S'achemine-t-on vers une Troïka bis ? Décidément, le feuilleton du remaniement ministériel, n'a pas l'air de finir. A l'origine on prévoyait un élargissement de la base politique du prochain gouvernement en y intégrant d'autres forces politiques en plus de la Troïka. Toutefois, à la veille de la date fatidique du dernier délai de la formation de ce gouvernement, les nouvelles forces comme l'Alliance Démocratique, le groupe Liberté et Dignité, Wafa viennent d'annoncer leur retrait. Même Ettakatol, pourrait se retirer de la Troïka, quoique chose très difficile à réaliser selon plusieurs observateurs. Pourquoi ce retrait ? Mohamed Bennour porte-parole d'Ettakatol, affirme au Temps que le « retrait de l'Alliance Démocratique est un mauvais signe ». Les trois partis de la coalition gouvernementale (Ennahdha, Ettakatol, CPR) se sont réunis, hier après-midi au palais Dar Dhiafa de Carthage avec le chef du gouvernement désigné, Ali Laârayedh, pour les dernières négociations sur la formation du gouvernement. Mouldi Riahi, un des trois représentants d'Ettakatol, avait affirmé à son entrée que le parti ne lâchera prise au sujet des noms proposés pour les ministères de l'Intérieur et de la Justice. Elyes Fakhfakh avait abondé dans le même sens. La neutralité effective de ces deux ministères est une ligne rouge. Le Congrès pour la République a délégué Aziz Krichène, Imed Daïmi et Tarak Kahlaoui. Mohamed Ben Salem et Noureddine Bhiri représentent le Mouvement Ennahdha. Il faut dire que les positions d'Ettakatol et de l'Alliance Démocratique étaient très proches. Mehdi Ben Gharbia, dirigeant à l'Alliance Démocratique a rappelé, hier sur les ondes de MosaïqueFM, que son parti avait avancé six points pour participer au prochain Gouvernement. Les priorités sont la sécurité...Le gouvernement doit se donner une date limite pour ses travaux, à savoir le 31 décembre, ce qui incitera l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) à accélérer ses travaux. Les milices doivent être absolument dissoutes. La décision du gel des activités des Ligues de protection de la Révolution représente un pas en avant. Il faut aller plus loin. Les nominations dans les instances décisives de l'administration (Gouverneurs, délégués, PDG...) doivent être revues. Un mécanisme pour leur réexamen doit être mis en place. Les ministères de souveraineté doivent être réellement neutres. Enfin, la composition du Gouvernement ne doit pas être basée sur les quotes-parts partisans. « Au début des négociations, il y avait des réactions positives. Par la suite les positions se sont endurcies. Concernant la violence on a essayé de diluer le problème. A propos des nominations, il n'y a pas eu accord pour mettre en place un mécanisme clair pour leur révision. Les noms proposés par Ennahdha et le CPR pour le ministère de l'Intérieur et le ministère de la Justice sont des personnalités proches et connues pour leur sympathie pour Ennahdha. On ne peut donc parler de neutralité concrète. Pourtant, le pays regorge de compétences qui n'appartiennent à aucun parti », affirme Mehdi Ben Gharbia. Il ajoute que leur parti avait proposé d'autres noms pour diriger le ministère de la Justice comme Chawki Tabib, Kalthoum Kennou, Abdejlil Bouraoui, Ghazi Jéribi, Ahmed Adhoum, en vain. Ennahdha n'est pas prête à céder sur ses candidats à l'Intérieur et à la Justice, ce qui montre qu'elle ne veut pas d'une réelle indépendance pour ces départements. L'Alliance Démocratique après avoir épuisé toutes ses cartouches à faire infléchir les représentants d'Ennahdha, se retire définitivement du prochain Gouvernement. Mehdi Ben Gharbia pense que le prochain gouvernement sera plus faible que le précédent. «Il y a un acharnement à garder sous la main les ministères de l'Intérieur et de la Justice ainsi que les postes clef dans l'Etat sans lutter de façon efficace contre la violence», déplore le dirigeant de l'Alliance Démocratique. Mohamed Tahar Ilahi, président du groupe Liberté et Dignité, précise que le retrait de leur groupe des négociations est définitif. Son groupe est favorable au contenu du document politique préparé comme plate-forme pour le prochain Gouvernement. Il a annoncé qu'officiellement, son groupe ne participera pas à ce gouvernement cela n'empêche qu'il laisse aux membres du groupe tout le loisir de l'intégrer à titre individuel. Par contre, il se désole de l'attachement de la Troïka à certains portefeuilles et sa tendance à traiter les nouveaux partenaires comme des acteurs de décor, voire de vitrine. Le groupe Wafa dirigé par Abderraouf Ayadi avait déjà annoncé son retrait des négociations. Il est franchement opposé à la neutralité des ministères régaliens. Si le dernier round entre les trois composantes de la Troïka n'aboutit pas à des résultats probants, Moncef Marzouki, sera appelé à agir conformément à l'article 19, en reprenant les négociations pour un autre délai de 15 jours. Il pourra reconduire Ali Laârayedh, comme il pourra proposer une autre personnalité. Réussira-t-on à éviter pareilles prolongations ?