Moins de cinq ans après son adoption, la Constitution tunisienne apparait comme un système sur mesure pour que le mouvement Ennahdha soit, toujours, présent sur la scène politique, grâce à sa base qui, bien qu'en perpétuel diminution, n'en constitue pas moins une assise satisfaisante. Le mouvement islamiste sait comment haranguer les foules et, contrairement à ce que ses dirigeants affirment, ses principes sont basés sur la religion, comme ils veulent interpréter ses préceptes, auprès d'une société conservatrice et qui considère que tout ce qui a trait à la religion est tabou. L'ex-président de l'Assemblée nationale constituante (ANC), Mustapha Ben Jaafar, n'est pas conscient, encore, des dégâts qu'il a commis, en occupant ce poste, et à travers son alliance avec le mouvement Ennahdha. Il lui aurait, seulement, de regarder l'état de son parti qui était le second, lors des élections de 2011, pour se rendre compte du mal qu'il avait fait à son parti et, par projection, à tout le peuple tunisien. Certainement, il ne veut pas se rendre à l'évidence, ambitions politiques aidant, de se rendre à l'évidence. Mustapha Ben Jaafar, président du parti Ettakattol pour le travail et les libertés, a estimé que la crise que connaît aujourd'hui le pays « n'est pas constitutionnelle mais politique », appelant à « arrêter le mépris des lois ». Lors d'une conférence-débat organisée à Tunis par le Centre des études stratégiques et diplomatiques, Ben Jaafar a déclaré que la Constitution de 2014 a bénéficié d'une large unanimité. « Il s'agit, en effet, de la meilleure constitution au monde arabe et en Afrique qui consacre les libertés, le pouvoir local et la démocratie participative », estime-t-il. Ben Jaafar a, en outre, mis en garde contre les appels à répétition « aux amendements sur mesure » de la Constitution. La révision de la Constitution, si elle est jugée nécessaire, ne doit se faire que sur la base d'une large consultation nationale. La Constitution de la 2e République « n'est pas responsable des crises sociales et économiques dans le pays, ni de la chute de la valeur du dinar tunisien », a-t-il lâché. « Le mauvais usage de la Constitution a créé de nombreux obstacles et provoqué des conflits entre le président de la République et le chef du gouvernement », a-t-il regretté, soulignant l'impératif d' »accepter le contrôle qui limite la monopolisation du pouvoir ». Sur un autre plan, Ben Jaafar, qui a présidé l'ANC de novembre 2011 à décembre 2014, a jugé inadmissible la non installation de la Cour constitutionnelle quatre après l'entrée en vigueur de la Constitution. S'agissant des appels au changement du régime électoral, Ben Jaafar a mis en garde contre le retour à un régime électoral établi en fonction des circonstances, ce qui atteste, selon lui, d'une volonté de la part de certains de s'accaparer les décisions. Les blocs parlementaires n'ont abouti, à ce jour, à aucun accord autour des points de divergence, notamment au sujet du projet d'amender et compléter la loi organique n° 2014-16 du 26 Mai 2014 relative aux élections et aux référendums au sujet, notamment, des questions relatives au seuil électoral et au financement. Certes, Ben Jaafar a le droit de critiquer et de présenter son point de vue. Mais, il aurait mieux fait de faire son autocritique et de tenter à aider son parti à se replacer sur la scène politique. F.S.