Le suicide est , par définition , l'acte délibéré de mettre fin à sa propre vie. Il a fait sa première apparition en Tunisie dans la deuxième moitié du 20ème siècle . Cependant , cet acte a toujours été considéré comme un acte rare et exeptionnel jusqu'à ce qu'il est devenu un fléau et notamment dans la Tunisie post-révolutionnaire. Peut-on traduire ce fléau en nombres réels pour l'année 2014 ?? Quelles pourraient , donc , être les raisons possibles et le type de personnalités menant à cette fin ? Mr Lehdhili Abderrahmen , président du Forum des Droits Economiques et Sociaux , nous a fourni le nombre des cas de suicide , "normaux et individuels" , qui ont eu lieu du mois d'Avril au mois du Novembre 2014 . Les cas enregistrés en 2014 durant ces 7 mois sont 92 cas comme suit : Avril : 7 , Mai : 12 , Juin : 7 , Juillet: 8 , Aout : 23 , Septembre : 8 , Octobre : 15 et Novembre : environ 12 cas. Nous pouvons constater que le nombre le plus élevé des cas a été enregistré au mois d'Août de cette année , un mois d'été , de vacances, de mariages et de détente .. Selon Docteur Zayeni Nedra , psychologue , l'envie de se suicider et de quitter la vie à jamais ne peut pas habiter les personnes qui ont une forte personnalité et qui aiment la vie comme elle se présente . Au contraire , elle trouve que seules les personnes fragiles , hystériques et rêveuses c'est à dire sans aucune logique liée à la réalité ( le principe du réalisme ) d'où le fait de vouloir changer les faits et les évènements , sont capables de prendre une décision pareille . Ces personnes peuvent se sentir ignorées , marginalisées et sentir un blocage au niveau de la communication né d'un manque d'interêt au niveau de la famille , notamment , qui est le cercle social le plus proche du sujet . Elle ajoute que le suicide n'a pas d'âge , ceci dit il n'y a pas une tranche d'âge touchée par ce phénomène plus qu'une autre . On peut se suicider à l'âge de 10 ans comme on peut le faire à l'âge de 70 ans , la raison est la même : celle de vouloir attirer l'attention , communiquer sa souffrance ou faire culpabiliser une personne précise . Nedra Zayeni va même jusqu'à dire que le sujet trouve qu'il est en train de tuer l'autre en se tuant lui même. Kalthoum , doctorante en sociologie, trouve que celui qui se suicide ou tente de le faire se voit seul contre les autres , comme s'il ramait à contre le courant .Ceci renforce , alors , le sentiment de solitude , en premier lieu , chez la personne , ce qui favorise ensuite la naissance du sentiment de la haine vis à vis d'autrui chez qui elle ne voit aucune complicité et ce qui la pousse à la fin à se sentir inutile sans aucun rôle dans la société et ne voit aucune raison qui puisse la rattacher à la vie . Elle donne l'exemple des femmes divorcées et le cas des mères célibataires qui se trouvent dans une situation délicate à cause du regard sévère et menaçant de la société qui ne rate aucun rendez-vous avec l'incompréhension et l'intolérance . Ces femmes alors , perdent confiance en elles-mêmes , deviennent fragiles aux remarques et au moindre regard , évitent la rencontre avec leurs entourages , désespèrent et préfèrent disparaître . Elle clôt en disant que le regard accablant de la société tunisienne ne se résume pas à quelques régions de l'intérieur comme la majorité pourrait croire. "Notre société y est pour quelques chose , notre culture aussi " affirme-t-elle en affirmant que si nous vivions dans plus de liberté , dans plus de respect de la vie privée et dans plus de tolérance , le taux du suicide ne serait pas aussi important . Donne post-révolution Nombre de psychiatres ont conclu que la recrudescence du suicide a eu lieu après la Révolution. Plutôt que de générer de nouveaux espoirs pour la société, la Révolution a plutôt provoqué ce qu'ils appellent un « mécanisme dissociatif ». C'est-à-dire que les personnes suicidaires déjà en mal de repères, se sont retrouvées en dehors de nouveau processus. Le suicide étant par ailleurs, interdit par la religion, il devient là un acte de révolte contre tous les déterminismes socio-culturels et, donc, religieux. Au final, chacun choisit sa rébellion. Et le suicide, tout en étant un appel au secours, un jugement accablant sur la société, dont le suicidaire se dissocie, marque un rejet de tout.