Le Temps-Agences - Nicolas Sarkozy a pris hier ses fonctions de président français, succédant à Jacques Chirac pour un mandat de cinq ans à la tête d'un pays qu'il a promis de changer en profondeur. Quelques heures seulement après avoir pris ses fonctions, il était déjà attendu hier à Berlin pour rencontrer la chancelière Angela Merkel, manifestant ainsi sa volonté de l'aider à sortir l'Union européenne (UE) de son ornière institutionnelle. Avec cette passation de pouvoirs, c'est une page de l'histoire politique du pays qui se tourne, après douze ans de présidence de M. Chirac. "A compter de ce jour vous incarnez, la France, vous symbolisez la République et vous représentez l'ensemble des Français", a déclaré à M. Sarkozy le président du Conseil constitutionnel Jean-Louis Debré lors d'une cérémonie au palais de l'Elysée. M. Sarkozy, 52 ans, est devenu le 23ème président français et le 6ème depuis les débuts de la Vème République en 1958. Vingt-et-un coup de canons ont salué le nouveau chef de l'Etat. Dans sa première allocution de président, M. Sarkozy a affirmé avoir "l'exigence de rassembler les Français" et de "respecter la parole donnée". Il a aussi souligné "l'exigence de résultats" réclamée selon lui par les Français. "Je défendrai l'indépendance de la France, je défendrai l'identité de la France", a-t-il encore assuré. M. Sarkozy a été élu le 6 mai par 53,06% des voix face à la socialiste Ségolène Royal. Selon un rituel protocolaire minutieux, il était arrivé à 11H00 HT dans la cour d'honneur de l'Elysée où avait été déroulé le tapis rouge. Il avait été accueilli sur le perron par M. Chirac. Souriants, les deux hommes se sont serré la main devant les caméras puis ont eu un entretien de 35 minutes dans le bureau présidentiel au cours duquel M. Chirac a transmis à son successeur le code de l'arme nucléaire. M. Chirac a ensuite été raccompagné sur le perron par M. Sarkozy. De nouveau, les deux hommes se sont longuement serré la main, échangeant quelques phrases. M. Sarkozy a applaudi son prédécesseur quand celui-ci, visiblement ému, est monté dans sa voiture, puis a franchi les grilles de l'Elysée, sous les applaudissements du personnel du palais et d'une petite foule attendant à l'extérieur. L'épouse de M. Sarkozy, Cécilia, a assisté à la cérémonie, accompagnée du fils du couple, Louis, ainsi que de ses deux filles issues d'un premier mariage et des deux fils du nouveau président, également nés d'une précédente union. Le nouveau chef de l'Etat devait ensuite remonter l'avenue des Champs Elysées jusqu'à l'Arc de Triomphe. Selon une nouveauté introduite par M. Sarkozy, celui-ci devait ensuite se rendre au bois de Boulogne, à la périphérie de Paris, pour un hommage à 35 jeunes résistants fusillés à la veille de l'insurrection parisienne contre l'occupation nazie, en août 1944. M. Sarkozy devait aller dans l'après-midi à Berlin pour y rencontrer la chancelière allemande Angela Merkel, qui assure la présidence de l'UE. Il devait s'entretenir avec elle du "traité simplifié" qu'il voudrait faire adopter pour réformer les institutions européennes. Le nouveau président, élu sur la promesse de changer le pays en profondeur, a affiché son intention d'engager rapidement des réformes, notamment dans le domaine économique. Il devrait désigner dès jeudi au poste de Premier ministre François Fillon, ancien ministre des Affaires sociales et de l'Education, considéré comme un modéré. L'annonce du nouveau gouvernement resserré de quinze membres -composé à égalité d'hommes et de femmes, une première- devrait suivre rapidement. M. Sarkozy, qui veut un gouvernement d'"ouverture", a tenté d'y inclure des personnalités de gauche et du centre. Dans son discours d'adieu avant-hier soir, M. Chirac, 74 ans, a appelé les Français à rester "unis et solidaires", affirmant laisser les rênes du pays "avec la fierté du devoir accompli". Après une carrière politique d'une exceptionnelle longévité, il s'apprête à diriger une fondation consacrée à l'environnement et au "dialogue des cultures". Le départ du pouvoir de M. Chirac s'accompagne aussi d'une perspective menaçante: son immunité présidentielle sera levée dans un mois et il pourrait être le premier président français à devoir rendre des comptes à la justice dans des affaires politico-financières.