Une “fatwa constitutionnelle" de Yadh Ben Achour a encouragé Jebali à maintenir sa proposition Le Premier ministre Hamadi Jebali, a déclaré vendredi soir qu'il s'en tenait à sa décision de former un gouvernement de technocrates apolitiques, tout en indiquant que la composition de ce cabinet est quasiment prête. Cette décision continue, cependant, à diviser la classe politique. Elle a été saluée par l'oposition et la majeure partie de la société qui y voient une “chance de sortir le pays de l'ornière". La Troïka au pouvoir, composé du mouvement islamiste Ennahdha, du Congrès pour la République (CPR) et du Forum Démocratique est , en revanche, divisée à ce sujet. Ettakatol appuie la décision du Chef de gouvernement qui constitue à ses yeux “l'unique solution" qui permettra au pays de sortir de la crise politique ouverte. “Nous nous attendons à ce que nos partenaires au sein de la Troïka réagissent positivement à la proposition de Hamadi Jebali. Nous souhaitons que le mouvement Ennahdha fasse preuve de sagesse et de raison pour appuyer cette proposition salvatrice", affirmé Jalel Bouzid, membre du Bureau politique d'Ettakatol. Et d'ajouter : “les tiraillements politiques ont été à l'origine de la crise politique actuelle. Le fait de constituer un gouvernement apolitique constitue l'unique solution". Gouvernement de coalition Le mouvement Ennahdha semble encore divisé. Le président du Bureau exécutif du parti islamiste, Ameur Laârayedh a indiqué, hier, que son mouvement mène des concertations au sujet de la constitution d'un gouvernement de compétence et que la position finale sera annoncée d'ici deux jours. Le président du Conseil de la de la Choura d'Ennahdha, Fethi Ayadi, a , quant à lui, noté que les instances dirigeantes du parti n'approuvent pas l'idée d'un gouvernement de technocrates. “Le projet d'un gouvernement constitué de technocrates n'engage que Hamadi Jebali et Ennahdha n'en est pas concerné», a-t-il déclaré. Selon M. Ayadi, qui apprécie “respecte le sens patriotique de Hamadi Jebali", Ennahdha prône un gouvernement de coalition."Les membres du Conseil de la Choura sont en train de discuter avec divers partis pour annoncer le gouvernement de coalition qui serait la meilleure décision en cette période", a-t-il fait savoir. Démission probable de ministres Le CPR refuse, pour sa part, le principe de la constitution d'un gouvernement de technocrates. Son secrétaire général, Mohamed Abbou, a considéré la proposition de Chef du gouvernement comme étant une “décision unilatérale". De son côté, le ministre des domaines de l'Etat et dirigeant du CPR, Slim Ben H'midane, a précisé que son parti plaide pour la constitution d'un gouvernement d'union nationale qui peut être agrémenté de quelques compétences dans les ministères techniques. Le parti fondé par l'actuel président de la République Moncef Marzouki a aussi menacé de retirer ses ministres du gouvernement Jebali au cas où les négociations menées sur le remaniement n'aboutissent pas à un accord , et ce conformément à un ultimatum lancé le 2 février. La présidence de la république avait rappelé jeudi que tout changement de pouvoir devait passer par l'Assemblée constituante contrairement à ce qu'a annoncé le Premier ministre. «Fatwa Constitutionnelle» A noter que la décision de Hamadi Jebali de maintenir son idée de gouvernement de technocrates et de s'opposer ainsi directement à son parti est motivée par une “fatwa constitutionnelle" édictée par le juriste Yadh Ben Achour. Ce dernier considère que M Jebali, qui a été chargé de former en décembre 2011 son gouvernement et qui a donc obtenu l'investiture de l'Assemblée, peut selon l'article 17 de la loi loi provisoire de l'organisation des pouvoirs publics, “faire les modifications au niveau des ministères et ce après délibération avec le Président de la République". Cette loi est devenue objet à plusieurs lectures par les juristes, notamment pour les experts en Droit constitutionnel. Par exemple, Sadok Belaïd, ancien Doyen de la faculté de Droit et des Sciences politiques de Tunis, a déclaré le lendemain de l'allocution de M.Jebali que si le remaniement partiel relève des compétences du Chef du gouvernement, la formation d'un nouveau Gouvernement relève des prérogatives de l'Assemblée Nationale Constituante. M. Belaïd ajoute que dans le cas de la formation d'un nouveau Gouvernement, Hamadi Jebali devra lui-même démissionner de ses fonctions.