Décidément ce gouvernement est prêt à tout pour sauver le pays, et qu'il considère comme l'une de ses missions. Mais parfois les bonnes intentions ne suffisent pas. Aussi le manque d'expérience et de rétrospectives de cette équipe peut donner des résultats opposés aux résultats escomptés. C'est le cas des décisions prises récemment par le conseil des ministres concernant les voitures de fonction et les bon d'essence et qui a généré la colère des cadres, et aussi la décision d'alléger l'autorisation pour la propriété aux étrangers. Une décision qui certainement aura un impact sur l'investissement étranger, mais aussi touchera le secteur de la promotion immobilière. L ́acquisition d ́un bien immobilier par des étrangers en Tunisie L'actuel cadre juridique régissant la propriété des étrangers en Tunisie, est considéré comme l'une des plus rigides. La Tunisie est même en retard dans le classement de Doing Business à cause de cette loi, considérée comme entrave à l'investissement. En 2005, et afin d'encourager les investissements étrangers dans le secteur industriel, une modification importante à été introduite. En effet par la loi n°2005- 40 du 11 mai 2005, complétant le décret du 4 juin 1957, le législateur a annulé l ́autorisation du gouverneur pour les opérations provenant de l ́intégration, de fusion, de division, de changement de la forme juridique des sociétés ou filiales à capital en majorité étranger ayant pour objet la cession ou la location de terrains et locaux qui se trouvent dans les zones industrielles et touristiques, à condition du maintien de leur activité économique. Pour les propriétés immobilières pour usage d'habitation, une autorisation préalable du gouverneur est nécessaire, et elle est donnée dans un délai de 3 ans. Cette autorisation était donnée par le président de la République selon la loi du 22 Septembre 1969. Le décret-loi n°4 du 21 Septembre 1977 a déterminé l'intervention du gouverneur dans l'octroi de l'autorisation aux étrangers. Cette autorisation a plusieurs objectifs : – Etudier l'importance du bien immobilier à vendre (au niveau stratégique, au niveau de la superficie, au niveau du positionnement, au niveau de l'urbanisation) – Coordonner avec le ministère de l'intérieur sur les possibilités de blanchiment d'argent venant de l'extérieur, – S'informer sur l'acquéreur pour des questions de souveraineté nationale et de relations extérieures du pays. – Etudier la réalité du prix d'acquisition pour des considérations de spéculation immobilière. Ce sont les principaux éléments étudiés au niveau du gouvernorat avant l'octroi de l'autorisation. Pour effectuer des opérations de ventes de biens immobiliers en Tunisie pour des étrangers, une certaine procédure est à respecter. En effet, il faut présenter un dossier composé de : – Formulaire à récupérer du gouvernorat et à remplir en 5 exemplaires ; – Copie des documents justifiant l'identité du vendeur avec précision du nom, de la nationalité, de l'adresse et du métier ; – Copie des documents justifiant l'identité de l'acheteur avec précision du nom, de la nationalité, de l'adresse et du métier ainsi que son passeport ; – Copie originale de la promesse de vente établie par un avocat ou par un notaire dûment signée (légalisée) par le vendeur et l'acheteur ; – Certificat de propriété du bien, et à défaut le contrat d'achat initial du vendeur ; – Quitus de la taxe municipale ; Jusqu'à nos jours la Tunisie n'est pas considérée comme une destination privilégiée pour les étrangers au niveau de l'acquisition d'une résidence, en comparaison avec d'autres pays tel que l'Emirats Arabes Unis, ou le Maroc. Le cas du Maroc Selon les récentes décisions prises par le gouvernement, on sent une certaine volonté de suivre le modèle marocain. Que ce soit au niveau des voitures de fonction ou les bons d'essence, ou au niveau de la propriété des étrangers, la tendance est la même. Si le Maroc, maintient, comme pour notre cas, l'interdiction aux étrangers la propriété des terres agricoles, il donne un régime de faveur aux étrangers pour la propriété des biens immobiliers. En effet, les étrangers sont traités de la même manière que les nationaux lors de l'acquisition d'un bien immobilier. Cette facilité a permis d'encourager l'investissement dans l'immobilier au Maroc et à drainer plusieurs millions en devises pour le pays. Des villes comme Marrakech sont même connus par l'affluence des étrangers à travers leurs propriétés. Or le constat au Maroc n'est pas toujours positif. En effet, les propriétaires étrangers rien qu'à Marrakech, représentent plus de 60% des habitants du centre ville, ou il y a les « harems » et les palais. La spéculation immobilière bat son plein dans cette ville, et les prix augmentent de plus de 30% chaque année. Outre les problèmes de spéculation, le Maroc est devenu une destination privilégiée pour les Russes, et les espagnols qui réalisent des opérations de blanchiment d'argent. La simplicité des procédures dans ce pays ne permet pas de savoir la source de l'argent investi. Outre ces problèmes d'ordre économique, il existe un problème d'ordre authentique et social. Avec l'arrivée de ces nouveaux résidents, c'est un nouveau mode de vie qui s'installe dans certaines régions au Maroc. Ces riches investisseurs, introduisent aussi des modifications capitales dans l'architecture de certaines habitations mythiques de la ville, changeant catégoriquement l'identité de la ville. Si le Maroc a gagné au niveau du tourisme et des investissements en devises, il a sans doute perdu en termes d'identité et de transparence de l'économie et surtout dans le secteur immobilier. La décision du gouvernement n'est pas réfléchie Encore une fois le gouvernement rate le coche en prenant des décisions hâtives et sans réflexion aucune. Après les différentes déclarations des ministres tunisiens, précisément, le secrétaire d'Etat aux collectivités locales et le ministre de l'agriculture, on n'est pas encore convaincu. Le gouvernement affirme qu'aucun changement n'a été apporté pour faciliter la propriété des étrangers en Tunisie, et ce avec le maintien de l'autorisation obligatoire du gouverneur. Or un délai de 3 mois est il suffisant pour mener une enquête sur un étranger voulant acquérir un bien en Tunisie ? L'administration tunisienne a-t-elle les moyens humains pour traiter des dossiers, parfois complexes concernant l'acquisition de bien en Tunisie par des étrangers ? Le gouvernement a t-il le temps d'étudier l'impact d'une telle décision sur les prix de l'immobilier en Tunisie ? En effet, les craintes d'une hausse des prix et de la spéculation sont plus que probables. La Tunisie vit actuellement une période de reconstruction et une situation instable, et risque par cette décision de devenir une proie facile pour les spéculateurs et grandes mafias du blanchiment d'argent. La recherche par la Tunisie de recettes en devises pour réduire le déficit de la balance des paiements peut réduire notre vigilance au niveau de la recherche de la source de cet argent.