C'est au cours de la conférence de presse mensuelle organisée par le Ministre de la Santé qu'une expérience unique en son genre en Tunisie de réduction de la teneur en sel du pain a été dévoilée. Elle a été initiée suite à une enquête réalisée à l'échelle nationale et dont les statistiques sont effarantes. En effet, le Tunisien consommerait en moyenne 10gr de sel par jour alors que les besoins quotidiens en sel d'un individu sain de corps varient entre 1,5 et 2 gr. Toujours selon cette étude, plus de 75% du sel consommé proviendrait des produits alimentaires dont près de 30% du pain. Une stratégie nationale de lutte contre la surconsommation de sel a donc été pensée, inspirée par celles mises en place avec succès par d'autres pays dont la Finlande, la France, la Grande Bretagne, le Koweït, Qatar et Bahreïn. Pas de roulés dans la farine Conjointement initiée par l'Institut National de Nutrition (INN) et le Ministère de la Santé en partenariat avec la Chambre régionale des boulangers de Bizerte, une expérience pilote, tout d'abord menée à petite échelle, a donc été mise en place. Elle a consisté à diminuer de 10, 20, 30 et 40 % la teneur en sel du pain dans une boulangerie à Bizerte tout en gardant la même quantité de levure et les mêmes temps de repos et de cuisson. Par la suite, un échantillon composé de 184 personnes, âgés de 4 à 78 ans, avec une moyenne d'âge de 38 ans ont goûté aux différents produits. Cette première phase expérimentale a d'abord permis de tester la faisabilité technique de cette diminution par paliers de la quantité de sel dans le pain mais aussi son acceptabilité par le boulanger et par le consommateur. Deux constatations importantes découlent de cette première expérience. Tout d'abord, la diminution des quantités de sel n'altère aucunement la qualité du pain. De même, les consommateurs n'ont commencé à percevoir un changement au niveau du goût qu'à partir de 30% de sel en moins. Ce n'est qu'à partir de 40 % qu'ils se sont vraiment rendus compte de cette réduction. A noter que pour 100 kilos de farine, les boulangers utilisent 1800 gr de sel. Une diminution de 40% équivaut donc dans ce cas à 720 gr. Au vu de ces premiers résultats satisfaisants, cette expérience sera généralisée au niveau de toutes les boulangeries de Bizerte. D'ici janvier 2015, les boulangers bizertins réduiront très probablement de 20% la quantité de sel dans leurs pains puis en diminueront un peu plus progressivement au fil des semestres, pour tenter d'arriver à une réduction de40%. Au bout de deux ans d'expérimentation et si les résultats sont jugés positifs, l'expérience pourra alors être généralisée à tous les gouvernorats de la Tunisie. Une série de mesures Réduire la teneur en sel du pain n'est pas le premier maillon d'une série d'actions visant à diminuer progressivement les quantités de sel, de sucre et de graisse dans les produits agro-alimentaires. En effet, d'autres initiatives sont prévues dont la diminution de la quantité de sel dans les fromages mais aussi de la teneur en lipides du lait demi-écrémé, la réduction progressive de l'importation de l'huile de palme et son remplacement par une autre huile plus saine ( olive, soja, colza, tournesol, maïs...), l'interdiction d'importation et de production des acides gras trans fabriqués industriellement mais aussi la réduction de la teneur en sucre de certains produits alimentaires. Toutes ces actions s'inscrivent dans le cadre du programme national de prévention et de lutte contre les maladies chroniques non transmissibles ( diabète, hypertension, maladies cardiaques, obésité...), une composante commune à deux stratégies mises en place, celle de la direction des soins de base (DSSB) et celle de l'Institut National de Nutrition (INN), qui se basent toutes deux sur les recommandations de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) La sensibilisation avant tout Toutefois, et comme mentionné lors de la conférence de presse, il ne suffit pas de réduire les quantités de sel, de sucre et de graisse dans les aliments pour lutter efficacement contre l'hypertension, le diabète ou autres maladies chroniques non transmissibles. La sensibilisation des consommateurs en vue de les informer des risques associés à la surconsommation de ces trois « poisons blancs » reste le meilleur moyen pour les convaincre d'adopter une alimentation saine. Par ailleurs, un logo "qualité santé" visible par le consommateur, devrait prochainement être apposé sur les produits agro-alimentaires, jugés favorables à la santé. Une campagne médiatique accompagnera cette action pour sensibiliser le consommateur à opter pour les produits avec logo. Ceci récompensera les efforts des industriels agroalimentaires qui ont veillé à produire des aliments de qualité et incitera les autres industriels à améliorer leurs produits sur le plan nutritionnel.