La Révolution libyenne n'a pas fait que des heureux. Elle a eu aussi son lot de malheureux, parmi ceux-ci les blessés et malades dont les cliniques privées tunisiennes avaient soigné bon nombre de patients. Après avoir veillé aux bons soins des victimes, ces cliniques vivent des difficultés financières insoutenables à cause du non règlement des factures afférentes aux soins et services fournis à nos frères libyens.
Alors que les cliniques privées commençaient à accueillir et prendre en charge les malades et blessés de la Révolution libyenne, il n'y avait pas encore de Conseil transitoire pour diriger le pays voisin. Un grand nombre de blessés avaient été admis et soignés bénévolement. On estime à 1400.000 le nombre des Libyens qui s'étaient réfugiés en Tunisie ou avaient bénéficié des services des cliniques privées. Celles-ci, dans un effort humanitaire ont accepté des malades et des blessés sans prendre la peine d'exiger au préalable des garanties de paiement.
Après l'installation du Conseil transitoire libyen, l'espoir légitime de voir les factures payées ne peut qu'être permis. Khaled Nabli, président de la chambre nationale syndicale des cliniques, rappelle que plusieurs réunions ont été tenues. Le gouvernement libyen s'est stabilisé. Les dettes s'étaient élevées à la fin de 2011 à 50 milliards de millimes. Des opérations de sensibilisation avaient été engagées. Les médecins, le personnel para-médical, le personnel administratif, les pharmaciens extérieurs, tiennent à être payés. Ils sont absolument dans leurs droits. Toutefois, les difficultés financières rencontrées par les cliniques les empêchaient d'honorer leurs engagements. « En dépit de ces problèmes, nous n'avons jamais cessé de prodiguer les soins aux blessés et malades libyens », précise notre interlocuteur. Une partie des dettes a été payée, à savoir 75% des créances du mois de juin 2011. Par la suite les dettes ont repris de nouveau pour atteindre 70 milliards. Une réunion a eu lieu le 13 février avec l'ambassadeur de la Libye et le ministre des Finances. Un engagement a été pris pour que toutes les factures soient payées à la fin du mois de février. Un procès-verbal fut dressé et signé. Sans donner de suite car rien n'a été fait.
Le 15 mai dernier, une réunion a eu lieu au siège de l'Union Tunisienne du Commerce et de l'Artisanat (UTICA). Une délégation s'est rendue à l'ambassade de la Libye. Elle n'a pu rencontrer l'ambassadeur. Une copie du PV a été remise aux adjoints de l'ambassadeur. Le même jour la délégation s'est déplacée en Tripoli. Elle a rencontré le Pr. Mrajeâ Ghaïeth, secrétaire d'Etat à la Santé. Un exposé lui a été fait de la situation critique des cliniques. Depuis huit mois les créances ne font que s'accumuler. La marche normale des cliniques s'est trouvée perturbée. Elles avaient contracté des crédits auprès des banques et rencontrent à présent des difficultés pour honorer et rembourser leurs dettes. Le secrétaire d'Etat libyen a promis, selon Dr. Khaled Nabli, que les factures seront payées à la fin du mois de mai. Promesse non tenue. Les responsables du paiement des factures ont adopté une nouvelle procédure qui est la vérification des 20.000 factures, totalisant les 70 millions de dinars.
La chambre nationale syndicale des cliniques s'est adressée au ministre tunisien de la Santé publique. Une séance de travail a été tenue le 31 mai dernier. « Le ministre de la Santé a été compréhensif et a assuré qu'il interviendra auprès du Chef du Gouvernement et de la partie libyenne afin de résoudre le problème », affirme Khaled Nabli.
Certains parlent de gros dépassements dans le montant des factures. A ceux là, Khaled Nabli, répond qu'il n'est pas contre la vérification, mais elle ne doit pas traîner et demande au moins de payer les factures établies jusqu'au 31 décembre 2011. Il s'agit d'une année comptable clôturée. Les Commissaires aux comptes demandent de provisionner ces créances devenues douteuses. Les découverts auprès des banques ont augmenté. « Nous avons demandé aux autorités libyennes de résoudre les problèmes. C'est une question de survie pour les cliniques », prévient Khaled Nabli. Un cri de détresse, pour sensibiliser les responsables tunisiens à l'urgence des problèmes. Il considère qu'une « décision politique est nécessaire pour résoudre les problèmes. Ceux qui tiennent à faire traîner les révisions cherchent à décrédibiliser les cliniques tunisiennes ». Les autorités tunisiennes prendront-elles à cœur les doléances des cliniques privées ? Ce problème d'impayés traînera-t-il encore ?