Mehrezia Laâbidi, première vice-présidente de l'Assemblée nationale constituante, reconnaît une «crise de confiance» entre le pouvoir et l'opposition Une quatrième réunion s'est tenue hier soir entre Rached Ghannouchi et Houcine Abbassi : l'ultime espoir de sortie de crise ? L'opposition a rejeté, hier, le lancement d'un dialogue avec Ennahdha qui dirige le gouvernement car elle pose toujours comme préalable la démission de l'actuel gouvernement. «Toute négociation sans dissolution du gouvernement serait une perte de temps», a déclaré le secrétaire général de Nida Tounes (L'Appel de la Tunisie), Taïeb Baccouche, à l'issue d'une recontre avec le secrétaire général de l'Union générale Tunisienne du Travail (UGTT), Houcine Abbassi qui a transmis à des représentants de l'opposition les scénarios proposés par Ennahdha pour sortir de la crise. L'opposition regroupée au sein du Front de salut national (FSN), une coalition rassemble des partis de l'extrême gauche comme le Parti des travailleurs et des centres-droit, dont Nida Tounes et le Parti Républicain, a ainsi rejeté les propositions de sortie de crise d'Ennahdha. Le parti au pouvoir avait fait, jeudi, un pas vers la mise en place d'un gouvernement apolitique. Après une nouvelle séance de pourparlers avec le secrétaire général de la centrale syndicale qui joue le rôle de médiateur entre le pouvoir et l'opposition, le leader d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, avait indiqué que son mouvement accepte la proposition de l'UGTT comme point de départ du dialogue national. «Double langage» L'initiative de sortie de crise formulée par l'UGTT le 30 juillet prévoit notamment la mise en place d'un gouvernement apolitique, le maintien de l'Assemblée nationale constituante (ANC) et la mise en place d'un calendrier strict d'adoption de la Constitution ainsi que des dates pour les prochaines élections. M. Ghannouchi n'a pas, cependant, précisé si Ennahdha acceptait de façon claire la dissolution du gouvernement. D'autres dirigeants du parti, dont Abdellatif Mekki et Houcine Jaziri, ont, cependant, évoqué une possible démission de son gouvernement à l'issue de négociations. Djilani Hammami, un représentant du Front de salut national a qualifié de «double langage» la proposition des islamistes. Les nouvelles propositions d'Ennahdha n'ont pas été communiquées à la presse. Selon des sources proches de l'opposition, Rached Ghannouchi aurait accepté la formation d'un gouvernement de technocrates après le 23 octobre prochain, tout en exigeant que ce nouveau cabinet soit dirigé par un membre d'Ennahdha ou, du moins, par une personnalité qui «ne soit pas hostile à Ennahdha». Le leader du parti vainqueur des élections du 23 octobre 2011 aurait également consenti à réviser les nominations de responsables proches de son parti dans l'administration et la «dissolution par voie judiciaire» des ligues de protection de la Révolution. Crise de confiance D'autre part, le secrétaire général de l'UGTT a reçu hier le président de l'Assemblée nationale constituante, Mustapaha Ben Jaâfar. Rien n'a filtré sur le contenu de cette rencontre. D'autant plus que les deux hommes ont refusé de donner des déclarations à la presse. M. Ben Jaâfer, qui dirige le Forum Démocratique pour le Travail et les Libertés (FDTL/ ou Ettakatol), un parti allié du mouvement Ennahdha au sein du gouvernement s'était déclaré, dimanche, favorable à la formation d'un gouvernement apolitique, estimant que seul un gouvernement non-partisan pourra rassurer le peuple sur l'intégrité et la transparence des prochaines élections. Par ailleurs, Houcine Abbassi a tenu une rencontre avec les représentants de l'Union Tunisienne de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat (UTICA), de l'Ordre national des avocats et de la Ligue Tunisienne pour la défense des droits de l'Homme. Ces organisations de la société civile ont appelé, à l'issue de cette rencontre, Ennahdha à accepter de façon claire l'initiative lancée par l'UGTT, estimant que la situation économique dans le pays ne tolère des interminables palabres. Le marathon des concertations autour d'un plan de sortie de crise s'est poursuivi jusqu'à une heure tardive dans la soirée d'hier. Une quatrième réunion entre secrétaire général de la centrale syndicale et le chef d'Ennahdha a démarré vers le coup de 17 heures. Sur un autre plan, l'opposition devrait entamer aujourd'hui une « semaine du départ» pour tenter d'obtenir, par des manifestations pacifiques, le départ du gouvernement et la mise en place d'un cabinet apolitique. Le premier grand rassemblement est prévu aujourd'hui en fin d'après-midi face à l'Assemblée nationale constituante. Intervenant sur les ondes de la radio Shems FM, la première vice-présidente de l'Assemblée nationale constituante Mehrezia Laâbidi, a reconnu une «crise de confiance» entre le pouvoir et l'opposition qui ne peut être, selon elle, dépassée que par la voie du dialogue.