La Tunisie connaît-elle actuellement une grave épidémie de grippe A (H1N1) ? La rumeur ne cesse d'enfler depuis quelques jours, surtout depuis le décès d'un deuxième patient suspecté d'être porteur de ce virus. Pourtant, en évoquant le sujet, les spécialistes se veulent rassurants mais cela n'empêche pas les citoyens de paniquer et de redouter le pire. Qu'en est-il vraiment ? Début mars, un patient âgé et présentant des antécédents de maladies chroniques est décédé des suites d'une grippe A (H1N1) à l'hôpital Houcine Bouzayane à Gafsa. Samedi 12 mars, un deuxième décès a été enregistré à l'hôpital Abderrahman Mami, à l'Ariana. Si la personne décédée, également originaire de Gafsa, est potentiellement porteuse de ce virus, rien ne permet jusqu'à présent de l'affirmer de façon catégorique puisque ses prélèvements ne sont parvenus au laboratoire de microbiologie du CHU Charles Nicolle que dans la matinée d'hier et que les résultats n'ont pas encore été communiqués jusqu'à l'heure de rédaction de cet article. Contactée à ce sujet, Dr Souha Bougatfa, sous-directeur de la veille épidémiologique à l'Observatoire National des Maladies Nouvelles et Emergentes, s'est voulue rassurante et a assuré de la mise en place d'un système rigoureux de suivi en temps réel de la situation de la grippe A (H1N1) en Tunisie et de son évolution. Elle a en outre affirmé que sur les 40 prélèvements suspects effectués jusqu'ici, seuls 5 cas se sont avérés positifs et que la plupart de ces patients étaient actuellement hospitalisés et leur état de santé suivi de très près. Dr Bougatfa a, également, déclaré : « En Tunisie, on ne parle plus de grippe porcine. Il s'agit actuellement d'un virus identifié et totalement sous contrôle. Tous les ans, des sites sentinelles, implantés dans des centres de santé de base, sont mis en place pour recenser les principaux syndromes grippaux entre début octobre et fin avril, puis juste avant la phase de pic, nous renforçons le suivi en implantant des sites de surveillance dans des services de pneumologie afin de détecter les cas de grippe sévère. Pour cette année, nous pouvons affirmer jusqu'à présent que nous ne sommes pas dans une phase épidémique. Surtout que nous avons eu un hiver relativement doux. Ce n'est que fin janvier que de nombreux cas de grippe ont commencé à être recensés avec quelques rares cas graves présentant des complications majeures. Ainsi, nous sommes tout à fait dans la normale saisonnière, voire même en dessous. Concernant la grippe A (H1N1), malgré les quelques cas détectés, précisément cinq jusqu'à aujourd'hui, on ne peut pas parler à ce stade de foyer de contamination. Depuis l'apparition de ce virus en 2009, quelques rares cas sont décelés annuellement en Tunisie sans pour autant annoncer une grave et large épidémie. L'essentiel maintenant étant de se protéger et d'adopter les précautions d'hygiène nécessaires pour éviter la contamination. Pour les patients souffrant de grippe, il est impératif de se laver très régulièrement les mains, de jeter les mouchoirs après usage, de respecter une distance de sécurité d'au moins un mètre avec les autres personnes et de porter un masque anti-projection. Le personnel hospitalier est également concerné par ces mesures de protection. Je tiens d'ailleurs à affirmer que le ministère de la Santé a mis à la disposition de tous les professionnels de la santé une importante quantité de masques et de solutions hydro-alcooliques et ce, dans toutes les unités de soins. Enfin, je conseille à tous, et plus particulièrement aux personnes à risque, de se faire vacciner tous les ans afin d'éviter d'attraper le virus de la grippe e, surtout, ses complications. », conclut Dr Bougatfa. Pas plus dangereuse que la grippe classique Ce n'est pas la première fois que la grippe A (H1N1) fait parler d'elle en Tunisie et inquiète la population. Apparue pour la première fois en 2009, elle est assimilée dans l'inconscient collectif à une maladie infectieuse grave et mortelle. En 2013, Pr Amine Slim, chef de service de microbiologie à l'hôpital Charles Nicoles, confirmait sa réapparition en Tunisie après 2 ans d'absence, affirmant toutefois qu'il ne fallait pas paniquer outre-mesure. Pour Dr Omar Gargouri, pneumologue, la grippe A (H1N1) n'est pas plus dangereuse que celle classique, à la différence près qu'elle est beaucoup plus grave pour les sujets à risque tels que les enfants en bas âge, les personnes âgées, les femmes enceintes, les diabétiques ou encore les personnes souffrant de pathologies coronariennes. Il déclare à ce propos : « Au début, les symptômes sont les mêmes pour les deux grippes à savoir des frissons, des courbatures, de la fièvre, de la toux mais tout dépend ensuite de l'évolution et des complications enregistrées. Ce n'est que lorsque des syndromes de détresse respiratoire aigüe apparaissent, qu'une grippe A (H1N1) est suspectée et que des prélèvements sont demandés.