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L'enclume et le marteau
Angles Déficit budgétaire et lutte contre les inégalités
Publié dans Le Temps le 11 - 09 - 2012

En période de crise ou carrément de récession tout gouvernement est amené à arbitrer entre l'ajustement de son budget en fonction de ses recettes et la lutte contre la montée des inégalités pour préserver sa cohésion sociale.
En effet, c'est en période de récession que les déficits budgétaires apparaissent à cause d'une réduction des recettes fiscales ou d'un ralentissement de leur augmentation, tandis qu'en même temps les dépenses, notamment à caractère social, ont tendance à augmenter. Cet effet de ciseau peut conduire à l'aggravation du déficit budgétaire. Un déficit qui pourrait, éventuellement, contribuer à soutenir la demande et la croissance économique ? L'intervention de l'Etat se heurte donc à la contrainte budgétaire! D'où la question centrale : Est-il souhaitable, opportun, au nom de la lutte contre les inégalités, de creuser davantage le déficit budgétaire ? Telle est la problématique que nous nous proposons d'analyser dans cette contribution.
Mais avant d'entrer dans le vif du sujet et d'interroger donc la théorie et l'histoire économique des nations en la matière, plus précisément le courant keynésien et le courant ultralibéral ainsi que la question de la soutenabilité de la dette, je souhaite, dans un volet introductif, définir les deux concepts clés de notre sujet, à savoir : Budget et Inégalités. Ainsi, les lectrices et les lecteurs pourront mieux en saisir toutes les difficultés, les complexités et les subtilités. Nous verrons, dans une troisième et dernière partie, Comment faire, alors, de l'égalité une réalité et comment la financer dans le cas de la Tunisie ?

Budget et inégalités : Deux concepts à éclairer

1 - Le budget de l'Etat: de quoi parle-t-on ?

Le budget de l'Etat est un document retraçant l'ensemble des recettes et des dépenses de l'Etat pour une année civile (du 1er janvier au 31 décembre). Le budget de l'Etat, avant qu'il ne reçoive le nom de « loi de finance », est préparé par le gouvernement et voté par le parlement :

- Les recettes, ou ressources, du budget de l'Etat proviennent surtout de la fiscalité, c'est-à-dire des impôts et taxes directs et indirects payés par les contribuables. En Tunisie, cette ressource de financement représente 66% du total des recettes de l'Etat en 2011, soit près de 12,6 milliards de dinars. Le reste étant financé par des recettes provenant des domaines de l'Etat (9%), des emprunts (19%), des privatisations (2,5%) et des fonds spéciaux (3,5%).

- Les dépenses de l'Etat sont aussi appelées charges budgétaires ou dépenses publiques. On distingue généralement les dépenses publiques ordinaires (rémunérations des fonctionnaires, aides à l'emploi,...) qui sont de l'ordre de 56% du total des dépenses, soit près de 10,7 milliards de dinars et les dépenses publiques en investissement, qui sont un peu plus de 4 milliards, soit 21%. On peut rajouter les dépenses suivantes : remboursement du principal de la dette (12%), paiement des intérêts de la dette (7%) et dépenses des fonds spéciaux (4%).

Pour tout budget, l'égalité des recettes et des dépenses correspond à un équilibre. Dans le cas ou les recettes sont supérieures aux dépenses, on parlera de solde budgétaire positif (excédentaire), dans le cas contraire on parlera de solde négatif c'est-à-dire déficitaire. Dans ce cas de figure, l'Etat serait amené à contracter des emprunts (obligations d'Etat, bons de trésor) pour financer le déficit public et/ou d'augmenter le taux des prélèvements obligatoires (cotisations sociales, impôts et certaines taxes). Avec la première solution, l'emprunt alimente la dette publique, qu'il faut ensuite rembourser et pour laquelle il faut supporter des frais financiers qui pèsent en retour sur le budget et les générations futures ; avec la seconde, l'activité économique peut être ralentie -Nous y reviendrons-.

2 - Les inégalités : un phénomène multidimensionnel et cumulatif

Les inégalités de revenu disponible (revenu du travail + revenu du patrimoine + revenu de transferts [aides de l'Etat] – impôts et cotisations sociales) engendrent des inégalités de patrimoine. Et inversement. De même, les inégalités de conditions de travail engendrent des inégalités face à la maladie et à la mort ; et, les inégalités face au logement contribuent aux inégalités face à la santé et à l'école. Pire encore, les inégalités de situation socioéconomique et socioprofessionnelle des parents provoquent chez leurs enfants des dispositions et des capacités diverses face à la formation scolaire. Celles-ci se traduiront par des résultats scolaires inégaux, débouchant ainsi sur des qualifications professionnelles inégales et des insertions inégales dans la division du travail.

En fait, les inégalités forment un processus cumulatif : les privilèges s'accumulent et les handicaps se multiplient. Et, elles tendent à se reproduire dans le cours des générations. Le creusement des inégalités affaiblit le lien social et peut déboucher sur un niveau d'instabilité des institutions publiques qui rend le futur très incertain. Les agents économiques, qui doivent planifier leurs actions sur le long terme, éprouvent une aversion pour l'incertitude, par conséquent, ils restreignent leur investissement. La lutte contre les inégalités est donc nécessité absolue à la fois sur le plan humain, pour assurer la cohésion sociale et libérer l'homme du besoin, mais aussi économique, pour soutenir la croissance et le maintien de la stabilité des institutions !

Que dit la théorie économique et l'histoire des nations ?

2 D'après l'analyse keynésienne, financer aujourd'hui les dépenses publiques destinées à faire face au sous-emploi ou au besoin d'infrastructures par l'endettement est susceptible de créer, demain, une situation meilleure ; de surcroît, l'amélioration de l'emploi et infrastructures nouvelles permettrait d'accroître mécaniquement des recettes publiques et donc de financer a posteriori les dépenses initiales. En clair, l'Etat peut recourir à un déficit budgétaire. Il accroît ses dépenses sans augmenter ses recettes. Il pallie partiellement l'insuffisance des investissements privés en investissant lui-même. Le déficit est ponctuel, il doit être couvert ex post par le surcroît de recettes que la croissance, qu'il aura contribué à relancer, doit assurer.

Selon le multiplicateur keynésien, l'accroissement autonome des dépenses budgétaires, sans que les recettes ne s'accroissent, induit une augmentation plus que proportionnelle de la production nationale. L'accroissement des dépenses budgétaires accroît également la demande, qui accroît la production. Cela induit une distribution de revenus supplémentaires qui, utilisés à raison de la propension marginale à consommer (la part supplémentaire, en pourcentage du revenu, consacrée aux dépenses de consommation), donnent lieu à une production supplémentaire, etc.

En outre, la redistribution favorise la croissance de la demande, en augmentant les bas revenus qui ont la plus forte propension à consommer et en réduisant les hauts revenus dont la propension à épargner (la part supplémentaire, en pourcentage du revenu, consacrée à l'épargne) et la plus élevée.

La politique libérale préconise la rigueur budgétaire :

Les libéraux considèrent que l'emprunt public comme étant injuste car l'emprunt d'aujourd'hui sera remboursé demain : la charge des déficits publics actuels est reportée donc sur les générations futures.

De plus, d'après ce courant de pensée, en économie ouverte l'effet multiplicateur annoncé par Keynes est réduit, en raison d'une plus grande contrainte extérieure. Ainsi, un solde budgétaire déficitaire risque de détériorer la balance commerciale :

- Si l'offre ne s'adopte pas à l'accroissement de la demande, à cause d'anticipations des producteurs à la récession, ou au taux d'utilisation des capacités de production proche de la saturation, cela relance l'inflation, non la croissance.

- Un effet d'éviction se produit pour financer le déficit, car l'Etat draine de l'épargne qui est évincée du financement de l'économie privée.

- Le recours au crédit, pour financer le déficit, entraîne un surcroît d'inflation par le mécanisme de la création monétaire.

- La hausse de la dette publique induit une hausse de la demande de capitaux, ce qui favorise la hausse des taux d'intérêt. La dette subit alors un effet « boule de neige » et la rentabilité économique des entreprises baisse.

Ils préconisent donc la suppression ou du moins la réduction du déficit budgétaire. Au même temps, ils pensent qu'au delà d'un certain seuil, le taux d'imposition a un effet dissuasif : il y a un risque réel d'évasion et de fraude fiscale ; il peut également provoquer une désincitation au travail. Ainsi, passé ce seuil, les recettes fiscales diminuent, comme le montre la courbe de Laffer. Il faut donc réduire la pression fiscale afin de relancer le travail et la production.

La dette publique et le risque de perte de souveraineté :

La dette des Etats peut constituer une menace pour la souveraineté. Si les emprunts contractés ne justifient pas un investissement rentable à moyen et long terme le risque d'une situation de surendettement est réel. De facto, les Etats se trouvent exposés à l'opinion des agences de notation et les emprunteurs exigeraient des primes de risque plus élevées. N'est-ce pas, hélas, notre situation?

Le risque de perte de souveraineté pour un Etat pourrait survenir lorsqu'il ne peut plus faire appel aux canaux classiques de financement. Il se trouve donc dans l'obligation de solliciter un soutien extérieur. Le FMI, à titre d'exemple, dont nous connaissons les conditions catastrophiques ou un pays tiers en échange de contreparties politiques. D'ailleurs, dans le cas de la Grèce, certains parlementaires allemands indélicats avaient même suggéré, récemment, qu'elle cède quelques-unes de ses îles pour alléger sa dette ! -vu l'engouement de certains de nos partenaires occidentaux pour l'île de Jerba...!-.

Autre exemple assez illustrant : celui de l'Egypte de 1875 dont la dette publique avait été multipliée par 33 fois en 10 ans et était devenue absolument « hors de contrôle ». Il fallait, en effet emprunter aux banques européennes pour financer des travaux d'infrastructures réalisés par des entreprises européennes. Mais aussi le train de vie excessivement coûteux, dispendieux, d'Ismaël pacha, le vice-roi d'Egypte. « Les Anglais et les Français, Riaz Akhoune et Vincent Lepage écrivirent, placèrent le pays sous tutelle en exerçant un contrôle dual : pendant plusieurs années, le ministre des finances de l'Egypte ne fut autre qu'un banquier anglais et le ministre des travaux publics, un banquier français, avant que le pays ne soit finalement directement placé sous protectorat en 1882 ». (in la revue Diplomatie, N°54, janvier-février 2012, P.13.). N'avons-nous pas subi le même procédé qui a abouti en 1881 à la même conclusion ?

En conclusion de ce volet théorique et historique, nous pouvons affirmer que dans un contexte de crise, la marge de manœuvre budgétaire est limitée, par conséquent la lutte contre les inégalités s'avère difficile pour ne pas dire importune ! Les recettes budgétaires sont rigides à la hausse alors que les dépenses budgétaires sont rigides à la baisse. De plus, une dette publique excessive et insoutenable risque de faire perdre à une nation sa propre souveraineté !

Par Dr Ezzeddine Ben Hamida : Professeur de sciences économiques et sociales
http://ezzeddine.ben.hamida.overblog.com


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