La baisse de l'euro face au dollar, observée depuis mai, a franchi un nouveau cap : mercredi 24 septembre, la monnaie est unique est tombée sous la barre des 1,28 dollar, contre 1,38 dollar en mai. Un niveau qui n'avait plus été atteint depuis juillet 2013. Jeudi 25 septembre au matin, l'euro évoluait toujours autour de 1,27 dollar. Comment expliquer cette baisse et surtout, est-elle durable ? L'effet du décollage de l'économie américaine et du changement de cap de la Fed Chaque semaine, de nouveaux indicateurs confirment la vigueur de la reprise américaine. Selon le Fonds monétaire international (FMI), la croissance devrait s'établir à 1,7 % cette année aux Etats-Unis. De ce côté-ci de l'Atlantique, le tableau est en revanche beaucoup plus sombre. Le taux de chômage en Europe culmine toujours à 11,5 %, tandis que le PIB ne devrait pas croître de plus de 1 % sur 2014. Dans le plus optimiste des scénarios... Résultat : tandis que la Banque Centrale Européenne (BCE) poursuit ses soutiens à l'économie, la Réserve fédérale américaine (Fed), elle, commence à retirer les siens. Les achats d'actifs de la banque centrale américaine sur les marchés, de 85 milliards de dollars par mois il y a encore un an, devraient tomber à zéro en octobre, tandis qu'elle devrait relever progressivement son taux directeur, dès juin 2015. Lire aussi : La Fed reste prudente sur la remontée des taux d'intérêt Résultat : le rendement des obligations souveraines américaines à dix ans, aujourd'hui de 2,56 %, apparaîtra de plus en plus attractif face celui des titres allemands (1 %) ou français (1,34 %). Cela aura pour effet de pousser le dollar à la hausse face à l'euro. Et c'est d'ailleurs le principal facteur qui jouera ces prochains mois. Mais ce n'est pas là le seul facteur qui explique la baisse de l'euro. Depuis fin 2012, lorsque la planète finance a repris confiance dans la solidité de la zone euro, les investisseurs sont revenus en masse vers la zone euro, ce qui a largement contribué à maintenir une pression haussière sur la monnaie unique. Or, ce mouvement de repondération est terminé. La BCE a aussi adopté un nouveau discours En théorie, la BCE n'a pas d'objectif de taux de change, et elle s'est toujours montrée très ferme sur le sujet. Depuis quelques mois, le ton de l'institution a néanmoins changé. Sans aller jusqu'à afficher officiellement qu'il ciblait l'euro, Mario Draghi, son président, a, à plusieurs reprises, reconnu l'importance du taux de change. Aujourd'hui, la BCE établit ainsi un lien clair entre l'inflation faible dont souffre l'Union monétaire, et le haut niveau de la monnaie unique. En effet, les matières importées sont libellées en dollar. Plus l'euro monte face au billet vert, plus les prix du pétrole ou du gaz baissent, ce qui tire l'inflation vers le bas. Voilà pourquoi la BCE s'en cache désormais de moins en moins : elle est favorable à la baisse de l'euro. Ce simple changement de ton est déterminant pour les marchés. D'autant qu'il est accompagné d'actions de la part de l'institution. Le 4 septembre, celle-ci a en effet abaissé son principal taux directeur, de 0,15 % à 0,05 %, et a annoncé un programme d'achat d'actifs titrisés (ABS) sur les marchés. Le 18 septembre, elle a lancé le premier des huit « TLTRO », ces mégas prêts aux banques visant à encourager celles-ci à prêter à leur tour à l'économie. Lire aussi : En baissant ses taux, la BCE frappe fort pour ranimer l'économie européenne De quoi, là encore, pousser l'euro à la baisse face au dollar. Un euro pour un dollar en 2017 ? Selon nombre d'analystes, la baisse de l'euro devrait donc durer : tous les facteurs sont réunis. Les économistes d'ING et de RBS estiment ainsi que la monnaie unique devrait serapprocher de la barre des 1,25 courant 2015. Ceux de Goldman Sachs, jugeant que la croissance de la zone euro restera anémique pendant longtemps encore, misent même sur une parité à un euro pour 1,15 dollar l'année prochaine et à un euro pour un dollar en 2017.