. L'abondance de concrétions s'explique par d'importantes arrivées d'eau au plafond. Il existe encore d'autres salles et d'autres galeries qui ont permis à une équipe tuniso-belge d'atteindre le record de profondeur de Tunisie évalué à -305 mètres. Des puits et des « cheminées » restent à explorer et on peut espérer atteindre un record de profondeur de -600 mètres !
La spéléologie, au moins, et le géotourisme pourraient donc être pratiqués aussi bien dans le Jebel Serj que dans le Parc National du Jebel Zaghouan, pour commencer, parce que nous connaissons aussi une cavité dans le Jebel Oueslat qui n'a jamais été explorée.
Avec de tels atouts, cette région devrait éveiller l'intérêt des investisseurs et des sociétés touristiques. Il serait souhaitable cependant que la population locale soit, dès le début, associée à la mise en valeur de la contré de façon à ce qu'elle participe activement à la protection de son environnement et de son patrimoine qui sont ses véritables richesses et les fondements de son identité que veulent connaître les visiteurs curieux.


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