La soirée du mercredi 14 octobre tout en russe sur les hauteurs de Carthage. L'Acropolium avec le concours du Centre Russe des Sciences et de la Culture à Tunis a accueilli sur les planches de la 21ème édition de l'Octobre Musical deux artistes complices aussi bien sur scène que dans la vie. Entre la pianiste Nathalie Tchernikh et le ténor Dmitri Ivantchei, l'amour de la musique , ils en font une affaire de famille puisque Nathalie Tchernikh n'est autre que la mère de Dmitri Ivantchei. Ce lien a donné lieu à une osmose envoûtante entre deux interprètes aussi talentueux que passionnés. Entre la voix et le piano, les cordes ont vibré pour le plaisir du mélomane et la curiosité du profane. Haendel, Schubert, Donizetti et Curtis ont été les compositeurs qui ont été mis à l'honneur dans la première partie du concert. L'amour était le fil d'Ariane qui liait les extraits choisis. Un amour qui s'est laissé apprivoiser par le ténor. Exprimé par la puissance de la voix, ce sentiment était tantôt une supplique, tantôt un mouvement oscillant entre frénésie et douceur. La force de la voix, avec cette once de sensibilité, a empli l'espace pour donner lieu à une interprétation des plus saisissantes. Le talent de Dmitri Ivantchei avait donné vie à la partition et avait séduit un parterre qui s'est abandonné à la délectation de la juste mesure et de cette sensibilité accrue dont l'artiste est animé. Les otes émanant du piano avaient épousé les paroles pour donner lieu à des épousailles parfaites entre phrasées musicales et textes rimés. Ces noces mesurées se sont intensifiées lors de la seconde partie du concert où des œuvres signées Glinka, Tchaïkovski, Rachmaninov ont révélé un panel de l'opéra classique. Natahlie Tchernikh et Dmitri Ivantchei ont mis au grand jour ces partitions en les magnifiant par une interprétation où la technicité se le disputait au beau. Si le nom de Nathalie Tchernikh brille déjà dans la sphère classique grâce à une brillante carrière en tant que musicienne et pédagogue, Dmitri Ivantchei a réussi à percer dans le milieu classique pour se placer, à trente ans, comme un artiste prometteur, s'inscrivant dans la lignée des grands ténors. Rendant hommage à la terre des origines, la pianiste et le ténor ont repris deux chansons du folklore russe. Grâce au rythme, l'évasion était assurée à travers touches et cordes vocales. Même si sur le programme la chanson « La tempête de neige » devait sceller la fin du concert, il ne fallait pas oublier le public qui avait réclamé le retour des artistes. La pianiste a laissé échapper les premières mesures de l'air mondialement connu « ‘O sole mio », des notes vite rejointe par la voix imparable du ténor. La chanson napolitaine écrite par le poète Giovanni Capurro avait été la touche finale adéquate pour un concert de haut vol. En interprétant « ‘O sole mio » (Mon Soleil), la complicité d'une mère et son fils, d'une pianiste chevronnée et d'un ténor prometteur ont atteint les sphères célestes mettant en exergue le talent incommensurable dans l'interprétation mais confirmant aussi la place de Dmitri Ivantchei parmi les étoiles montantes du répertoire classique...