A part le fait que Sousse soit devenue une ville au sud de Tunis et Mahdia, une petite ville au sud de Sousse, qu'a-t-on appris avant-hier au soir, du reportage, consacrée, par le magazine hebdomadaire « Envoyé Spécial », après un premier volet sur « Charlie-Hebdo », à l'Islam radical en Tunisie, dans le cadre de l'attaque terroriste perpétrée à Tunis, par deux « Salafistes Jihadistes » au Musée du Bardo, ayant débouché sur un bilan très lourd : 23 morts et 43 blessés ? Diffusé une première fois en 2012, le reportage, remis sur « orbite » parce que répondant à la triste actualité du carnage du 18 mars à Tunis, finalement revendiqué par l'EI, rappelle effectivement, si besoin est, que le vers était dans le fruit, et que cela ne date pas d'hier... Le problème c'est que jusque-là, nul ne s'attendait à ce que les choses passent vraiment à une vitesse supérieure, mettant à exécution une menace, déclinée moult fois sur la toile, sur tous les tons, de frapper un « grand coup » au cœur même de la capitale, son pouls névralgique s'il en est, puisque le musée juxtapose le Parlement au Bardo. Nul ne s'y attendait parce que jusque-là, la capitale avait été toujours épargnée, et le périmètre du terrorisme, généralement endigué aux régions frontalières avec l'Algérie, et la Libye voisine. Du coup, le choc a été rude, et le pays n'en revient toujours pas... Sauf que, la montée en puissance du « Salafisme Jihadiste » intra-muros, et son ancrage chez une jeunesse, supposée rétive à ce genre d'embrigadement -la Tunisie ayant toujours été un pays ouvert et tolérant-, a causé un basculement assez choquant, dans les soubassements d'une société, ébranlée dans ses assises depuis la révolution d'il y a quatre-ans, et ne sachant plus à quel saint se vouer. Notamment dans les régions où les promesses consécutives justement à ce fameux « printemps tunisien », sont demeurées « lettre morte ». Une incursion à Sidi-Bouzid le montre assez clairement dans le reportage, où le chômage sévit plus que jamais, et où les « barbus » ont trouvé toute latitude, en l'absence d'un Etat fort, d'imposer leurs « diktats ». L'exemple de la jeune adolescente de quatorze-ans à Mahdia, embrigadée via le net, et manipulée au point de quitter sa famille pour aller se jeter dans « l'antre du loup », sans savoir ce qui l'attendait exactement de l'autre côté, est assez explicite sur la manière, incroyablement simple hélas, avec laquelle les choses se passent. Bien souvent au nez de la famille, qui n'a pas eu le temps de voir venir, que la jeune fille se retrouve déjà, en Syrie, ou ailleurs, au cœur même du cauchemar. Mais Nermine a eu de la chance : elle a pu revenir. C'est souvent loin d'être le cas pour les autres. Une fois que la machine est enclenchée, on ne peut plus l'arrêter, ni revenir en arrière... Une Tunisie à deux vitesses ? Il se trouve que la réalité du terrain s'avère être souvent, assez complexe. Et c'est ce paradoxe qui sera souligné, d'une certaine manière, par Yves Calvi, dans l'émission « C dans l'air », diffusée dans la soirée du jeudi 19 mars, et intitulée : « Valls, réactive le renseignement ». Avec un volet consacré, actualité oblige, à la Tunisie, la question qui s'est posée en substance, était de savoir, comment les Tunisiens, ayant hérité, dans leur grande majorité, de l'héritage de Bourguiba, du point de vue de la laïcité, ont-ils pu, également, touchant une certaine frange spécifique d'entre -eux, être sensibles, aux sirènes d'un fondamentalisme religieux, à relents « Wahhabite », totalement étranger à leur culture, au point d'en épouser la cause obscure, et d'en devenir même les fers- de- lance, que ce soit en Irak, en Syrie ou en Libye, avant de le ramener, chez eux, -pour ceux qui reviennent-, dans leurs bagages ? En ce sens, ce qui vaut pour la France, et pour le reste du monde d'ailleurs, vaut pour la Tunisie. Lois anti-terrorisme à voter ou à revoir, réactivation du renseignement, y compris sur le net, surtout sur le net en ce cas de figure,- jusqu'à quelles limites- ?, pour ne pas empiéter sur les libertés individuelles ? Mais, ce qui est caractéristique à la Tunisie, comme le reste des régions qui ont connu le « printemps arabe », lequel prête à bien des équivoques, ne l'est pas forcément pour la France. Dans la mesure, où, si des points de convergence existent, et c'est le cas ici en l'occurrence, avec les attentats terroristes, ce sont les mobiles qui changent, même si les commanditaires, dans un premier temps peuvent être considérés comme étant les mêmes. Il y a un « jeu », une distribution des cartes dans la région ; et les modes d'opérer, en amont, ne sont pas les mêmes, lorsqu'il s'agit des pays occidentaux, ou des pays arabes. Mais, comme tout jeu, qui repose sur un pari, donné, comme, gagnant à l'avance, il y a, parfois, des retournements imprévisibles, quelque détail qui échappe au contrôle. Un grain de sable qui vient enrayer la machine. Ce qui a donné par exemple, un certain 11 septembre 2001. Est-ce à dire, que tout le monde a retenu la leçon ? Lorsque l'on active une bombe, même à retardement, il n'est pas sûr qu'elle ne nous explose pas, un jour ou l'autre à la figure. Le terrorisme est condamnable par essence. Et doit être condamnable unanimement. C'est indiscutable. Et combattu par le monde entier, c'est indéniable. Mais il ne faut pas oublier non plus, qu'il ne naît pas du néant. Et que les Hommes, les êtres faits de chair et de sang, et d'âme, ne sont pas des pions sur un échiquier, que l'on déplace à son gré, à son bon vouloir, et que l'on jette par la suite dans un coin, comme un vieux mouchoir, jusqu'à la prochaine fois. On ne tire pas sur la détente lorsque l'on a peur du feu. Le feu ne s'incline devant personne. Il brûle. C'est sa nature même. Au fait, la question qui se pose aujourd'hui, réellement, et elle se pose avec acuité, c'est, comment éteindre le feu, mais l'éteindre définitivement, afin qu'il ne brûle plus personne ? Il semble qu'il faut être plusieurs pour y répondre...