Le préambule médiatisé par le journal Assabah, tout récemment, risque de choquer une grande partie du peuple tunisien. Effectivement, l'ayant lu et relu, beaucoup de gens ne s'y reconnaissent point. Ils le trouvent tellement resserré qu'il renferme plusieurs ambiguïtés dont les générations futures n'ont pas besoin. Selon eux, il est tellement romantique qu'il ne reflète que les sentiments forts de la majorité qui porte une haine implacable à l'égard de Bourguiba et des différents dirigeants qui l'ont accompagné lors de la fondation des bases de la Tunisie moderne. Ainsi, la négation de l'indépendance dont tous les constituants sont les produits incontestables est une ingratitude que seule une minorité du peuple se partage. D'ailleurs, s'il n'y avait pas d'indépendance en Tunisie, il n'y aurait pas de soulèvement original couronné par l'éjection de Ben Ali et de ses comparses d'une manière qui frôle le miracle. Vraisemblablement, la négation de l'indépendance est la négation de la dignité, de l'orgueil d'un peuple et de ses moments de joie.
Ensuite, la connotation idéologique ne s'arrête pas là. Elle est clairement exprimée à travers l'évocation de la Palestine. Il est vrai que nous soutenons les mouvements de libération qui luttent contre le colonialisme parmi lesquels figure la cause palestinienne. Or si la constitution est un texte qui se veut éternel, il n'y a aucune raison d'y insérer le nom d'un pays dont la situation est censée être temporaire.
De plus, on parle comme si la Tunisie n'était pas musulmane et comme si nous vivions, auparavant, dans le péché alors que le prélude de la Constitution de 1959 ne manque pas de le préciser la volonté du peuple de « demeurer fidèle aux enseignements de l'Islam ». Par conséquent, l'exégèse des dirigeants tunisiens répond aux fins les plus nobles de l'islam surtout concernant la liberté de la femme.
Par ailleurs, ce document néglige totalement la dimension méditerranéenne et l'étendue africaine de la Tunisie, longtemps surnommée « Le Nord de l'Afrique. ». En effet, cette position géographique a permis à la Tunisie d'avoir une particularité historique qui le différencie incontestablement des autres peuples de la région plus précisément.
Aussi, cette formulation ignore-t-elle totalement notre passé et le situe-t-elle dans l'absurde. Elle semble soucieuse de mettre une chape hermétique sur le passé récent. Par contre ; chacun de nous en a joui tant soit peu et l'a vécu avec ses succès et ses revers. Dans ce cas et quel que soit l'enthousiasme qui anime les constituants c'est notre avenir en tant que peuple uni et solidaire qui est mis en jeu.
Alors, bien que l'histoire de la Tunisie indépendante soit entachée du despotisme de Bourguiba, que seuls les académiciens peuvent situer dans son contexte, puis de la tyrannie et de la corruption de Ben Ali, elle demeure un modèle qui a forgé un peuple prêt, à tout moment, à décoller. Le reste n'est que discours oiseux qui ne tarde pas à montrer sa faillite.