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Interview : Hédi Jallab, Directeur général des Archives nationales de Tunisie
« Il a été prouvé par les documents que les élections de 1981 avaient été falsifiées ».
Publié dans Le Temps le 08 - 08 - 2012

Hédi Jallab est l'actuel Directeur Général des Archives de Tunisie. Docteur en histoire, spécialiste de l'histoire du mouvement national et de l'archivistique, Il est l'auteur de 7 ouvrages dont 4 en collaboration et d'une douzaine d'articles portant sur différents aspects de l'histoire contemporaine de la Tunisie et de l'archivistique.
Il est Secrétaire général d'ARBICA depuis 2006, fait partie du groupe Solidarité Archivistique Francophone et est membre du Comité exécutif de l'Association internationale des archives. Nous l'avons rencontré à Paris, en marge d'un colloque sur les archives de la gauche tunisienne organisé par la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine(BDIC) et l'Association de la fondation Ahmed Othmani.

Suite aux événements durant la révolution, plusieurs institutions officielles ont été saccagées et brûlées. Quel est l'état des pertes en ce qui concerne les archives ?

Pour ce qui est des archives perdues ou brûlées, cela ne concerne que les petits centres de sûreté, quelques petites municipalités, des Comités de coordination du RCD et des tribunaux. Cela s'est déroulé principalement dans les régions, mais les administrations centrales ont été épargnées. Certes c'est une perte, mais cela n'a aucun rapport avec ce qui s'est passé en Egypte et en Libye.

Après les événements, les Archives nationales ont annulé les autorisations de destruction pour éviter l'amalgame et la destruction de documents de façon indue. L'Etat a le droit de détruire les documents devenus obsolètes après un certain temps et obtient, à cet effet, une autorisation de destruction. Après le retour à la normale, la situation a été maîtrisée grâce au concours des archivistes dans toutes les structures de l'Etat. Et les destructions ont été rétablies de façon organisée. Nous avons fourni un effort pour reprendre et rassembler les archives à risque.

Sur quels documents avez-vous concentré vos efforts ?

Ce sont les archives qui appartiennent aux structures qui ont été dissoutes et qui n'ont plus d'institution ou de personnel comme le Conseil consultatif, le Conseil économique et social, le Conseil constitutionnel, le ministère de l'information. Nous avons récupéré les archives des structures qui n'ont plus d'existence légale et qui avaient été dissoutes par décision politique ou suite à la suspension de la Constitution de 1959.

Nous avons pu récupérer le trésor du RCD : 20.000 boîtes concernant la Tunisie indépendante et même une période du Protectorat. Après sa dissolution, nous les avons trouvées dans ses bureaux centraux et dans les Comités de coordination dans les régions. A titre d'exemple, nous avons récupéré 1000 boîtes du seul Comité de coordination du RCD de la Marsa. Certains Comités de coordination ont été brûlés avec leurs archives. Mais, beaucoup d'autres n'ont pas été touchés et leurs archives ont été protégées par l'armée nationale. Ces centres ont été utilisés par la suite par les comités régionaux de l'ISIE.

Les Archives nationales ont pu aussi récupérer les documents de l'ISIE, de l'INRIC et de la Haute Instance de Yadh Ben Achour ainsi qu'un nombre précieux d'archives personnelles dont certaines concernent les fondateurs des Jeunes Tunisiens au début du siècle dernier.

Avez-vous obtenu des documents supplémentaires d'autres sources ?

D'autres institutions nous ont donné des archives, mais loin de la pression des événements. Nous avons reçu normalement des documents des hôpitaux, des administrations, des tribunaux, de façon organisée en fonction des délais en vigueur.

Est-il vrai que vous avez pu récupérer les archives du mouvement scout tunisien? Qu'en est-il au juste ?

Il y a eu une initiative personnelle de l'un des militants du mouvement scout, M. Salem Maghroum, qui a mis à notre disposition les archives, en coordination avec l'Etat-major du mouvement. Nous avons établi ensemble un plan pour l'organisation, la collecte et le transfert des documents vers les Archives nationales. Nous avons créé un fonds, appelé le Fonds des Scouts tunisiens, qui sera mis à la disposition des chercheurs. Ce travail est en cours au centre du Mouvement au Belvédère.

Le public s'interroge sur le sort réservé aux archives de l'Agence tunisienne de communication extérieure (ATCE), qu'en est-il au juste ?

Cette institution est sous scellés, entre les mains de la justice. Des affaires sont portées auprès des tribunaux concernant ses activités et ses dirigeants. Les archives de l'ATCE sont entre les mains de la Justice .Les Archives nationales les récupéreront lorsque la justice aura terminé son travail. On leur appliquera naturellement les conditions légales pour les examiner, les classer et les mettre à disposition des chercheurs dans les délais de rigueur.

Quel sort a été réservé aux documents se rapportant à la dictature du temps de Ben Ali, c'est-à-dire ceux relatifs aux cas de torture, d'emprisonnement politique, de procès inéquitables ?

Ces documents sont dans des lieux différents parce qu'ils sont produits par différents acteurs et ils sont encore sous la responsabilité de leurs producteurs. Tout ce qui se rapporte à leur utilisation, à la justice transitionnelle et à l'ouverture des archives pour connaître la vérité, procéder aux questionnements et ensuite à la réconciliation, tout cela est sujet à une décision politique et à un consensus national qui tarde à venir. Nous ne pouvons donc pas collecter ces archives parce qu'il n'y a pas de décision politique en ce sens.

Pensez-vous que cette question relève du Ministère des droits de l'homme dans le cadre de la justice transitionnelle en élaboration ?

Bien sûr. La question se pose parce que la justice transitionnelle se base sur des preuves. Dans le cas d'espèce, il y a les témoignages oraux des personnes qui ont été torturées, etc. Mais, les archives sont indispensables pour la justice transitionnelle.

Quand seront mises à la disposition du public ces archives que vous avez récoltées ?

La mise à la disposition du public se fera sous deux conditions. La première est légale. La loi stipule des délais : 30 ans pour les documents ordinaires, 60 ans pour les documents sécuritaires et 100 ans pour les documents à caractère privé. La deuxième condition est technique. Il faut avoir le temps de consulter ces documents. Collecter 20 ou 30 mille boîtes d'archives nécessite un travail technique de description, d'indexation pour rendre accessibles les informations qui existent dans les documents. C'est le travail des archivistes qui demande du temps. Il y a des instruments de recherche nécessaires pour trouver l'information dans les documents. Quand ce travail sera terminé, les documents seront mis à la disposition des chercheurs.

Les documents relatifs aux élections, notamment celles sujettes à caution, qui se sont déroulées du temps de Bourguiba et de Ben Ali, sont-ils consultables pour qu'on puisse s'assurer des falsifications ?

Oui. On peut accéder à ces documents. Le Ministère de l'intérieur a la maîtrise de ces documents. Au sein des Archives nationales nous avons les documents des élections précédentes. Cependant, les documents transférés aux Archives ne permettent pas de prouver les dépassements ou la falsification. La logistique a été transférée, c'est-à-dire la correspondance, la préparation et les résultats, mais pas les bulletins de vote et le dépouillement. Quant à l'historique des élections, nous avons conservé les documents des élections de la première Assemblée constituante de 1956. Il ya aussi des documents relatifs aux élections de 1981. Nous avons procédé au recomptage et il a été prouvé par les documents, en dehors des aveux et des témoignages, que les élections avaient été falsifiées. L'opposition y avait recueilli des résultats pouvant atteindre 50% des voix.

Interview conduite par Zine Elabidine Hamda


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