Tunis2, deuxième circonscription de Tunis qui présente un grand « butin » de sièges pour les partis en lice pour les législatives. Que pensent nos candidats de l'argent politique et de la violence, trois jours après l'adoption d'une charte pour les élections législatives ? Quels programmes proposent, les deux candidats pour la circonscription de Tunis 2 ? Comment perçoivent-ils la mosaïque politique et le retour des anciens RCD sur la scène politique ? Telles sont les problématiques que nous avons soulevées avec les deux candidats. Réponses... Abdelfattah Mourou, mouvement Ennahdha « Tout parti perdant, devra accepter l'échec » (1) Bien que le financement soit une composante essentielle de toute campagne électorale, la fluidité de l'argent politique sale a un impact direct sur la crédibilité des résultats mais aussi sur le processus démocratique en soi. La vigilance est donc de mise. Malheureusement, le citoyen participe aujourd'hui à cette maldonne en acceptant de vendre sa voix contre de l'argent. Une mauvaise foi et une déloyauté qui portera atteinte à l'intégrité des urnes. Je pense qu'il faut une prise de conscience collective en la matière. Pour ce qui est des violences politiques, elles sont condamnables à tous les sens et ce quelle que soit la couleur politique de son auteur. La force de persuasion et la conviction sont les maîtres-mots de la période électorale. La violence politique est contraire à la logique et les valeurs de la Révolution et de la Constitution. (2) En ce qui concerne notre programme, la courte durée de la campagne nous a contraints de ne pas élucider exhaustivement les axes. D'une manière générale, l'orientation globale a trait à la volonté de reconstruire. Les problèmes urgents à résoudre sont essentiellement : la gouvernance des institutions de l'Etat à travers les collectivités territoriales, l'emploi et les services publics de première nécessité : éclairage, autoroute, sécurité. Notre programme de relance mise sur la réforme administrative et la réforme fiscale. Il faut moderniser l'administration publique connue pour sa redondance dont le mode de gouvernance remonte à plus de 50 ans et qui continue de paralyser les rouages de l'Etat. La réforme fiscale est surtout l'équité fiscale est une priorité surtout que l'Etat perd annuellement 5000 milliards à cause de l'évasion fiscale. La réconciliation de l'administration fiscale avec le citoyen et l'allégement de la pression fiscale. Pour la circonscription de Tunis 2, il faut envisager la création des pôles économiques pour faire de la région une zone de libre-échange et d'un important projet de reboisement (soit 100 millions de plants). En ce qui concerne les grands projets de développement, leur réalisation nécessite les ressources financières et la volonté engageant l'administration. Or aujourd'hui l'administration est en panne. Par ailleurs, chaque délégation présente ses spécificités et ses propres besoins de développement. Chaque quartier chic de Tunis 2 est ceinturé, à 100 mètres d'une cité oubliée. Par exemple, après avoir visité hier la cité « 5 décembre » au Kram Ouest, je pense que l'implantation de 2 à 3 usines en plus d'une municipalité clairvoyante et éveillée permettra de résoudre les problèmes du quartier. Le chômage des jeunes dans ce quartier populaire comme dans d'autres cités urbaines est très élevé. La formation professionnelle se présente comme une alternative qui nécessite préalablement la volonté et le sens de responsabilité des jeunes. Last but not least, la lutte contre la pollution néfaste qui sévit dans le pays est une priorité absolue, je ne comprends pas comment un pays musulman comme le notre, fort de 2 millions pratiquants puisse accepter cette état des lieux désastreux. Si j'étais un imam conduisant la prêche du vendredi et pour donner l'exemple et engager les pratiquants j'aurai emmené avec moi les produits d'entretien et tout ce qu'il faut. Peu importe la couleur politique des futurs députés, l'essentiel c'est qu'ils puissent a posteriori tenir compte des demandes des citoyens et être à leur écoute. Réfléchir à aménager un centre ou un lieu de rencontre qui réuniront chaque semaine les prochains élus pourrait être une solution. Il faut en finir avec cet esprit de donnant-donnant entre gouvernants et gouvernés. Aujourd'hui la pauvreté frappe les institutions de l'Etat et non pas les particuliers. Or pour répartir la richesse, il va falloir d'abord savoir la créer. (3) Malgré la mosaïque politique, Ennahdha est une « valeur sûre » ou un « cheval gagnant ». Après les résultats, tout parti perdant devra accepter l'échec et s'auto-réviser pour rectifier plus tard son emplacement sur l'échiquier politique. Quel que soit le résultat du suffrage, l'aboutissement est positif. Pour ce qui est de la résurgence de certaines figures de l'ancien système je dirais : S'ils reviennent avec leurs anciens programmes, antérieurs à la Révolution, qu'ils restent chez eux. On n'acceptera guère des projets qui réhabilitent la dictature et ses auxiliaires. Et si par contre ils arrivent avec des programmes qui épousent l'ère de la Révolution, ils sont les bienvenus, ce sont après tout des citoyens Tunisiens. Mariem Bahlous, Alliance Démocratique « Il faut purifier le système politique » (1) Le flux de l'argent politique joue un rôle très important dans le jeu électoral et surtout dans la manipulation des électeurs. En me déplaçant sur terrain, des citoyens m'ont demandé de l'argent. Ils nous ont textuellement dit : d'autres candidats sont passés par là et ils nous ont bien servis, alors combien vous allez nous proposer ? Je compte sur l'intelligence du Tunisien pour distinguer entre le bon et le mauvais programme et le bon et le mauvais parti. S'agissant de la violence, les cas sont isolés et hormis quelques algarades passagères, il n'y a rien à signaler, pas d'agressivité. Mais ce qui est remarquable, c'est le niveau élevé d'abstention observé chez certains citoyens de Jebel Lahmar, lesquels nous ont fait part de leur déception par rapport aux élections 2011, du coup, ils s'abstiendront à voter cette année. (2) Notre priorité est la mise en œuvre de l'article 7 de la Constitution afférent à la décentralisation du pouvoir. Il s'agit d'organiser au plus vite d'élections municipales. La mise à niveau des quartiers populaires est un axe très important de notre programme d'actions. Une disposition qui fera l'objet à mon sens d'un projet de loi et d'études approfondies. Nous proposons par ailleurs la création d'un fonds d'investissement et l'amélioration des services de santé. La mise à niveau de l'infrastructure de base ne concerne pas uniquement les quartiers populaires. Les tracas des réseaux d'évacuation sont communs à toute la région. Trouver une solution aux inondations fréquentes dans certains quartiers figure parmi nos priorités. Les habitants des quartiers huppés ou chics ne sont pas exclus de notre programme, ils revendiquent davantage de sécurité. Nous proposons de ce fait, la création d'une cellule de police de proximité. Pour enrayer, le chômage, cet ogre qui gangrène notre société nous proposons un programme rationnel qui permet d'endiguer ce fléau. Le problème de l'enseignement, n'est pas de moindre importance, un secteur qui doit être inspiré de notre société tunisienne. Il faut revoir le programme d'enseignement. Notre tendance générale converge vers l'encouragement de l'intelligence et de l'expertise. L'environnement est un autre défi à relever : la situation actuelle nécessitera la conjonction des efforts des partis politiques, des collectivités territoriales et la société civile. Cette dernière fait montre d'une grande implication et d'une grande ouverture. A ce titre je participe aujourd'hui à une conférence organisée par l'association des Architectes sur la transparence des dossiers notamment le projet Enfidha. (3) Personnellement je considère que ces gens ont tout fait et ont pris tout ce qu'il faut. Aujourd'hui, il est temps de donner à la Tunisie un nouveau souffle. Nous avons besoin d'êtres plus socialistes et plus sociaux. Bref, on doit purifier le système. Concernant cette mosaïque politique, je souhaite bonne chance à tout le monde. Je trouve que la tendance est vers la bipolarisation, or la création d'un pôle parlementaire démocrate permettra de faire l'équilibre et de servir les intérêts des citoyens.