Cet après-midi, Mokhtar Tlili pourra se targuer de quatre présences en finale de coupe de Tunisie. Toutes les quatre avec seulement deux clubs. Précisement ceux qui vont se disputer le premier trophée du deuxième demi-siècle du football tunisien après l'Indépendance. Rappelons encore que Mokhtar Tlili n'a jusqu'ici, perdu aucune finale. Deux fois avec l'Espérance et une fois avec le CAB. Tout cela pour dire qu'à défaut d'un précédent ayant vu les deux finalistes de cette année se rencontrer à ce stade ultime, c'est l'entraîneur cabiste qui s'arroge en quelque sorte le droit de constituer le repère. Evidemment les données ont profondément évolué depuis les années 80. D'abord le cadre. Le stade de Radès n'a pas toujours été tendre pour le favori théorique. L'Etoile, le Club Africain et l'Espérance ayant connu chacun, une désillusion inattendue. Puis la situation du CAB en championnat, désespérée et suspendue à un miracle, va jouer un rôle d'une extrême importance dans une possible réaction violente des Cabistes comme pour une vengeance sur le sort. Il est clair que la pression ne pèsera par sur le club bizertin qui, au fond n'a rien à perdre. Son arrivée à ce stade de la compétition est déjà une preuve convaincante que sa situation en championnat ne lui rend pas justice. Quant à l'Espérance, c'est la première fois depuis très longtemps qu'elle ne termine pas dans le trio de tête et du coup elle estime que sa saison doit impérativement être sauvée. C'est donc avec un sentiment de gagneur que les "Sang et Or" vont aborder cette finale. On se souvient de la déclaration de l'entraîneur de l'Espérance à son arrivée. Au vu du rendement de l'équipe, il n'a pas caché son étonnement d'apprendre que l'équipe qu'il allait prendre en mains, venait de remporter le doublé. Le voilà donc, à la veille de faire le bilan de sa première année à l'Espérance, dans l'obligation de présenter un compte bénéficiaire en coupe, à défaut de championnat. Il est indéniable que sur le plan humain, Dégueperoux est mieux doté que Tlili. Hormis une défense qui n'a jamais été parfaite cette saison, il possède à l'entre-jeu des joueurs qui peuvent faire l'équilibre avec les meilleurs et en attaque deux ou trois individualités capables de faire la différence. Encore que là, tout pourrait être bloqué tactiquement. Car la force de Mokhtar Tlili est justement dans sa parfaite lecture du jeu de l'adversaire et son aptitude à mettre un grain de sable dans le mécanisme du vis-à-vis. Si tout à l'heure, l'entraîneur de l'Espérance, conséquent avec lui-même va choisir une méthode et s'y tenir, il risque d'avoir des surprises. On ne risque pas de nous tromper si on avance d'ores et déjà que le CAB ne fera sûrement pas le jeu, surtout en début de match. L'essentiel pour lui est de ne pas prendre de but pendant au moins une demi-heure, le temps de forcer l'Espérance à prendre elle-même des risques. Peut-être même négliger un couloir, un contre, une ouverture dans le quadrillage du "milieu" espérantiste, de loin, l'axe de sa force. A moins, comme souvent, une balle arrêtée positive, ne fasse obligation au CAB, d'aller de son côté chercher l'égalisation. C'est dans un cas pareil que Mokhtar Tlili risque de perdre. Car s'il est presque génial pour bloquer tactiquement l'adversaire, il lui est beaucoup plus difficile de le dominer et de lui marquer classiquement sur une action. Question de moyens, assurément. Mais toutes ces suppositions peuvent être démenties. Car dans une finale de coupe, c'est l'esprit des acteurs, eux-mêmes qui est le plus déterminant. Il serait presqu'absurde de parler de favori lorsqu'il s'agit de coupe. Car tout se réduit aux capacités nerveuses et rien aux normes des valeurs techniques et encore moins de prendre comme repère ce classement du championnat. Certes les muscles, la fraîcheur et la préparation techno-tactique font partie du bagage que doit avoir un futur vainqueur. Mais la ruse et même la chance ont une voie dans ce chapitre qui ne ressemble pas à une rencontre classique. De toute façon, l'esprit de la coupe ne l'admettrait pas.