Tout est dans le symbole. En ce sens, décider qu'il n'y ait pas de pavillon tunisien cette année à Cannes, sous des prétextes qui ne tiennent pas la route, c'est signifier, qui plus est, d'une manière officielle, la mort d'un secteur, comme touché par une étrange malédiction, et que l'on tend, de plus en plus à marginaliser, en le coupant de tout contact avec l'extérieur. Que des producteurs, des cinéastes, ou autres actants du métier, aient l'opportunité de rencontrer leurs pairs, qui plus est, dans le cadre du plus prestigieux, des festivals de cinéma au monde, histoire de donner plus de visibilité à nos films, ne relève pas du luxe, mais de la nécessité. Leur nier ce droit, en leur coupant les vivres, d'une certaine manière, parce qu'il n'y aurait pas d'œuvres tunisiennes qui figureraient dans la sélection Cannoise, c'est entrer dans une logique, qui peut être très dangereuse. Cela voudra dire que bientôt, et sur décision de leur ministère de tutelle, les Hommes de culture, et tous les créateurs, d'une façon plus générale, en l'absence de la programmation de leurs créations (films, pièces de théâtre…) dans tel ou tel festival, toutes latitudes confondues, seront condamnés à se tourner les pouces en regardant leur nombril, empêchés de rencontrer cet Autre, dont la différence les enrichit, le contraire étant aussi valable, parce qu'une instance, que l'on dit officielle, aurait décidé qu'il en soit ainsi et pas autrement, pour ménager des économies de bouts de chandelle, qui ne rajoutent rien à rien, si ce n'est creuser encore une distance, qui n'a rien de respectueux, entre le ministère de la culture et les actants de la culture. Il est vrai qu'il n'y a pas de films tunisiens dans la sélection Cannoise, hormis quelque trois courts, figurant dans un volet parallèle ; mais la présence du pavillon tunisien est une présence, largement justifiée, tant au niveau des échanges, que de la symbolique. Car, il ne faut pas sous-estimer la force du symbole. Un peu, en somme, dans le même ordre d'idées que l'amende, ou les amendes, infligées à Nessma, pour la diffusion du film franco-iranien : « Persépolis ». Quel rapport ? Il y a un rapport, de cause à effet. Cela s'appelle la création d'un précédent. Condamner une chaîne, qui aurait eu « l'outrecuidance » de proposer à ces téléspectateurs, une très belle œuvre, avec des chefs d'accusation qui frisent le ridicule le plus complet, ou décider que le pavillon tunisien soit désormais le grand absent à Cannes, c'est « kif- kif bourricot… ».