Des institutions internationales spécialisées dont le Centre américain d'études stratégiques pour l'Afrique ont mis en garde contre la recrudescence du crime organisé et les menaces directes qu'il fait peser sur l'avenir des démocraties naissantes en Tunisie et dans les pays maghrébins, ą travers l'infiltration des institutions officielles sensibles comme l'institution sécuritaire au moyen de la corruption, des pots de vin et des diverses autres méthodes de subornation. Les derniers évŹnements qu'ont connus la Tunisie et les autres pays maghrébins, dans le sillage des mutations démocratiques, ont révélé l'existence de bandes et de réseaux de crime organisé qui pratiquent la contrebande et les trafics de tout genre, via les frontiŹres entre la Tunisie, l'Algérie, et la Libye, comme le trafic des voitures , des carburants et des piŹces de rechange, outre celui des stupéfiants et des armes. Dans les comptes rendus périodiques sur les activités sécuritaires, durant les derniers mois, les autorités sécuritaires en Tunisie font état, souvent, de démantŹlement de réseaux et de bandes de trafiquants spécialisés dans la contrebande des voitures de luxe et de la drogue entre la Tunisie et l'Algérie. De son côté, la presse algérienne publie réguliŹrement des rapports sur la recrudescence du trafic et de la contrebande au niveau des frontiŹres entre les deux pays, menés par des réseaux de crime organisé dont un réseau de trafic de voitures de luxe démantelé dans la ville algérienne de Biskra et qui opérait sous la direction d'une femme de cette ville. Ces bandes et ces réseaux de crime organisé ont réussi ą transformer toute la bande frontiŹre de la ville de Annaba au nord ą la ville de Oued Souf, au sud, en Algérie en une zone ouverte de trafic et de contrebande, trompant la vigilance des agents de douane et des garde-frontiŹres dans les deux pays. Le trafic porte sur tous les produits, mais ą la contrebande classique est venu s'ajouter le trafic des armes provenant de Libye, ą une échelle inquiétante. Les réseaux et bandes de trafiquants ont réussi ą aménager et ą ouvrir prŹs de 23 pistes clandestines entre la Tunisie et l'Algérie que les trafiquants utilisent pour faire passer le produit de la contrebande. La ville algérienne de Bir EL Ater contigüe ą la Tunisie est devenue une plaque tournante du trafic des armes provenant de Libye via le territoire tunisien. Les armes y sont vendues en plein jour et vont des révolvers et pistolets aux fusils d'assaut, et ce ą des prix faibles ą la portée de tout le monde. Les autorités ont arrźté, entre autres, une bande de trafiquants avec une camionnette chargée d'armes et de munitions. En été dernier, les autorités tunisiennes durent faire appel ą l'armée de l'air pour bombarder un convoi de sept voitures infiltrées clandestinement en Tunisie, ą partir de l'Algérie, dans la région du Sud, et soupćonnées appartenir ą des réseaux criminels ou terroristes.
Gare au retour de la corruption !
Les agressions et intimidations dont sont réguliŹrement victimes les agents de la douane et les garde-frontiŹres en Tunisie prouvent la puissance que les réseaux du crime organisé ont acquise. Aussi, les institutions internationales signalées craignent de voir le crime organisé dans les pays maghrébins grandir, atteindre l'ampleur acquise par le commerce de la drogue et des stupéfiants dans certains pays d'Amérique du Sud, et devenir un mal et une menace politique et sociale, en infiltrant les institutions officielles sensibles comme l'institution sécuritaire, au moyen de la corruption, des pots de vin et de la subornation. Il est ą craindre que ces groupes criminels, dans nos démocraties naissantes, deviennent aussi influents que les organisations criminelles de la mafia en Italie, dans les pays européens et aux Etats Unis, avec en prime des institutions officielles nouvellement installées et par conséquent fragiles et inexpérimentées en la matiŹre. Mais, ce qui aggrave la situation et incite ą l'inquiétude ą propos des menaces sur les démocraties maghrébines naissantes , est que les organisations politiques extrémistes interdites, appelées ‘'organisations terroristes'' par les rapports internationaux, participent, également, ą l'alimentation du crime organisé et de la contrebande qu'elles mettent ą profit pour renflouer leurs caisses et obtenir de l'argent nécessaire au financement de leurs opérations terroristes. Ces organisations extrémistes ont ainsi exploité le relČchement et les troubles ayant accompagné les mouvements révolutionnaires et réformistes dans les pays maghrébins pour consolider leurs assises, accroĒtre leurs cellules de base et les équiper d'armes et de matériel logistique moderne. Leur activité couvre désormais toute la région constituée par les pays d'Afrique du Nord et les pays d'Afrique de l'Ouest, au sud du Sahara. Cette extension géographique, selon les rapports internationaux, est de nature ą encourager les réseaux de crime organisé, dans les pays maghrébins, ą étendre, aussi, leurs activités et ą nouer des relations avec les syndicats du crime dans les pays d'Afrique de l'Ouest, qui sont des organisations criminelles trŹs évoluées et trŹs influentes et sont spécialisés, notamment, dans le trafic de la drogue et de la cocaēne. La zone servait, déją, depuis longtemps, comme zone de passage aux candidats ą l'émigration clandestine vers l'Europe, avec tout ce que cette opération comporte d'aspects criminels. Les autorités tunisiennes, en particulier, sont appelées ą tenir compte de ces évolutions afin de prévenir un éventuel rétablissement du fléau de la corruption dans le pays, qui avait miné l'Etat et la société sous l'ancien régime. D'autant qu'il est projeté de mettre en place une structure officielle permanente chargée de la lutte et de la prévention contre la corruption.