La parité dans l'héritage entre la femme et l'homme a depuis longtemps était un sujet tabou en Tunisie. Malgré les avancées réalisées en matière des droits de la femme et la promulgation du Code de Statut Personnel, juste après l'indépendance, le sujet a toujours fait l'objet de controverses et de divergences entre les différents acteurs sociaux. Les « pour » et les « contre » la parité n'ont jamais réussi à se mettre d'accord sur la question, ni même lancer un débat autour du sujet. La Tunisie de l'après 14 janvier sera-t-elle capable d'instaurer ce dialogue tant attendu par les défenseurs des droits de l'Homme et surtout ceux qui militent pour l'égalité entre les sexes ? A priori, la réponse est oui.
C'est ce qui a été déclaré récemment par Samir Dilou ministre des Droits de l'Homme et de la Justice Transitionnelle juste après sa visite à Genève, où il a présenté le deuxième rapport national de la Tunisie sur les droits de l'Homme. Un sujet tabou, la parité dans l'héritage entre l'homme et la femme doit faire l'objet d'un dialogue, c'est pour cette raison d'ailleurs, que la Tunisie n'a pas adopté la recommandation qui la défend dans le Conseil des Droits de l'Homme de l'ONU. Ladite recommandation a été ajournée en attendant ce dialogue. Mais à quand ?
Cette information annoncée par le ministre des Droits de l'Homme et de la Justice Transitionnelle a été critiquée par plusieurs observateurs. Certains la considère comme un pas positif, alors que d'autres jugent que le ministre des Droits de l'Homme n'était pas très clair là-dessus. Notamment, Bochra Bel Haj Hmida, avocate et militante des droits de l'Homme, trouve que « le fait que le ministre des Droits de l'Homme et de la Justice Transitionnelle annonce que le sujet fera l'objet d'un débat, est un pas positif ».
Déclaration plus claire Toutefois, « l'avocate aurait aimé qu'il aille plus loin » dans ses déclarations pour dire clairement que le gouvernement s'engagera dans ce débat de manière concrète « et que ce n'est plus un sujet tabou » toujours d'après Mme Bel Haj Hmida qui rappelle que même après le 14 janvier, il est presque difficile d'évoquer le sujet et que celles ou ceux qui en parlent font l'objet de campagne de dénigrement.
Le gouvernement provisoire devrait dès lors faire preuve d'un engagement plus clair et ferme tout en déclarant que la liberté d'expression sera de mise dans tous les domaines. D'ailleurs, Me Bel Haj Hmida considère que Samir Dilou devrait « préparer le terrain et dire qu'on pourra en discuter réellement et que le gouvernement va garantir ce genre de débat ». « Car même après le 14 janvier, le sujet n'a pas été évoqué, et il est même interdit d'en parler », tenait à ajouter la militante des droits de l'Homme. « Pression, intimidation, dénigrement... », c'est le sort de ceux qui parlent de l'équité dans l'héritage entre l'homme et la femme même après la Révolution.
C'est au nom de Dieu que les défenseurs de la Chariâa refusent ce discours. Certes ils sont libres. Toutefois, ils sont tenus de respecter les idées d'autrui. « Ce que je demande, c'est de discuter de ce sujet librement, chose qui n'a pas été faite ni avant ni après la Révolution », constate Mme Bel Haj Hmida tout en expliquant que cela est dû aux mêmes raisons. Elle revendique ainsi, le droit de s'exprimer sans aucune pression ni intimidation. Un droit légitime. Mais le gouvernement provisoire veillera-t-il à ça dans les plus proches délais, où serait-ce un dossier à classer pour l'instant, car il y'a d'autres priorités ?