L'an deux de la révolution a été marqué par une tension apparente et des provocations gratuites et malvenues. Pourtant les Tunisiens avaient de quoi être fiers à l'occasion du second anniversaire de la chute de l'ancien régime. Mais quand des énergumènes s'en mêlent le dérapage est inévitable. Ce 14 janvier 2013 a vu déferler sur la capitale une foule immense venue de tous les coins du pays, les uns pour fêter l'événement, les autres pour le célébrer et une troisième catégorie pour semer le trouble. C'était cette image là qu'avait donnée Tunis lundi 14 janvier où la tension était perceptible sur les visages de manifestants qui avaient sillonné les artères principales de la ville. Une tension décelée aussi à travers les slogans, et les banderoles brandies par la plupart des partis, ceux de l'opposition bien sûr – qui déplorent le manque de discernement et la non tenue des promesses faites par les partis au pouvoir. Les manifestations qui avaient drainé des dizaines de milliers de participants, côté Nida Tounes mais aussi côté front populaire, Al Joumhouri et Al Massar étaient toutes porteuses de messages à l'adresse du pouvoir. Des messages clamés à haute voix et écrits rouge sur blanc où l'on décèle le malaise voire le mécontentement quant à la précarité sociale, le coût de la vie le chômage des jeunes la marginalisation de pans entiers de la société, la mal vie en un mot. C'était le thème qu'on retrouve sur toutes les langues et dans toutes les discussions. Le malaise était on ne peut plus palpable parmi la population descendue dans les rues. Autres préoccupations non moins importantes et qui étaient du menu de ce jour avaient trait à la lenteur de la rédaction de la constitution, les retards qui bloquent la mise en place des institutions et instances qui auront la charge des élections, de l'information et de la justice. Par ailleurs les appréhensions sur la liberté de l'information et de l'indépendance de la justice, intimement liés au processus démocratique étaient toutes présentes dans une rue hyper politisée et au fait de tout ce qui se trame derrière les murs. Pour l'observateur avisé, le bilan des deux années de révolution était là dans la rue. Et il n'avait pas besoin d'aller au-delà de cette rue pour chercher la réalité. La voix du peuple couvre toutes les déclarations, les affirmations, les démentis et les statiques des officiels. Elle est celle du vécu quotidien et de la crainte du lendemain. C'est un avertissement on ne peut plus clair auquel les pouvoirs publics doivent prêter toute l'attention pour prospecter les meilleurs moyens afin d'éviter à la situation d'empirer davantage d'autant que la tension a atteint le seuil de l'intolérable avec les affrontements sporadiques mais révélateurs et qui font qu'il est de plus en plus difficile de rapprocher les Tunisiens les uns des autres, tellement les clivages politiques et idéologiques sont grands, avec en prime l'usage de la violence devenu un moyen d'intimidation et de persuasion pour ceux qui se sont arrogés le droit de défendre la révolution. Et ils n'ont pas manqué l'occasion de le prouver une fois de plus ce 14 janvier 2013. Il étaient certes peu nombreux, mais ils étaient là et ont tout essayé pour entraîner les autres sur leur terrain préféré. Que d'enseignements nous a rapporté cette journée qui fera sans doute référence pour que l'on prenne les mesures qui s'imposent afin de revoir le processus suivi jusque là et dont les conséquences seront fatales à notre pays. Le temps n'est plus à l'attente il est plutôt à l'action.