Les mouvements historiques s'accompagnent de nouvelles mœurs, suscitées par l'éveil national et la gravité de la conjoncture. La fonction crée l'organe en effet : les électeurs et la Démocratie donnent systématiquement naissance à des associations mues par un souci de neutralité, d'équité, de salubrité publique proposant des garde-fous contre les dérapages. Ces associations transposent ce que les publicistes appellent la « vox-populis » et stimulent la bonne graine idéaliste et égalitaire du subconscient collectif. Elles n'ont pas de force d'interposition. Mais, au-delà des limites juridiques dans lesquelles les confinent leur statut associatif, leurs yeux servent de référent incontournable aux organes officiels, c'est-à-dire l'ISIE. Et, là, quelque part, elles dérangent... Chaque jour nous offre son lot d'informations sur les attitudes et déclarations des deux finalistes de la compétition présidentielle. A pratiquement une semaine de la fin de la campagne électorale, certains excès de langage ont été enregistrés. D'ailleurs, l'Instance Supérieure Indépendante des Elections (ISIE), n' a pas manqué d'appeler les belligérants au calme. Un avertissement avait été signifié à un des deux candidats qui avaient mis en doute le processus électoral et l'intégrité de l'ISIE en affirmant devant ses partisans, que s'il ne gagne pas, c'est que l'autre camp avait falsifié les résultats. Les signes de violence ont déjà commencé avec la fin du premier tour. Comment s'achèveront les prochains jours ? Les risques de violence sont-ils sérieux ? Qu'en pensent des associations comme ATIDE, Aïn sur les élections ? Dr. Mohamed Kamel Gharbi, porte-parole du réseau Aïn sur les élections, constate que la campagne du deuxième tour de la présidentielle a commencé lentement par des visites de terrain effectuées par les deux candidats restés en lice. Il déclare au Temps : « Ce qu'on peut observer c'est que les propos du candidat Mohamed Moncef Marzouki (MMM), ont dévié des dispositions légales de la loi électorale, concernant la falsification des élections. Ce qui va influer sur l'attitude des électeurs dans leur participation que nous espérons massive, pour le second tour. Ce qui a poussé l'ISIE à riposter et à lui envoyer un avertissement et un rappel à l'ordre. Pour l'affichage, jusqu'à présent, il n'y a toujours pas de grands panneaux, contrairement au premier tour. En plus la présence dans les médias des deux candidats, jusqu'à maintenant, respecte les normes établies par la HAICA et l'ISIE. Espérons que l'équité entre les deux candidats dans les médias, se poursuivra tout au long de la période restante de la campagne électorale ». ATIDE sur ses gardes Si Mohamed Kamel Gharbi, semble relativement satisfait et optimiste, Anissa Bouasker, responsable communication au sein de l'Association Tunisienne pour l'Intégrité et la Démocratie des Elections (ATIDE) est loin d'être optimiste. Elle craint d'éventuels dérapages au cours de la dernière semaine de campagne électorale. Elle déclare au Temps : « Depuis l'observation de ce qui s'est passé au premier tour de la présidentielle, nous nous sommes alarmés contre la recrudescence de la violence. Nous avons remarqué qu'au 1er tour, 4% des centres de vote avaient connu des scènes de violence. Les représentants des différents candidats faisaient ce qu'ils voulaient. Au lieu d'observer le déroulement de l'opération de vote, ils faisaient de la propagande pour leurs candidats. C'est un acte générateur de tensions et de violences. Plusieurs cas ont été enregistrés entre représentants des différents candidats. Le chef de centre a des prérogatives pour exclure celui qui est à l'origine des troubles. Il peut arrêter les opérations de vote et appeler les forces de sécurité. Il y a eu un renforcement de la présence des forces de sécurité, qui a permis de nous épargner certains dérapages. Une fois, une présidente d'un bureau de vote a été agressée à Jebenyana, parce qu'elle voulait empêcher l'affichage de photos de candidats aux alentours du bureau de vote. Elle a été violentée par le représentant d'un candidat. Les forces de l'ordre l'ont arrêté. Des observateurs avaient subi des actes de violence par des représentants de candidats. D'ailleurs, un observateur de l'ATIDE avait assisté à une escarmouche entre représentants de deux candidats. Lorsqu'il a voulu photographier la bagarre, ils ont arrêté leur dispute et se sont dirigés, unis comme un seul homme, vers l'observateur pour l'agresser. Après la tension constatée dans les quartiers généraux en fin de journée, avant l'annonce officielle des résultats, l'ATIDE a demandé à l'ISIE de prononcer des résultats approximatifs à 22H, le jour du vote. Il faut écourter la période de doute avant l'annonce des résultats officiels pour éviter les dérapages. D'ailleurs, l'ISIE avait engagé une campagne de sensibilisation pour appeler les citoyens à ne pas se laisser influencer par les discours haineux. Pour les dépassements constatés, il faut se référer à la position de l'ISIE, même si nous la trouvons un peu molle. Nous déplorons le manque d'efforts de l'ISIE. D'ailleurs, pour le moment, il n'y a rien dans les pays qui indique que nous sommes en période électorale, pour le deuxième tour, alors que c'est un moment historique. A ATIDE, nous critiquons pour améliorer et non pour détruire ».