Abdallah Triki, secrétaire d'Etat aux Affaires africaines, maghrébines et arabes avait déclaré que la Tunisie afin d'activer l'unité du Maghreb arabe, a décidé de permettre aux Maghrébins de résider, travailler, investir, acheter des propriétés, voire même voter pour les municipales en Tunisie. Marocains, Algériens et Mauritaniens auront la possibilité d'accéder au territoire tunisien sur une simple présentation d'une pièce d'identité.
Il a rappelé, dans une déclaration à la TAP, qu'il n'existe pas de visas pour circuler entre pays maghrébins. « A partir du 1er juillet les ressortissants marocains pourront entrer au territoire tunisien en toute latitude sur simple présentation de leur carte d'identité. En plus de leur droit de déplacement, ils auront la possibilité de travailler, d'acquérir et d'investir conformément aux accords bilatéraux signés depuis les années soixante ». Il s'agit des anciens accords qui somnolaient et qui vont être remis au goût du jour. Ces accords concernent le Maroc, l'Algérie et la Mauritanie et excluent la Libye. Le Maroc tient aux accords sur les quatre libertés signés en 1964. Le secrétaire d'Etat parle de près de 20 mille demandes présentées par des Marocains pour bénéficier des mêmes droits que les Tunisiens aux Maroc. D'ailleurs les Tunisiens ont le droit de s'approprier des terrains agricoles au Maroc. Ce n'est pas le cas des Marocains en Tunisie.
Avec près de 800 mille chômeurs, les Tunisiens craignent de subir le contrecoup d'une concurrence déloyale sur le marché du travail.
Sami Remédia, président de l'association tunisienne pour la transparence financière va plus loin. Il affirme sur les colonnes de Businessnews que « Cette décision constitue une menace pour la Tunisie pour notre sécurité et celle de nos enfants. En effet, de la sorte il n'y a plus aucun contrôle sur nos frontières, dans une région du monde devenue désormais « chaude ». C'est une menace pour le marché de l'emploi, pour notre identité et notre cohésion nationale et pour notre souveraineté ». Dans une interview à ExpressFM, Sami Remadi va plus loin en disant : « «Elu avec 7000 voix seulement, Marzouki n'a pas le droit d'engager le pays dans des décisions stratégiques qui peuvent menacer son avenir, sa sécurité et son équilibre social. De telles décisions nécessitent un consensus national et ne peuvent être prises qu'après un référendum...».
Concernant le marché de l'emploi, Abdallah Triki rappelle que le SMIG au Maroc et en Algérie est beaucoup plus élevé qu'en Tunisie. Il en est de même pour les salaires des techniciens, ingénieurs et médecins... Concernant l'aspect sécuritaire, il pense que le recours à la carte d'identité ne doit pas occulter les contrôles d'usage aux postes frontaliers.
Pour ce qui est du droit de vote des Maghrébins en Tunisie, il ne peut être accordé qu'après approbation par l'Assemblée Nationale Constituante (ANC). Comment peut-on intégrer les Maghrébins dans les élections municipales en Tunisie, alors que la liste des inscrits tunisiens n'est pas finalisée ? Au Maroc les résidents étrangers bénéficient du droit de vote aux élections municipales. C'est un argument utilisé par les socialistes français lors de la campagne électorale présidentielle pour défendre le droit de vote aux élections locales pour les étrangers non européens installés en France, à la condition d'une réciprocité.
De son côté Ameur Lâarayadh, membre de la Constituante a rappelé sur les ondes de MosaïqueFM, que la non utilisation du visa, pour la circulation entre pays maghrébins, n'est pas chose nouvelle. Des mesures pour protéger l'emploi des Tunisiens existent. Ils ont la priorité. « Il s'agit, surtout d'encourager le tourisme et l'investissement en Tunisie. La réciprocité est de mise. L'accord n'est pas encore finalisé. Certains détails n'ont pas connu d'accord final », dit-il. Il n'est pas évident que les « nouvelles » mesures peuvent être mies en application à partir du 1er juillet. En cas de mise en application de ces dispositions les Tunisiens en profiteront dans les différents pays maghrébins. Ils auront la possibilité de travailler, de s'installer et d'investir dans ces pays.
Le sommet maghrébin qui aura lieu en Tunisie en Octobre prochain permettra-t-il de s'engager inéluctablement et sans hésitation sur la voie de l'unité maghrébine qui nous coûte 2% du PIB, soit plus de 30 mille emplois par an ?
La question des libertés accordées aux Maghrébins en Tunisie ne mérite-t-elle pas d'avantage de débat dans le pays ? Doit-on se contenter de déclarations du Secrétaire d'Etat, suivies par des réactions qui peuvent être précipitées ? N'y a-t-il pas risque de desservir la cause maghrébine, par la précipitation ?