Alors que la guerre à Gaza entre dans son 22e mois et que les tensions s'exacerbent sur la scène internationale, la France et l'Arabie saoudite ont co-présidé ce lundi à l'ONU une réunion inédite consacrée à la mise en œuvre de la solution à deux Etats, israélien et palestinien. Cette conférence, convoquée par l'Assemblée générale des Nations unies, vise à ranimer un processus de paix moribond et à enclencher une dynamique politique globale, à un moment où la reconnaissance d'un Etat palestinien gagne en légitimité. Une reconnaissance qui change la donne L'annonce du président Emmanuel Macron, jeudi dernier, de reconnaître officiellement l'Etat de Palestine en septembre a surpris et redonné de l'élan à une conférence que certains observateurs disaient vouée à « l'insignifiance ». Selon Richard Gowan, analyste au sein de l'International Crisis Group, cette déclaration pourrait inciter plusieurs autres pays à emboîter le pas. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a affirmé que d'autres Etats européens annonceraient leur intention de reconnaissance au cours de cette réunion, sans toutefois en dévoiler la liste. Parmi les pays que la France tente de convaincre figure le Royaume-Uni. Néanmoins, le Premier ministre britannique Keir Starmer a déclaré vendredi qu'une telle reconnaissance devait s'inscrire dans un « plan global ». L'Allemagne, quant à elle, a déjà écarté cette option à court terme. Actuellement, au moins 142 des 193 Etats membres de l'ONU, dont la France, reconnaissent l'Etat palestinien proclamé en 1988 par la direction palestinienne en exil. Cette reconnaissance s'inscrit dans la continuité de la résolution de 1947, qui prévoyait le partage de la Palestine sous mandat britannique en deux Etats, l'un juif, l'autre arabe. Si Israël fut proclamé l'année suivante, la création d'un Etat palestinien reste encore aujourd'hui une promesse non tenue, freinée par des décennies de conflits, de colonisation, et d'impasses diplomatiques. Un contexte d'urgence et de scepticisme Malgré le soutien de la communauté internationale au principe des deux Etats vivant côte à côte, en paix et en sécurité, les contours d'un tel projet restent flous. L'extension continue des colonies en Cisjordanie et les menaces d'annexion rendent chaque jour plus hypothétique la viabilité d'un futur Etat palestinien. Pour Jean-Noël Barrot, « la perspective de l'existence d'un Etat de Palestine n'a jamais été aussi menacée ni aussi nécessaire ». C'est dans ce climat que la conférence ambitionne de poser les bases d'un plan d'action, articulé autour de quatre axes : 1. la reconnaissance internationale de la Palestine, 2. la réforme de la gouvernance de l'Autorité palestinienne, 3. le désarmement et l'exclusion du Hamas, 4. la normalisation des relations entre Israël et les pays arabes. Aucune normalisation avec Israël n'est attendue à court terme, mais pour la première fois, plusieurs pays arabes présents à la conférence devraient condamner explicitement le Hamas et appeler à son désarmement, selon les déclarations du ministre français. Une étape jugée cruciale par Paris et Ryad pour sortir du statu quo. « Cette conférence est une occasion unique de transformer le droit international et le consensus diplomatique en plan d'action concret », a déclaré Riyad Mansour, ambassadeur palestinien à l'ONU, appelant à faire preuve de « courage » face à l'inertie. Sans Israël ni les Etats-Unis, mais avec 100 délégations Notons que ni Israël ni les Etats-Unis ne participent à la réunion, initialement prévue en juin puis reportée en raison de la guerre entre Israël et l'Iran. Le segment ministériel de cette semaine doit déboucher sur un sommet prévu en septembre, possiblement dans la foulée de la reconnaissance française. Plus de 100 pays sont attendus à la tribune entre lundi et mercredi, notamment le Premier ministre palestinien Mohammad Mustafa et de nombreux ministres des Affaires étrangères. L'enjeu immédiat, au-delà des discours, est aussi de répondre à l'urgence humanitaire à Gaza. Alors qu'Israël annonce des pauses humanitaires dans certaines zones du territoire, la pression internationale s'accentue pour obtenir un cessez-le-feu durable et entamer une reconstruction politique et matérielle. Ainsi, en replaçant la solution à deux Etats au centre du jeu diplomatique, la France et l'Arabie saoudite espèrent relancer une dynamique internationale jusqu'ici bloquée. Reste à voir si les engagements politiques exprimés à l'ONU se concrétiseront dans les semaines à venir, ou s'ils s'ajouteront à la longue liste des promesses sans lendemain. La conférence de septembre sera un test décisif. Commentaires Que se passe-t-il en Tunisie? Nous expliquons sur notre chaîne YouTube . Abonnez-vous!