Nombreux sont ceux qui veulent se refaire une virginité L'ancien régime de Ben Ali était manifestement très corrompu, à tous les niveaux politiques et économiques. Après le 14 Janvier 2011, le rideau est tombé sur un tableau noir, plein de passe-droits, de malversations, de racket, de corruption, d'extorsion de fonds, de détournements de biens publics, d'actes mafieux,... et la liste est longue. L'économie tunisienne était rongée par un cancer dévastateur. Malheureusement, plusieurs personnes, personnalités et sociétés étaient impliquées dans ces affaires douteuses, que ce soit par complaisance directe ou indirecte. Après la chute du régime, plusieurs hommes d'affaires et ex-responsables veulent se retaper une virginité économique, invoquant leur innocence, ou qu'ils ont dénoncé ces pratiques sans qu'ils soient entendus.
Des pratiques frauduleuses Plusieurs pratiques frauduleuses ont entaché le milieu des affaires tunisien durant 23 ans. Toutes les structures étaient impliquées : administration publique, entreprises publiques, entreprises privées, structures de soutien… Personne ne peut nier ce fait, car les révélations qui tombent chaque jour laissent à croire que ce qui s'est passé ne peut pas être le fruit de pratiques isolées, mais d'une coutume d'affaires. Les affaires, qui sont aujourd'hui traitées par la commission nationale, révèlent qu'il y a eu beaucoup de passe-droits, des importations illégales, des marchés publics douteux, des privatisations complaisantes, des confiscations de terres domaniales et privées, des pots de vin, du racket, des avantages fiscaux, des exonérations, et même du blanchiment d'argent. Il existe aussi plusieurs affaires au niveau des banques publiques et privées, qui ont octroyé des crédits importants, sans avoir les garanties nécessaires. Le montant de ces crédits a atteint plus de 2.500 MD, selon le gouverneur de la Banque Centrale. Plusieurs banques ont divulgué le niveau de leur implication dans les crédits accordés aux groupes et sociétés proches du président déchu, à sa femme et aux autres membres de leurs familles. Ces pratiques ont défiguré «le business» en Tunisie, au point de freiner l'investissement privé et le confiner dans une poignée d'hommes d'affaires. L'enrichissement fulgurant d'une catégorie de personnes était flagrant et a posé plusieurs questions, que personne n'osait poser à haute voix.
La tolérance zéro Après la révolution du 14 Janvier, plusieurs dossiers doivent être ouverts, et des comptes doivent être rendus au peuple. Des droits doivent aussi être restitués à leurs ayants-droit. Une politique de tolérance zéro doit être adoptée à l'encontre de toute personne, quelle que soit sa position, qu'on prouve qu'il a été impliqué dans des affaires financières et administratives graves. Déjà, plusieurs langues commencent à se dénouer, et la vérité éclate d'elle-même. De l'autre côté, plusieurs langues se justifient d'avoir agi sous la contrainte, et en exécution d'ordres venus d'en haut. Certains expliquent qu'ils risquaient leurs places s'ils avaient agi autrement. D'autres affirment qu'ils ont respecté la loi, rien que la loi. Les hommes d'affaires qui étaient aussi impliqués dans ces affaires expliquent qu'ils ont voulu profiter d'une situation, et que pour faire des affaires ils étaient obligés de composer avec des personnes et des établissements, qu'ils connaissent impliqués dans des pratiques douteuses. Les excuses se multiplient, mais le résultat est le même : un milieu des affaires rongé par des pratiques frauduleuses. Plusieurs personnes se veulent de se retaper une nouvelle virginité économique, plaidant l'innocence et la propreté de la main. Or, la réalité et les révélations les contredisent. Dans cette phase, il est important de dire la vérité et rien que la vérité, parce que c'est la seule chose qui peut mener à l'établissement de nouvelles règles et de nouvelles pratiques, qui peuvent développer le milieu des affaires tunisien sur des bases solides.
Partir sous de nouvelles bases Le milieu des affaires en Tunisie doit couper court avec les anciennes pratiques, et s'auto-nettoyer des parasites qui l'entachaient depuis une vingtaine d'années. De nouvelles règles et de nouvelles pratiques doivent être instaurées afin de développer le pays. Il est important de consacrer les règles de la libre concurrence, de la transparence des affaires, du respect du droit, et de l'abolition des interventions, de la corruption et des passe-droits. L'administration doit se libérer des entraves et des décisions arbitraires et complaisantes afin d'être un véritable pilier de la croissance et du développement de l'économie tunisienne. Il est nécessaire d'introduire plus de transparence dans les marchés publics et les privatisations, s'il y aura d'autres à faire. Les acteurs économiques doivent être égaux devant l'administration tunisienne, et bénéficier des mêmes avantages, mais aussi sanctionner de la même manière. Le secteur bancaire de son côté doit revoir ses méthodes de travail et se moderniser pour qu'il soit réellement aux côtés de nos entreprises surtout en périodes difficiles, et pour le développement de l'activité des différents acteurs. Les banques de la place doivent jouer pleinement leur rôle de dynamo de l'économie. De leur côté les hommes d'affaires tunisiens et les investisseurs, sont tenus à être vigilants et dénoncer toute pratique contraire au bon fonctionnement des affaires, et ne pas essayer de profiter des situations. Comme ceux qui cherchent à montrer leur virginité économique aujourd'hui, l'économie tunisienne avec tous ses intervenants, doit aussi retrouver sa virginité, puisqu'elle a été violée durant 23 ans.