Par Mohamed ABDENNADHER - L'interventionnisme outrancier de l'Etat dans le domaine industriel dans les années 60 semble aller de soi à l'époque, mais il a démontré son inefficacité à répondre aux enjeux économiques contemporains. Les entreprises industrielles publiques surtout celles qui ont vu le jour à cette époque connaissent des difficultés de rentabilité et de manque de compétitivité. Elles opèrent encore dans un environnement protégé et non-concurrentiel. Elles se signalent par l'emploi d'une main d'œuvre pléthorique et peu productive. Parmi les indices du non compétitivité de ces entreprises on peut évoquer leur inaptitude à exporter, mis à part les grandes entreprises qui travaillent dans la filière de la chimie lourde pour laquelle la concurrence étrangère est moins rude vu le nombre assez réduit des pays disposant de minerais de phosphate mais qui se trouvent dans des situations instables la plupart du temps du fait des fluctuations incessantes des cours des matières premières d'où la fragilité chronique de ces entreprises travaillant dans ce secteur. Or, l'exportation n'est pas une fin en soi, mais le révélateur du succès de bonnes politiques de développement des entreprises qui peuvent ensuite passer à l'exportation. Les entreprises quelles soient publiques où privées qui travaillent encore dans un environnement protégé ne sont nullement poussées à la bonne gestion, à l'innovation et à la rentabilité de leur entreprise. Ainsi, la mise à flot chaque année de la plupart de ces entreprises publiques coûte cher au trésor public et aux contribuables forcés de payer les pots cassés et les vicissitudes d'une gestion désastreuse des deniers de l'Etat. Pour toutes ces raisons, il convient d'accélérer le rythme des privatisations des entreprises publiques surtout celles qui opèrent dans le secteur industriel en établissant un bilan-diagnostic, en soulignant leurs handicaps et leurs faiblesses, en proposant des solutions économiques (redéploiement et reconversion industriels, repositionnement stratégique, privatisation partielle ou totale,…) et sociales (requalification de la main d'œuvre, réembauche, départ anticipé à la retraite,…). Parmi les solutions envisageables, comme le début d'un processus, les privatisations partielles de ces entreprises. L'Etat cède une partie de ses titres tout en restant majoritaire dans l'entreprise. Une fois la situation financière de l'entreprise assainie, l'Etat peut envisager la vente intégrale de toutes ses actions dans une meilleure posture. Cependant les secteurs stratégiques comme l'eau et l'énergie doivent rester sous contrôle de l'Etat. Dans tous les cas de figure et dans un contexte de libéralisation de l'économie nationale, les entreprises publiques qui n'ont de fonction que la production de biens matériels n'ont plus de raison d'être puisque ces entreprises, sont dans la majorité des cas, peu performantes et cesseront d'exister sans l'aide massive de l'Etat. La privatisation donne aux entreprises publiques la possibilité de mieux s'adapter aux nouvelles données de l'économie, d'améliorer la gestion et la conduite des affaires, de stimuler l'activité boursière, de permettre à ceux qui désirent des salariés de devenir co- propriétaires de leur entreprise ce qui constitue en soi une source de motivation supplémentaire, de laisser à l'entreprise la possibilité de développer sa propre stratégie sans l'intervention de l'Etat ce qui responsabilise davantage la direction et la rend plus redevable de sa bonne gestion, de nouer des alliances ou de procéder à des acquisitions ou fusions, fonctions peu compatibles avec le statut public de l'entreprise. Enfin la privatisation permet à l'Etat d'engranger de l'argent frais lui permettant de réduire son déficit budgétaire et ainsi de ne pas augmenter les impôts qui frappent les contribuables et les entreprises. Ce faisant, la privatisation permet à l'Etat de lui ôter un fardeau financier qu'il n'a de cesse de traîner comme un boulet pour venir en aide à ses entreprises en difficultés chroniques. Cela dit, les actions de privatisation doivent se faire dans la transparence totale et selon les règles en vigueur. Un plan établi, concerté et approuvé par les différentes parties prenantes est absolument nécessaire pour garantir la pleine réussite de l'opération de privatisation. Il faut bien noter que la stratégie de privatisation des entreprises publiques, louable et nécessaire, a pris un sacré coup et une très mauvaise réputation après la mainmise scandaleuse de la famille mafieuse de Ben- Ali et compagnie sur plusieurs entreprises. D'où la nécessaire campagne de sensibilisation auprès des différents acteurs concernés ainsi qu'auprès du large public pour leur expliquer le bien-fondé d'une telle démarche.