Hamma Hammami est le candidat de son parti (Parti des Ouvriers) aux prochaines élections présidentielles. Cependant au sein du Front Populaire, coalition de gauche dont il est le porte-parole et l'un des principaux fondateurs, sa candidature ne fait pas encore l'unanimité. Elle ne bénéficie actuellement que d'un « accord de principe » de la part des autres formations constituant le Front Populaire lesquelles n'ont pas encore proposé de nom pour le concurrencer dans la course à Carthage. Cette hésitation à plébisciter Hamma a de quoi surprendre et donne à croire qu'au sein de la coalition, une certaine résistance s'organise pour contester la légitimité de sa désignation. Certes, le nom de Hamma n'est pas cité expressément, mais l'on déplore les velléités hégémoniques de son parti des ouvriers sur l'ensemble du Front Populaire. Certaines formations ont invoqué ce motif pour justifier leur retrait de l'alliance, à l'instar du M. D. S. d'Ahmed Khaskhoussi. De leader incontesté, Hamma serait-il devenu aujourd'hui un dirigeant gênant au sein du Front Populaire ? Curieux sort réservé à ce militant de la première heure qui n'a pas son pareil au sein de la Gauche tunisienne ! Hamma entre son passé et son présent Depuis le règne de Bourguiba, Hamma Hammami est sans conteste l'opposant qui a le plus payé en incarcérations, tortures, poursuites, traques, étroite surveillance et autres censures son engagement politique. Son parcours se rapproche de celui des grandes figures universelles de la révolte contre la répression, la dictature et l'injustice. L'homme a sacrifié ses études, sa profession et sa famille pour une cause et des idées somme toute justes, en dépit des soubassements idéologiques qui les tendent et qu'on peut ne pas partager. Hamma Hammami restera par ailleurs une des figures les plus emblématiques de la rébellion qui a précipité la chute de Ben Ali : le 14 janvier 2011, il était arrêté dans les locaux du Ministère de l'Intérieur en vue sans doute d'une énième comparution devant les tribunaux et d'une énième condamnation à la prison. Son « palmarès » combattant mérite tous les hommages dignes d'un immense héros de la Tunisie indépendante, et surtout une récompense même symbolique à la mesure de ses innombrables sacrifices : mais l'homme est modeste et ne cherche pas, comme d'autres, à monnayer son militantisme. Cette fois, il vise la Présidence et il la vaut largement au vu de cet honorable passé militant. Seulement voilà, c'est surtout le présent de Hamma qui le dessert désormais : d'abord au sein de son propre parti notamment lorsque l'aile la plus radicale lui fit grief de ses volte-face libérales et de son rapprochement avec Nida Tounès. Ensuite à l'intérieur du Front Populaire qui semble s'effriter en ce moment entre autres à cause de la trop grande place qu'y prennent Hamma & Co. et du début de bousculade entre les « grosses têtes » de la coalition. En tout cas, des problèmes de leadership semblent émerger en cette période pré-électorale : Le Front Populaire n'a pas encore de candidat officiel pour les présidentielles et tarde à établir la liste définitive de ses concurrents aux législatives. L'urgence d'un sursaut fédérateur Ahmed Seddiq, un des leaders bâathiste du Front, a laissé entendre dernièrement que parmi ces problèmes, il y en a qui constituent des « casse-têtes » insolubles. On peut aisément comprendre ceux qui se posent à propos des têtes de listes régionales en vue des législatives, mais comment se fait-il que la candidature de Hamma Hammami aux présidentielles n'ait pas recueilli l'approbation inconditionnelle de toutes les formations du Front ? Pour l'heure, il n'y a pas le feu ; après tout même Ennahdha n'a pas désigné le sien. Cependant, il vaut mieux pour le Front Populaire faire les choses le plus vite possible pour se consacrer exclusivement plus tard à la campagne électorale. D'ailleurs, nous avons constaté que les derniers rassemblements du Front ne drainent plus la foule d'antan : la semaine dernière à Kébili, Riadh ben Fadhl avait l'air de prêcher dans le désert tant l'assistance était très faible en face de sa tribune. Zied Lakhdhar (Watad unifié) est trop optimiste quand il déclare que le Front Populaire sera la bonne surprise du prochain scrutin : si les dissensions actuelles s'aggravent, nous voyons mal comment la coalition pourrait relever un tel défi. Quelque chose nous dit que la sérénité fait défaut au Front Populaire qui malheureusement peine à gérer les divergences subjectives et objectives entre ses composantes. Hamma Hammami peut, s'il le veut et si on lui en donne les moyens, être un élément rassembleur. C'est cela aussi le mérite des grands hommes de l'Histoire. La balle est dans ton camp, Hamma !