L'administration de Donald Trump a saisi en urgence la Cour suprême des Etats-Unis afin de lever une décision judiciaire bloquant sa nouvelle politique migratoire. Celle-ci vise à expulser des migrants vers des pays tiers — des Etats qui ne sont ni leur pays d'origine ni leur pays de résidence — sans leur accorder la possibilité de contester la décision ou de démontrer un risque de torture ou de persécution. Ce recours survient après qu'un juge fédéral de Boston, Brian Murphy, a ordonné une suspension provisoire de la mesure, exigeant que le ministère de la Sécurité intérieure (DHS) informe par écrit chaque migrant du pays où il serait expulsé, et lui accorde une véritable occasion de démontrer le danger potentiel. Des expulsions sans notification ni audition préalable Dans sa décision, le juge Murphy a critiqué la politique, la qualifiant d'inhumaine et juridiquement incohérente. Il a notamment évoqué plusieurs cas où des migrants ont été renvoyés vers des pays inconnus, sans être informés à l'avance et sans pouvoir consulter un avocat. Les autorités américaines ont, selon les documents judiciaires, déjà expulsé plus de 200 Vénézuéliens vers El Salvador — pays où certains seraient actuellement détenus dans des centres de rétention dénoncés pour leurs conditions inhumaines. D'autres expulsions controversées concerneraient des migrants originaires de Laotie et de Birmanie, transférés ou en passe de l'être vers des pays comme le Soudan du Sud, où les Etats-Unis eux-mêmes reconnaissent des risques élevés d'enlèvements et de violences. Accords controversés avec des pays tiers Selon des informations obtenues par la chaîne américaine CBS, l'administration Trump a entamé ou finalisé des négociations avec des Etats comme la Libye, le Rwanda et le Costa Rica, pour accepter sur leur sol des migrants n'ayant aucun lien de nationalité avec eux. Une pratique qui rappelle les politiques externalisées de gestion migratoire, souvent critiquées sur le plan des droits humains. Ces accords dits de "pays sûrs" font partie intégrante de la nouvelle stratégie migratoire de Donald Trump, dans le cadre de son second mandat présidentiel. L'objectif : accélérer les expulsions, désengorger les centres de rétention américains et dissuader les candidats à l'immigration clandestine. La justice dénonce une atteinte aux droits fondamentaux Les quatre migrants ayant saisi la justice ont déclaré craindre sérieusement pour leur vie s'ils venaient à être expulsés vers des pays tiers. Le juge Murphy leur a donné raison, affirmant que l'administration avait violé "sans aucun doute" l'ordre de la cour en procédant à des expulsions sans respecter la procédure. Le juge a donc exigé que l'administration mène des entretiens de "crainte raisonnable" — une évaluation légale destinée à déterminer si une expulsion contreviendrait aux traités internationaux, notamment la Convention contre la torture. Ces entretiens devront désormais avoir lieu en présence d'un avocat, rétablissant un minimum de garantie procédurale. Un affrontement entre exécutif et judiciaire sur fond de campagne anti-immigration Pour le Département de la Justice, cette décision judiciaire constitue une entrave majeure aux priorités de l'administration. Le procureur général adjoint John Sawyer a qualifié l'ordonnance du juge Murphy de "usurpation des prérogatives de l'exécutif" en matière de politique migratoire et de sécurité nationale. Ce bras de fer s'inscrit dans une campagne migratoire durement renforcée depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche. Au programme : suppression d'exemptions humanitaires, limitation des recours juridiques et multiplication d'accords bilatéraux pour le transfert des migrants. Ainsi, alors que les Etats-Unis poursuivent leur stratégie d'externalisation de la gestion migratoire, la justice fédérale tente de freiner les dérives les plus graves. L'issue de ce bras de fer devant la Cour suprême pourrait avoir des répercussions majeures sur le droit d'asile et la protection des migrants, dans un climat électoral où la question migratoire reste hautement inflammable. Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!