La mémoire du temps présent retiendra à coup sûr le combat valeureux fervent et chevaleresque des femmes tunisiennes avant et après la Révolution du 14 janvier. Ce sont peut-être elles qui ont donné légitimement ce surnom admirable de la « Révolution du Jasmin » que les médias du monde entier ont repris pour réaffirmer d'abord la douceur de la nature tunisienne mais aussi le pacifisme et la modération de notre peuple, dans son combat pour la liberté. Combat contre la dictature totalitaire mais aussi contre le népotisme et l'appropriation de l'Etat par une caste et pour la démocratie aux normes universelles, seule garante du non-retour au passé récent et à la confiscation de la Tunisie par un parti, un homme ou une secte. Ces « Marianne » tunisiennes, véritables gardiennes du Temple Tunisie, celle de Carthage en passant par Kairouan, celle d'une culture millénaire née de l'adaptation de notre peuple à tous les apports même « amers » des invasions espagnole, turque ou française, sont aujourd'hui, à la pointe du combat contre l'occupation rampante de l'obscurantisme religieux véhiculé par ces prédicateurs de malheur qui nous viennent d'Orient et qui veulent rayer la Tunisie de la carte de la modernité. Cette modernité, que toute l'Arabie nous envie parce qu'elle a réussi le miracle d'adapter l'Islam à la science, à l'innovation, aux technologies du siècle, en un mot à la liberté d'être et de paraître et de vivre son temps et son siècle comme toutes les nations qui comptent dans ce monde. Nos Mariannes têtues et décidées comme ces chevaux de race ne baissent pas la garde et ne semblent nullement impressionnées par ces « gardiens » des milices de l'obscurantisme armés jusqu'aux dents dans l'impunité totale faisant fi de toutes les lois et mettant en cause l'existence même de l'Etat seul détenteur légitime de la puissance publique. J'ai écouté rien qu'avant-hier Madame Maya Jribi, secrétaire générale du Parti républicain à la radio défier ces hors la loi alors qu'elle était menacée très sérieusement d'agression, la nième... parce qu'elle défend un autre idéal que le leur pour la Tunisie. La Tunisie à elle, c'est la liberté et la justice sociale éclairées et codifiées par des institutions autonomes et différenciées avec une séparation effective et une spécialisation au niveau des vocations et des tâches de gouvernement. La confusion des pouvoirs a été jusque-là, la maladie endémique de notre système politique. Et dire que tous les politiciens l'affirment mais seulement quand ils ne sont pas au pouvoir. Là tout change et chassez le naturel il revient au galop. Toutes les manœuvres deviennent acceptables et « naturelles » pour conserver les vieux réflexes, les mêmes méthodes pour se réapproprier l'Etat et ses institutions. Mme Jribi a donné une petite leçon magistrale à ce jeune politicien au débat télévisé de 21H, mais à travers lui à tous les opportunistes bien pressés de récolter les dividendes de leur allégeance politique avant d'avoir prouvé quoi que ce soit ! L'humilité c'est aussi une caractéristique des grands et Mme Jribi en a à en revendre, elle qui a subi les plus grandes vexations du temps où elle arpentait, vallées et collines, villes et villages pour défier Ben Ali et son système répressif, et distribuait son journal « El Maoukef » au nez, mais sans la barbe à l'époque des « barbouzes » de l'ancien régime. En quelques mots, Maya Jribi, c'est la détermination et la classe... mais aussi notre honneur d'hommes et de femmes libres qui refusent à nouveau l'esclavage des prédicateurs de l'obscurantisme ! Par : Khaled Guezmir (A suivre)
Biographie de Maya Jribi Son père est originaire de Tataouine et sa mère est algérienne. Jribi suit ses études à Radès où elle a habité puis, de 1979 à 1983, à la faculté des sciences de Sfax, où elle milite au sein de l'Union Générale des Etudiants de Tunisie, elle adhère à la section sfaxienne de la Ligue Tunisienne des Droits de l'Homme au début des années 1980. Elle collabore également à l'hebdomadaire indépendant Erraï (l'Opinion), puis à Al Mawkif. Au début des années 1980, elle devient membre du groupe d'études sur la condition féminine du Club culturel Tahar Haddad et participe à l'Association tunisienne de lutte contre le cancer. Elle fonde également avec d'autres l'Association de recherches sur les femmes et le développement. Elle dira plus tard : « J'ai participé à des activités sociales souvent informelles et à la mise en place des projets à caractère social comme celui d'aide aux femmes démunies de Mellassine ». De retour à Tunis en 1983, elle participe à la création du Rassemblement socialiste progressiste (RSP) fondé cette même année par l'avocat Ahmed Néjib Chebbi, le RSP est devenu en 2001, le Parti Démocrate Progressiste (PDP), l'un des principaux partis de l'opposition tunisienne. En 1986, elle devient l'une des rares femmes membres du bureau politique du parti. Elle est élue, le 25 décembre 2006, à la tête du PDP, succédant ainsi à Chebbi qu'elle présente comme son « compagnon de route ». Elle devient ainsi la première femme à diriger un parti politique tunisien et la deuxième au Maghreb à la tête d'un parti composé majoritairement d'hommes, après l'Algérienne Louisa Hanoune. Jribi et Chebbi suivent du 1er octobre au 20 octobre 2007 une grève de la faim pour protester contre la décision judiciaire prise le 1er octobre d'expulser leur parti des locaux qu'il occupe au centre de Tunis. Le 23 octobre 2011, elle est élue membre de l'assemblée constituante dans la circonscription de Ben Arous. Elle présente sa candidature pour le poste de président de l'assemblée constituante, le 22 novembre et obtient 68 voix contre 145 à Mustapha Ben Jaafar qui est élu. Suite à l'annonce de la fusion du Parti démocrate progressiste, avec notamment Afek Touès et le Parti Républicain, elle est élue, le 9 avril 2012, comme secrétaire générale de la nouvelle formation dénommée « Parti républicain » lors du cinquième et dernier congrès du PDP. Elle signe l'alliance avec Nidaa Tounès et Al Massar aux côtés de MM Béji Caïd Essebsi et Ahmed Ibrahim fin janvier 2013, pour « l'Union pour la Tunisie ». Quelle carrière déjà ! Nous lui souhaitons plein succés à l'avenir.