L'un était médecin, l'autre professeur de lettre ; le premier rêvait de l'abolition des inégalités socio-économiques et de l'exploitation du tiers monde par les deux superpuissances (les Etats-Unis et l'ex-URSS) pendant la guerre froide ; le second aspirait et aspire encore à l'émancipation des peuples, se battait et se bat encore inlassablement pour la dignité de ses concitoyens. Notre homme rêve aussi de justice sociale. Le 9 octobre 1967, à La Higuera (en Bolivie), Ernesto "Che" Guevara fut exécuté sommairement par l'armée bolivienne sur ordre de la CIA. En 1974, Hamma Hammami est condamné à huit ans et demi de prison pour son militantisme, son combat et ses idées. Torturé et martyrisé, il est libéré six ans plus tard grâce aux multiples interventions d'Amnesty International. Affecté physiquement par les supplices que les autorités de l'époque lui ont infligés, il est envoyé en France aux frais de l'Etat tunisien pour y être soigné.
Notre "Che" national est arrêté à nouveau le 14 janvier 1994 à Sousse. Il est rejugé et condamné à près de 6 ans de prison. Son corps porte, hélas, à jamais les séquelles des tortures subies. Inutile de s'attarder davantage sur son combat : Sa lutte, sa détermination et son opiniâtreté sont connues et saluées de toutes et de tous. Hamma le "Che" !
Mais en fait, quel est son programme économique ? Et, comment compte-t-il réduire les inégalités criantes et patentes qui frappent notre société ? Son mouvement dispose-t-il des moyens financiers nécessaires, indispensables, pour mener à bien sa campagne électorale ? Quelle est sa stratégie de communication ? Aussi, le Che a-t-il une équipe compétente, contrairement au CPR, capable de lui façonner un véritable programme économique ; un programme structuré (analyse sectorielle, régionale, ...) et cohérent (équilibre budgétaire, politique fiscale, etc.) ? Ou encore, ses compagnons de combat sont-ils en mesure de lui préparer un vrai programme politique mais aussi social et culturel, un programme digne de ce nom ?
Autre chose et pas la moindre, Hamma a-t-il des soutiens sûrs auprès des médias (presse, télévision et radio) ? Dans le négatif, n'est-il pas urgent de remédier à une telle défaillance de communication ? Le front populaire ne devrait-il pas aussi songer sérieusement à tisser des liens solides avec certains intellectuels, artistes et vedettes sportives nationales et locales ? Madame Radhia Nasraoui pourra-t-elle faire consensus auprès des figures féministes emblématiques en Tunisie ?
Il est urgent aussi que monsieur Hammami mette en place une stratégie de communication avec les capitales européennes et arabes pour tisser des liens forts avec les leaders politiques et les figures de gauche de ces pays. Se forger une image et une crédibilité à l'extérieur ne fait que renforcer et consolider la position du parti à l'intérieur ! Notre Che bénéficie incontestablement aujourd'hui d'un élan de sympathie sans précédent, à l'image d'ailleurs du Président Moncef Marzouki lors des précédentes élections. Hamma saurait-il traduire cet élan en voix et donc en sièges au sein de la future Assemblée Nationale ? L'argentin est devenu une icône pour tous les mouvements révolutionnaires du monde entier. Notre Tunisien pourrait-il faire de même auprès des mouvements révolutionnaires arabes ? L'avenir nous le dira ! En revanche, ce qui est certain : la persévérance, l'obstination, la constance dans le travail et l'acharnement finissent toujours par payer !