Commandée par l'Institut arabe des chefs d'entreprise (IACE), dans le cadre de son programme visant le renforcement de la culture de gouvernance d'entreprise en Tunisie, une étude intitulée « Pratiques commerciales et performance de l'entreprise en Tunisie : état des lieux » a été récemment élaborée par les professeurs Mohamed Salah Rejeb et Lotfi Bouzaïane. Cette étude a porté sur un ensemble de comportements impliquant les entreprises entre elles et les entreprises dans leur relation avec les autres partenaires (fournisseurs et clients publics et privés, l'Etat, les employés, le système financier, les dirigeants, les actionnaires, les structures d'appui, …etc.). Ces comportements sont régis par la réglementation, mais aussi par l'éthique et les traditions. Quant au référentiel des pratiques commerciales, il a été de la littérature. Il est essentiellement composé de la fluidité des transactions, la transparence, l'application des contrats, l'égalité de traitement, le non abus des situations de domination, la liberté de décision, la participation aux choix collectifs et l'équilibre entre les droits et les devoirs.
Sur cette base, des appréciations de la qualité des pratiques commerciales par partenaire et par composante de qualité ont été faites afin d'en dégager, par la suite, une appréciation générale qui permet de mesurer les déviations des pratiques commerciales effectives par rapport aux pratiques référentielles. Pour pouvoir mettre en œuvre cette démarche, les auteurs de l'étude se sont appuyés sur les indicateurs internationaux qui reflètent les résultats de la Tunisie en termes de croissance, de compétitivité et de liberté économique.
En vue de compléter cette démarche, une étude de terrain portant sur les pratiques commerciales en Tunisie a été également menée pour pouvoir englober ainsi tous les aspects complémentaires qui ont été insuffisamment saisis par les indicateurs internationaux, tels que les partenaires impliqués et le type d'effet sur l'efficacité du marché et sur la performance de l'entreprise tunisienne. Cette étude de terrain consistait donc en un questionnaire comportant quatre volets essentiels : le positionnement de l'entreprise, l'appréciation de la qualité de l'exercice des pratiques commerciales par partenaire, indications des principales pratiques commerciales perfectibles et, finalement, l'impact sur les coûts. Bien que la population enquêtée reflète des profils diversifiés, et malgré l'exhaustivité des réponses collectées, l'étude a débouché sur un certain nombre d'indications qui ont été qualifiées de « préliminaires ».
Selon les auteurs, les résultats de l'appréciation obtenus témoignent d'une bonne qualité des pratiques commerciales dans l'ensemble, couronnée par une bonne moyenne générale, mais le potentiel d'amélioration de ces pratiques demeure toutefois considérable. Ce potentiel présente d'ailleurs certaines différences, en fonction des partenaires et des qualités appréciées.
Du point de vue des entreprises, les pratiques commerciales qui reflètent le plus des problèmes sont notamment les relations avec les clients (les paiements, les impayés, les exigences extracontractuelles, …etc.), le circuit commercial peu développé, la qualité du service du fournisseur (non respect des délais et des qualités conventionnelles), la concurrence déloyale par le biais du régime forfaitaire, la contrefaçon, la coordination de la politique commerciale, le remboursement des trop perçus, …etc.
A partir de l'ensemble de ces données, les auteurs de l'étude ont essayé de chiffrer l'impact de l'amélioration des pratiques commerciales sur l'entreprise tunisienne. Les chiffres avancés retiennent l'attention. En effet, l'impact de l'amélioration des pratiques commerciales équivaut une économie de 13% sur les coûts de l'entreprise. A une échelle macroéconomique, l'amélioration totale de la qualité des pratiques commerciales peut rapporter jusqu'à 10% du PIB, alors qu'une amélioration qui a été qualifiée de « faisable » par les auteurs et qui est, de ce fait, beaucoup moins théorique, peut rapporter jusqu'à 5% du PIB. Cela étant, les principales voies d'amélioration passent par un ensemble assez varié d'actions qui tournent autour de la réforme du système financier, l'accélération des réformes du passage à la frontière, l'élaboration d'un plan contre la contrefaçon et secteur informel et la gouvernance d'entreprise.