La discriminatoire circulaire Guéant abrogée * Concertation pour résoudre les problèmes de financements, de procédures et de délais La circulaire Guéant du 31 mai 2011, qui restreignait la possibilité de travailler en France pour les étudiants étrangers diplômés, a été abrogée jeudi 31 mai par le gouvernement. Cette circulaire avait pour fonction d'expliciter la loi de 2006 sur l'immigration et concernait, plus spécifiquement, le changement de statut quand les étudiants étrangers néo-diplômés passaient du statut d'étudiant à celui de travailleur. La circulaire donnait en fait aux préfets les clés pour expulser les étudiants étrangers en leur refusant le nouveau statut. Jusqu'ici, les étudiants nouvellement diplômés étaient en attente de savoir si leur changement de statut allait être accepté par les préfectures.
Manuel Valls sur RMC, le 31 mai, indiquait qu'une concertation a eu lieu avec les présidents d'université et les responsables des grandes écoles, ainsi qu'avec les associations qui se sont mobilisées contre ce texte « pour qu'il puisse y avoir une nouvelle circulaire qui abroge ce qu'on a appelé la circulaire Guéant et qui permette aux étudiants étrangers - c'est une chance pour eux et c'est aussi une chance pour notre pays - de ne plus être dans cette insécurité à quelques mois de la rentrée universitaire ». Créée après une concertation entre les ministres de l'Intérieur, du Travail et de l'Enseignement supérieur et les présidents d'université, responsables des grandes écoles, ainsi qu'avec les associations qui se sont mobilisées contre ce texte, “cette nouvelle circulaire établit des règles précises et transparentes dans le cadre du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code du travail.” L'abrogation de la circulaire Guéant, qui était une promesse de campagne de François Hollande, “va permettre aux étudiants et chercheurs étrangers de venir travailler en France dans des conditions normales. On ne leur met plus de bâtons dans les roues”, a déclaré Geneviève Fioraso, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche vendredi 1er juin. La mesure avait soulevé contre elle une campagne d'opposition qui avait associé des étudiants, y compris français, des universitaires et des chefs d'entreprises. Louis Vogel, président de la Conférence des présidents d'universités (CPU) a jugé que la circulaire du 31 mai pouvait « avoir des conséquences importantes pour notre enseignement supérieur », craignant la destruction des conventions passées avec les universités étrangères. Avec 278.000 étudiants étrangers, 100.000 de plus qu'il y a dix ans, la France se place juste derrière les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, à égalité avec l'Allemagne et l'Australie ; 40 % des doctorants dans les universités françaises ne sont pas Français. La circulaire est un revirement par rapport à la loi de 2006 relative à l'immigration et à l'intégration, qui autorise les diplômés étrangers sortant d'un master à travailler en France s'ils ont une offre dans les six mois suivant leur diplôme. Le législateur voulait attirer des cerveaux comme le font les Anglo-Saxons.
Au sein même de l'UMP au pouvoir, des voix comme celles de Frédéric Mitterrand et de Laurent Wauquiez avaient appelé à sa révision contraignant le ministre de l'intérieur à l'adoucir par un correctif en janvier 2012. Mais des Collectifs, des Syndicats, et des Présidents d'université sont entrés en résistance contre la circulaire l'accusant de couper la France de l'intelligence du monde et de favoriser l'isolationnisme qui coupe le pays des richesses susceptibles de jeter des ponts par la formation scientifique avec les pays émergents. Ils ont mis en avant le fait que cette « fuite des cerveaux » formés en France profite en fait déjà à l'Allemagne et au Canada qui organisent des structures de recrutement qui ciblent spécifiquement cette population en faveur de laquelle ils n'ont déboursé aucun euro.
Nouvelles revendications Malgré cette avancée, les attentes des organisations estudiantines restent en suspens. L'Unef et la Confédération étudiante réclament également le retrait d'un décret du 6 septembre 2011, relevant le niveau des ressources financières imposées aux nouveaux étudiants désireux de suivre des études en France. Ce décret prévoit que les étudiants internationaux devront justifier de “640 euros à 770 euros de ressources mensuelles, contre 460 euros auparavant”. Les syndicats dénoncent la sélection sociale pour venir étudier en France qui serait contraire au principe de justice mis en avant par François Hollande. Le coût global de l'annuité pour chaque étudiant varie selon que l'on est Français ou étranger. A HEC, le coût par an pour les étrangers est fixé à 17 500 euros, contre 11 900 euros pour les Français et 13 200 euros pour les Européens. L'ESCP (école de commerce à Paris) propose un cursus à 15 500 euros par an (11 500 euros pour les ressortissants de l'UE). A Sciences Po Paris, les droits sont de 13 000 euros en master. Gratuit jusqu'en décembre 2008, le renouvellement d'un titre de séjour étudiant est désormais soumis à une taxe comprise entre 55 et 70 euros. A partir du 1er janvier 2012, une nouvelle taxe variant entre 200 et 385 euros a été imposée.
D'autre part, la liste des 30 métiers qui sont jugés sous tension a été revue à la baisse pour comprendre actuellement 14 métiers, limitant ainsi les chances de travailler des étudiants étrangers. La Tunisie n'est pas concernée par cette décision, suite à l'accord bilatéral signé entre les deux pays en 2009 prévoyant notamment une liste de 107 métiers.
Pour l'instant, le ministère de l'Intérieur prévoit une série de “concertations approfondies” dans les semaines qui viennent, pour pallier les problèmes des financements, des procédures et des délais.
De notre correspondant permanant à Paris Zine Elabidine Hamda