Après la conférence de presse tenue par le quartet parrainant le dialogue national, annonçant amèrement l'échec des tentatives essayant vainement de rapprocher des points de vue des différents acteurs de la vie politique durant 59 jours, pour sortir le pays de la crise dans laquelle il se débat depuis l'assassinat de Mohamed Brahmi, moult interrogations se posent. La porte laissée ouverte par Houcine Abbassi, sera-t-elle franchie par Ennahdha ? Les choses vont-elles se compliquer ? Lors de la conférence de presse tenue hier, Abdelhamid Jlassi, coordinateur d'Ennahdha, s'est interrogé qui est responsable de la lenteur des travaux de l'ANC ? Qui est responsable des problèmes budgétaires du pays, sinon ceux qui font des revendications excessives, bloquent les routes et empêchent la machine économique de fonctionner ? De son côté Ajmi Lourimi, rappelle qu'Ennahdha refuse la dictature de la minorité et de ceux qui sont peu représentés au sein de l'Assemblée Nationale Constituante. « Nous refusons l'exclusion, ni l'hégémonie des uns sur les autres. Il faut qu'il n'y ait ni vainqueur, ni vaincu », dit-il. Rafic Abdesslem, précise qu'il faut d'abord commencer par adopter la Constitution, maintenir l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) en exercice. La formation d'un nouveau Gouvernement présidé par une personnalité nationale indépendante se fera après l'achèvement des tâches constituantes, la fixation d'un rendez-vous clair et précis pour les prochaines élections. L'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) a tenu une réunion de sa commission administrative. Elle a conclu qu'elle optera pour des actions de masse. Des meetings, des marches seront organisés dans les régions en collaboration avec la société civile démocratique. Ils seront conclus par une marche pacifique nationale. La tension n'a fait que monter d'un cran. De son côté Nida Tounès a tenu son Conseil national, dimanche dernier. Le discours tenu n'atténue pas la hantise et la crainte du pire. La tension ne va pas baisser de si tôt. Béji Caïd Essebsi, président du parti lauréat attitré des sondages, a affirmé que la proposition du quartet est incomplète puisqu'elle n'intègre pas le départ de Moncef Marzouki, président provisoire. «Comme nous voulons le départ du Gouvernement et son remplacement par un Gouvernement indépendant, le président Marzouki ne puisse rester à son poste, puisqu'il fait partie du pouvoir exécutif. Comment peut-on parler de l'indépendance de l'exécutif, si le président garde son poste ? », dit-il. L'ancien premier ministre reproche à la Troïka son déficit de culture du dialogue. « Comment dans ce cas peut-elle continuer à gouverner si tout le monde est contre elle. Va-t-elle utiliser la chevrotine comme elle l'a fait à Siliana, ou les balles réelles comme l'avait fait Ben Ali ? Sans consensus, elle ne peut continuer. Toutefois, Ennahdha doit rester dans le paysage politique en traitant avec les autres », conclue-t-il. Par la même occasion, il n'a pas ménagé ceux qui se sont opposés à sa rencontre avec Rached Ghannouchi. Béji Caïd Essebsi, justifie la nécessité de cette rencontre par la situation catastrophique du pays. C'est lui-même qui a appelé Ghannouchi au dialogue dans une émission télé sur la chaîne Nessma. Ghannouchi a tenu à le voir. Ça s'est passé à Paris et les discussions étaient très franches. « Il n'y a pas eu de marché », rappelle-t-il. De son côté Taïeb Baccouche, secrétaire général de Nida, a rappelé que les partis politiques du Front National du Salut commenceront la mobilisation pour obliger le Gouvernement à partir. «Sa démission est devenue une revendication populaire», dit-il. Taïeb Baccouche refuse toute intervention de la part du président de la République. « Il n'a pas le droit de prendre la moindre initiative, puisqu'il a cessé d'être le président de tous les Tunisiens. Nous lui demandons de rester silencieux et de quitter son poste pour le laisser à celui représente tous les Tunisiens », dit le secrétaire général. Cette revendication de plus va-t-elle compliquer la donne ? Wided Bouchemmaoui, présidente de l'Union Tunisienne de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat (UTICA) est favorable aux actions de protestation pacifiques bien entendu. Tout en écartant l'éventualité d'un recours à la grève générale, elle affirme que « l'UGTT est consciente de la délicatesse de la situation. J'ai l'espoir que nous arriverions à une solution avant de buter là », dit-elle. Hassine BOUAZRA
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Le collectif IRVA internationalise l'affaire de l'assassinat de Belaid et Brahmi Taieb Laguili, membre de l'Initiative pour la recherche de la vérité sur l'assassinat de Chokri Belaid et de Mohamed Brahmi, a annoncé, hier, la décision du collectif IRVA d'internationaliser ces deux affaires et d'en saisir la justice française. Laguili a précisé, dans une déclaration à l'agence TAP, que les avocats français William Bourdon et Jean-Pierre Mignard, en charge des deux dossiers, avaient fait état de la réunion de tous les critères d'un crime d'Etat, ce qui, selon lui, « rend automatique la saisine de la justice internationale ». Il a fait remarquer que la décision d'internationaliser l'affaire a été prise dans un contexte de « silence assourdissant de la Troika au pouvoir », exception faite de la récente déclaration du ministre de l'intérieur, Lotfi Ben Jeddou, au sujet du « document prouvant que le gouvernement était au courant du projet d'assassinat de Brahmi », a ajouté Laguili.
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Pli fermé devant le domicile de la famille du martyr Mohamed Brahmi Le député dissident Mourad Amdouni, co-fondateur du Courant populaire, a indiqué que la famille du martyr Mohamed Brahmi a trouvé, dimanche à 22h00, devant le domicile familial à la cité El Ghazela, à l'Ariana, un pli fermé, avec l'inscription suivante en arabe : « De la part de gens honorables du ministère de l'Intérieur à la famille du martyr Mohamed Brahmi ». Dans une déclaration, hier, à l'Agence TAP, Mourad Amdouni a indiqué qu'après l'ouverture de la lettre par la police alertée, Balkis Brahmi, fille du défunt, a pu saisir quelques informations contenues dans la missive. Selon Amdouni, la lettre mentionne que l'arme du crime se trouverait dans le bureau d'un des directeurs du ministère de l'Intérieur et que deux membres de la Brigade anti-terroriste auraient participé à l'assassinat. Il a ajouté que la lettre mentionne que Rached Ghannouchi aurait contacté Ali Larayedh pour s'assurer du bon déroulement de l'opération. Mourad Amdouni a indiqué que la police est venue au domicile de la famille de Brahmi et a ouvert la lettre devant les membres de la famille, sans pour autant les informer de sa teneur. «Adnène Brahmi, fils du défunt, n'a pas encore reçu copie de la lettre ou pris connaissance de sa teneur », a-t-il précisé. Il a toutefois estimé que cette missive pourrait cacher une tentative de brouiller encore une fois les pistes au sujet des meurtriers présumés.