Longtemps réduits au silence, les conseillers rapporteurs auprès du chef du contentieux de l'Etat veulent jouer pleinement leur rôle dans la récupération et la défense des biens de l'Etat. «Ministère des Domaines de l'Etat et des Affaires des Trabelsi », c'est ainsi qu'on appelait l'ancien ministère des Domaines de l'Etat et des Affaires foncières. Nul n'ignore en effet, la main mise qu'avait le clan Trabelsi sur les domaines et propriétés de l'Etat. Et Trabelsi n'est en fait qu'une appellation qui renvoie plutôt à l'ex-président, son épouse et leurs proches. Mais aujourd'hui, l'Etat reprend « son autorité » et par conséquent tente de récupérer ses domaines. Pour cela, une longue procédure judiciaire le permettra. Or, le corps le plus concerné par l'affaire, celui le mieux disposé à défendre la cause de l'Etat est malheureusement écarté. Il s'agit du corps des conseillers rapporteurs auprès du chef du contentieux de l'Etat, relevant de la Direction Générale du Contentieux de l'Etat alliée au dit ministère. D'ailleurs, le corps, constitué aujourd'hui de 120 conseillers, souffre depuis des années de la marginalisation. Najet Bacha, conseillère-rapporteur, nous témoigne par ailleurs les épreuves qu'ont longtemps enduré ses collègues, ainsi qu'elle-même, dans le seul but de les intimider afin qu'ils ne témoignent point des injustices commises. Aujourd'hui, ces conseillers sont les mieux placés pour défendre la cause de l'Etat dans les affaires de corruption et de vols se rapportant aux proches de Ben Ali. A cet effet, rappelons que les clans Ben Ali, Trabelsi et leurs proches se sont « servis » des biens des Etrangers, des Terres Agricoles, des Domaines maritimes, des Domaines forestiers. Et depuis la révolution, le corps des conseillers a été marginalisé, des comités tout comme des médias également. Nombreux parmi les conseillers-rapporteurs ont d'ailleurs été muté dans le passé dans les Directions régionales. En 2005, neuf conseillers ont voulu lancer une association, apolitique bien évidemment, seulement on les a menacés afin qu'ils ne fassent pas de dépôt. Najet Bacha, elle-même a subi plusieurs mutations en trois ans, elle fut aussi témoin de tant d'injustices et de plaintes soulevées de la part d'agriculteurs et de veuves auxquelles ont a confisqué injustement les biens. Le 16 janvier 2008, Najet et une dizaine de ses collègues ont été mutés dans d'autres administrations du ministère. Elle a alors travaillé pendant quelques temps à l'administration des Domaines publics et travailler c'est trop dire, puisqu'elle affirme que ses collègues et elle-même, non pas du tout été chargés de traiter un seul dossier. Elle avait par ailleurs demandé qu'on l'a fasse comparaitre devant un conseil de discipline ou qu'on ouvre une enquête qui prouverait qu'elle avait commis une faute exigeant sa mutation, rien à faire… A peine un mois qu'elle fut de nouveau mutée. On l'a en effet transférée le 17 février de la même année à l'administration des Biens d'Etrangers, où elle a dû subir le harcèlement d'un responsable de l'administration. Suite à un rapport qu'elle avait fait, elle s'est retrouvé de nouveau mutée, en mois d'avril, au bureau d'ordre des domaines publics. Très peu de temps après, elle a également été transférée, toujours sans explication ni raison, à la Direction Générale de l'Organisation, des Méthodes et de l'Informatique. C'est avec l'arrivée de Zouheir Mdhafer que les choses ont commencé à changer. Il a été surpris de la trouver, à la Direction de l'Informatique et a alors ordonné son transfert à la Direction Générale des Biens Agricoles au mois de Février 2010. On a alors dressé un rapport spécifiant que son rendement était nul. Or, cette conseillère a été, outre son travail, active sur le plan arabe. Elle a par ailleurs donné deux conférences organisées par la Ligue Arabe. Invitée, au centre des Etudes hydriques et la sécurité de l'eau dans le monde arabe. Elle a également été active au sein de l'Organisation Arabe du Développement Administratif. Le premier octobre 2010, Najet a été mutée à la Direction Générale de la Gestion et des Ventes. Jusqu'au jour d'aujourd'hui, elle n'a même pas de chaise pour s'installer et pouvoir travailler. Sa galère, reflète l'image que vivent ses collègues aussi, toujours pour qu'ils n'osent pas parler des dépassements commis. Najet Bacha juge le sort subi comme marginalisation, dilapidation des compétences et des deniers publics, puisqu'on rétribue ces conseillers sans qu'on leur permette, le plus souvent de faire leur travail, ou même de traiter des dossiers. Mutant les conseillers dans les directions régionales, on les a souvent tenu écartés et inactifs. Même la loi relative à leur tenue vestimentaire n'a pas été appliquée, les promotions sont léguées aux oubliettes pendant deux ans ou trois avant d'être accordées. Aujourd'hui, cette marginalisation ne doit point perdurer, surtout que c'est le moment où on a le plus besoin de ce corps pour poursuivre les responsables de la dilapidation du bien public et « nettoyer » le pays. Il doit également participer aux comités constitués dans le but. Rappelons d'ailleurs que les conseillers décideurs sont connaisseurs en toutes sortes de droit, mis à part le constitutionnel.