Raouf KHALSI - Béji Caïd Essebsi est accueilli en grandes pompes : cinq démissions. Et surtout celles de deux mastodontes : Néjib Chebbi et Ahmed Brahim. Ce dernier, grand militant, fait une déclaration très mesurée : « Je suis plus utile à mon pays de l'extérieur plutôt qu'à l'intérieur du gouvernement ». Il sera plus utile aussi pour lui-même et pour ses projets d'avenir puisqu'il se présentera à coup sûr à l'élection présidentielle. Car, le noyautage dont a fait l'objet de son meeting à Gafsa lui a fait prendre conscience de la délicatesse de la conjoncture et cette soudaine purgation des passions où les courants politiques, jadis alliés contre l'ancien régime, en sont, aujourd'hui, à s'entre-choquer. C'est logique et c'est dans l'essence même de la Révolution : il faut que toutes les sensibilités longtemps opprimées aient leur droit à la parole. Mais, cela ne doit pas se faire dans la violence, quelles que soient ses raisons. Pour autant, ce que fait dire Albert Camus à l'un de ses héros se vérifie : « Chaque fois qu'un opprimé prend les armes au nom de la justice, il fait un pas dans l'injustice ». En d'autres termes, il faut absolument se dresser contre toute forme de violence comme celle, peut-être bien provoquée et orchestrée, qui a semé la terreur au centre-ville, le week-end dernier. En revanche, tout à fait surprenante paraît la déclaration d'un autre grand militant, Mohamed Néjib Chebbi : « Je crains que l'armée ne prenne le pouvoir à la manière égyptienne ». Voilà qui jette du trouble dans les esprits et fait écho à des rumeurs, dont il est le premier à savoir qu'elles sont non fondées. Est-ce réellement pour cela qu'il a quitté le gouvernement ?