Non, nous ne sommes pas sortis de l'auberge. Les vieilles pratiques survivent à l'air du temps et, déjà, ce Printemps arabe est comme « détunisifié », comme déligitimé, noyant ses ferveurs et attisant les feux de la vindicte, du truquage, du montage ignoble et des mises en scène minablement virtuelles. Nous ne sommes pas guéris. Le peuple tunisien n'est pas exorcisé. Les médias, oui nous, sommes à la traîne et il en existe même qui n'ont pas fait leur « mea culpa », mais qui récupèrent la Révolution faite par ceux qu'on a bâillonnés dès le 15 janvier ! Des pans entiers du territoire et particulièrement au nord-ouest font planer le spectre de l'insurrection, mus, entre autres, par un désenchantement face à l'incapacité – logique – du gouvernement de la Troïka de leur renvoyer l'ascenseur, face aussi à l'incapacité d'Ennahdha à leur assurer, là, tout de suite, le paradis terrestre en attendant celui céleste. C'est ce qui arrive lorsqu'on va tactiquement recruter dans les foyers de misère et de précarité. Et c'est ce qui arrive lorsqu'on achète les consciences. Et c'est tout bonnement l'effet boomerang. Il est clair que le temps presse et que le gouvernement Jebali a sous-estimé le difficile exercice du pouvoir. L'ennui c'est que l'on est en train de mélanger les serviettes et les torchons. Les âmes nobles nahdhaouies sont taraudées par un curieux sentiment d'allégeance aux âmes sataniques des Salafistes. Si l'on doit rompre avec le passé, il faudra aussi que les Nahdhaouis cessent inconsciemment d'imiter l'ennemi rcédistes ou tout bonnement les brigades des années de terreur. Or, pour l'heure, un homme s'étant érigé en guide suprême est en train d'attiser le feu : c'est bien Cheikh Rached qu'on croirait victime d'un phénomène d'osmose khomeiniste. Et puis, il est clair qu'on veut déstabiliser Ennahdha. Ce qu'on a fait à Ali Laârayedh hier est non seulement ignoble, sale, et immoral, mais c'est aussi une déclaration de guerre. Les anciens apparatchiks sont toujours là, investissant facebook et certains médias. Sauf que l'erreur majeure des militants nahdhaouis, c'est de croire qu'on va les battre avec leurs propres armes. S'adressant à quelqu'un de très puissant, Omar Khayam écrivait : « Si tu punis le mal que je fais par le mal, quelle différence y a-t-il entre toi et moi ? ».