Il y a comme ça des soirs où la magie opère. Lotfi Bouchnak, sur la scène du théâtre municipal dans le cadre du festival de la médina. Un rendez-vous habituel, attendu chaque mois de ramadan. Ce soir-là, le public n'a pas boudé son plaisir. Il a oublié et pardonné l'artiste jugé trop proche du sérail de l'ex-président. Une page semble être tournée en considération de l'accueil triomphal qui lui a été réservé. Son concert a drainé une foule immense venue savourer de grands moments de tarab. Lotfi Bouchnak a mis le paquet pour faire de ce concert un moment inoubliable. Un orchestre formé des meilleurs musiciens sur la place et la célèbre chorale Farabi l'ont accompagné durant plus de deux heures au cours desquelles il a interprété ses plus belles chansons. Après une « Wasla » offerte par la troupe, le maestro fait une éclatante rentrée sur scène suivie d'une standing ovation, démonstration du rayonnement dont il bénéficie auprès de ses nombreux fans. Assurance dans la voix et confiance dans la passion que lui voue le public, Lotfi Bouchnak se lance dans un voyage mélodique entre oriental et tunisien. Refrains connus et d'autres le sont moins sur les thèmes de la liberté, l'amour et les causes justes : de « Ajabi à « Hadhi Ghnaya likoum » en passant par « Ahkili wa Chkili », « Tichhid Aliya », « Tabda Lahkaya », « Nassaya », « Ritik ma naâraf win », « Inti Chamssi », « El Ain elli matchoufakchi » et d'autres. Le chanteur-compositeur, témoin de son époque, a également interprété des airs de son nouvel album dédié à la révolution. Des chansons de variété engagées très mélodiques que le public apprécie à leur juste valeur en instaurant un calme olympien. Puis, il réclame le répertoire tunisien qu'il connait bien. Bouchnak veut faire plaisir, il se lance dans un cocktail agréable et enjoué en faisant participer l'assistance à chanter avec lui. Et c'est en chœur qu'elle répète derrière le chanteur des ritournelles simples et légères qui traitent des thèmes ancrés dans le patrimoine tunisien. Jamais à aucun moment, sa voix ne l'a trahi. Au plus haut de sa forme, Bouchnak incarne un chant accessible, jouissif et plaisant à envie. L'oreille est tout le temps sollicitée autour des variations mélodiques formidablement bien formulée. Cette classe de chant nécessite évidemment une longue expérience mais aussi des exercices considérables de vocalise. Chose qui ne manque pas non plus chez la jeune Inès qui a chanté aux côtés de lui « El Ain elli mathoufakchi ». Au-delà de toutes les raisons, Lotfi Bouchnak reste une grande pointure de la musique arabe dont la présence sur une scène de théâtre est perçue comme une plage de bonheur à tous ceux qui aiment le tarab et les chansons à thèmes. Une excellente soirée de ramadan qui hausse le prestige du festival de la médina.