Les révolutions survenues dans le monde à travers les époques ont toujours été suivies de mouvements artistiques et culturels ayant pour tâche de glorifier et d'immortaliser les moments historiques vécus par les révolutionnaires. La révolution populaire du 14 janvier fera sans doute apparaître les dons et les talents de nos artistes et de nos créateurs restés opprimés, étouffés et enchaînés par un régime tyrannique pendant plusieurs décennies. Ainsi, cette révolution aura sans doute ses échos dans le paysage artistique et culturel dans notre pays et parmi nos créateurs qui sont témoins de ces moments historiques et dont nous verrons bientôt les nouvelles œuvres, chacun dans son domaine, (littérature, peinture, théâtre, musique…), qui seront sans doute de bonnes références pour les générations futures. En matière d'arts plastiques, la réaction à cette révolution ne s'est pas fait attendre. La première initiative a été prise par Amel Zaîem avec le vernissage d'une exposition totalement consacrée à cet événement historique qui s'est tenu jeudi 24 février à la Maison de Culture Ibn Rachiq à Tunis et qui se poursuivra jusqu'au 10 mars. Cette exposition, intitulée « le complexe de la chaise », allusion faite aux chefs d'Etats qui montent sur le trône et ne s'en séparent qu'avec la mort, comporte 20 ouvrages à techniques mixtes : peinture sur toile et bois brûlé. Une peinture où dominent les couleurs rouge et noire qui rappellent la mort des martyrs et le deuil qui a frappé le pays ; mais aussi la couleur blanche qui émerge en haut de chaque tableau, signe d'espoir, de liberté et de lendemains heureux. Quelle que soit la forme d'expression adoptée, l'artiste a mis en exergue les principes sublimes et les grands idéaux scandés par les révolutionnaires. Des titres comme « Martyr », « Révolte », « Message », « Ouverture », « Solidarité », ce qui illustre bien les différentes étapes et les grands moments vécus par le peuple tunisien qui a pris en main son destin et mis fin à 23 ans de soumission et de souffrances sous le pouvoir absolu d'un président sans scrupules. Parmi ces tableaux, il y en a un qui s'intitule : « Dégage ! », ce vocable très cher aux révolutionnaires tunisiens qui leur a servi d'une arme redoutable contre le tyran Ben Ali et ses apôtres. « Ce tableau, nous a confié l'artiste, est un message adressé à tous ceux qui occupent les chaises et s'y cramponnent depuis des années sans rendre aucun service au peuple!» Le clou de cette exposition qui a connu dès les premières heures une affluence considérable de visiteurs, c'est l'œuvre intitulée « Gibier de potence » qui consiste en une chaise en rotin percée au milieu à force d'être occupée, avec des brûlures au niveau du dossier et des pieds et une corde à nœuds servant de guillotine à tous les dictateurs qui, une fois intronisés, ne quittent leur poste qu'avec la mort ou suite à un soulèvement populaire. L'usurpation du pouvoir par des moyens souvent détournés et malhonnêtes par ces tyrans doit les conduire inéluctablement à l'échafaud. Selon l'artiste, ce « complexe de la chaise » est un cas pathologique qui touche non seulement les chefs d'Etat dans le monde arabe mais aussi tous ceux qui détiennent un poste éminent dans la société et ne laissent pas la chance aux autres d'y accéder ! Une exposition d'actualité qu'il faut voir absolument !