«Le remaniement ministériel serait annoncé le 20 janvier. Cela a pris du temps parce que la décision n'est pas unilatérale mais elle doit faire participer plusieurs parties.» déclare Rached Gahnnouchi. «Ennahdha n'a pas de milices. Il n'a pas besoin d'en avoir puisqu'il a été élu par le peuple...Ennahdha gère le ministère de l'Intérieur. » «Il y a un gouvernement profond, un gouvernement dissimulé qui cherche à faire reculer le pays en semant la zizanie et en imaginant les scénarios les plus sordides pour l'avenir du pays.» dit-il Il a fini par arriver. Rached Ghannouchi et son escorte de proches, s'est fait attendre, cette fois, une heure quarante minutes avant de faire son entrée dans la salle de la conférence là où des nahdhaouis et des invités entre amis et fauteurs en eaux troubles l'attendaient. Encore une fois le leader du parti Ennahdha ne décevra pas les journalistes et les quelques médias à l'affût de déclarations quelque peu tonitruantes ou d'une quelconque prise de position détonante. Il montrera du doigt ainsi les forces de la contre Révolution qui sèment la zizanie. Il répondra à ses détracteurs mais en assortissant son discours de modération, avec une teinte de démagogie... tellement nécessaire pour la base nahdhaouie. Consensus Les temps, en fait, étaient pour dresser le bilan pour en tirer les enseignements. Les journalistes qui ne se faisaient pas prier pour bombarder leur interlocuteur de questions, lui ont demandé son avis sur des questions liées à l'actualité. L'impunité a été relevée par Ghannouchi, dans la foulée, comme une lacune à combler, tâche qui incombe au ministère des droits de l'Homme et de la transition démocratique. Il considère ainsi « le jugement des corrompus qui circulent sous nos cieux en toute impunité comme relevant des priorités du gouvernement cette année ». Et les réalisations du gouvernement dites-vous ? « La liberté d'expression » répondra Ghannouchi sans même prendre le temps de réfléchir. « Aujourd'hui tout un chacun a la liberté de parler. Mais la liberté est une arme à double tranchant. C'est dans ce contexte que j'ai parlé de mobilité sociale et non pas de lutte sociale qui permet d'instaurer un climat social émulatif. La liberté non responsable peut entraîner soit le chaos soit la ‘'somalisation'' du pays. » dit-il avant de peaufiner l'idée en avançant « Il y a un gouvernement profond, un gouvernement dissimulé qui cherche à faire reculer le pays en semant la zizanie et en imaginant les scénarios les plus sordides pour l'avenir du pays. » Il explique, dans ce sens que son parti n'a pas de milices et qu'il ne compte pas en avoir « Ennahdha n'a pas de milices. Il n'a pas besoin d'en avoir puisqu'il a été élu par le peuple...Ennahdha gère le ministère de l'Intérieur. » dit le leader d'Ennahdha, ...de tout sourire. Cela amène le chef nahdhaoui à évoquer le rôle des militaires dans cette phase de transition démocratique « Les militaires devraient retourner dans leurs casernes. Ils ne sont pas censés intervenir un peu partout. » dit-il avant de se rattraper en envoyant un clin d'œil aux militaires « Les militaires ont pu prendre d'assaut le pays le 14 janvier. Ils avaient la possibilité de le faire. Nos militaires sont responsables. » Démocratie Consensus, démocratie participative, dialogue national : termes que Rached Ghannouchi a répétés le long de sa communication où il était appelé à parler autour de la thématique « Les islamistes et le choix des modes de gouvernance». Pour y répondre Rached Ghannouchi dira « Les islamistes n'ont pas d'autre choix que celui de la démocratie pour laquelle a opté le peuple tunisien. Et si les islamistes sont aujourd'hui au pouvoir, ce n'est autre que la concrétisation du projet de la modernisation de la Tunisie, chose qui a commencé avec les mouvements de réforme nationale datant du 19ème siècle. Chose qui a été étouffée par le projet colonial consacré par la suite par le Bourguibisme. » Toujours selon Ghannouchi le projet colonial de « dénaturalisation de l'identité arabo-musulmane du tunisien » n'a pas pris fin même après l'indépendance. Le leader islamiste croit dur comme fer que c'est la cause directe qui a fait approfondir le fossé entre l'Etat et le peuple. « Le peuple tunisien a l'islam au plus profond de son âme. Les politiques ont voulu le départir de cette part de lui-même. Aujourd'hui le Tunisien s'est réconcilié avec son identité. L'Islam redevient un dénominateur commun entre nous tous. Reste à savoir de quel Islam nous voulons. » dit-il en insistant sur le fait que cela relève de la tâche de l'élite intellectuelle qui doit faire fi des tiraillements idéologiques. « Personne n'a le droit de s'improviser porte-parole du ciel pour imposer un mode de vie et de comportement aux Tunisiens qui peuvent s'habiller ou s'alimenter comme ils l'entendent. L'Etat, par ailleurs, n'a pas le droit d'imposer une vision de l'Islam. L'Etat doit assurer la sécurité du peuple et administrer des services. » continue Ghannouchi. Dialogue national S'agissant de la loi de « l'immunisation de la Révolution » Rached Ghannouchi déclare que son parti ne compte en aucun cas exclure d'autres partis même si, de par le passé, « Les nahdhaouis étaient victimes d'exclusion. Nous sommes pour le dialogue national avec toutes les formations politiques.» Il expliquera, par ailleurs, que cette loi relève des prérogatives de l'ANC. Avant d'y arriver le remaniement ministériel aurait été annoncé «Le remaniement ministériel serait annoncé le 20 janvier. Cela a pris du temps parce que la décision n'est pas unilatérale mais elle doit faire participer plusieurs parties. » déclare Ghannouchi. Et puis pour finir. Le cheikh n'oubliera pas les moins nantis de son parti. Cheikh Ghannouchi s'approchera de l'assistance pour écouter leurs doléances voire pour s'asseoir à leur côté. Un nahdhaoui, Othmane Metoui se dit le frère d'un islamiste ayant tiré sa révérence sous le joug de la torture. Rached Ghannouchi le salue tout en reconnaissant le militantisme de la famille en question. Pas de porte-feuille ministériel pour le frère du militant. Dommage. Il y a aussi cette femme qui approche ‘'le Cheikh'' pour lui rappeler qu'elle a choisi Ennahdha après l'avoir regardé sur une chaîne de télévision du temps de l'ancien régime. Entre temps le club des fans par écrans interposés s'est agrandi certainement. Le Cheikh a en effet plusieurs chaînes de télévision à sa disposition. Ce n'est certainement pas ‘'Ilam Al Ar''( la presse de la honte).