Si le kamikaze de Sousse n'a pas pu accomplir son acte au milieu de la foule et qu'il n'a pas fait de victimes en dehors de lui-même et si l'autre terroriste de Monastir a été neutralisé à temps c'est que les forces de l'ordre et les citoyens ont été vigilants. Et surtout le mécanisme de l'information citoyenne, à la lumière de la perspicacité du guide touristique de Monastir et des membres de la sécurité de l'hôtel, donne enfin l'impression de fonctionner. Il n'en demeure pas moins qu'après les assassinats politiques et le carnage de militaires et de membres de la Garde Nationale, le terrorisme dont on connaît désormais les origines, change de tactique. Est-ce le temps de kamikazes, scénario – catastrophe pour le pays, parce que tétanisés, embrigadés et ayant fait l'objet d'un minutieux lavage de cerveau, les kamikazes ne reculent devant rien. Et qui plus est, leurs commanditaires visent maintenant le tourisme cœur battant de l'économie tunisienne et qui sait s'ils ne projettent pas carrément d'urbaniser le terrorisme en déployant leur funeste action dans les établissements publics, les écoles, les supermarchés et partout où la foule est dense. Le ministère de l'Intérieur a donné, durant toute la journée d'hier, des informations ponctuelles sur les deux malheureux événements. Mais ces informations tenaient plus à l'identité des deux terroristes, et vaguement sur leur itinéraire dans la mouvance terroriste. Sur leur appartenance réelle quelque part on a titubé ou qu'on n'ait pas voulu fournir de plus amples détails. Dire qu'ils appartiennent à la branche « salafiste – takfiriste » reste vague et imprécis, en effet. Faire preuve de prudence du, reste exagérée, pour établir le lien entre ces deux attentats et ceux que la Tunisie a subis depuis l'assassinat de Belaïd jusqu'à Sidi Ali Ben Aoun, est pour le moins malvenu. Car au Ministère de l'Intérieur et au sein des renseignements de l'armée, on sait parfaitement qu'Ansar Al Chariaâ collabore étroitement avec l'Aqmi, dont les ramifications sont bien implantées au Maghreb, devenu avec le Mali, leur base arrière. Il faudra bien pousser les investigations dans ce sens, parce qu'il est très difficile de ne pas y établir ce lien. Pour autant, la recrudescence du terrorisme en Tunisie interpelle autant les forces de l'Ordre que les citoyens eux-mêmes. Et qui plus est, cette recrudescence intervient en plein processus transitionnel et change de tactique de frappe à l'heure où le pays s'apprête à se doter d'une constitution et d'un nouveau gouvernement. Dire aussi que le terrorisme frappe chaque fois qu'Ennahdha est en difficulté relève de la pure spéculation et, pour une fois, il y a à espérer que les politiques n'abondent pas dans ce sens. Ce serait tout simplement un raisonnement rébarbatif et spéculatif. Car maintenant il faut réellement faire face en sécurisant les frontières, en collaborant plus étroitement avec l'Algérie et la Libye et, surtout, en dotant les forces de sécurité et l'Armée des moyens urgents nécessaires à la mise en place d'une logistique de premier plan et d'une performante cellule de renseignements, qu'il ne faut pas confondre avec la police politique de jadis.